Chapitre II

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Alison

J'ai pu profité d'un moment pour moi après l'atterrissage. La ville en soit n'a pas changé, mais pourtant je la regarde d'un œil nouveau. A l'époque, cette immensité et sa population me faisait peur. Toujours active, toujours dans la superficialité et dans le dictate de la maigreur absolue et du silicone. Pour les gens ne rentrant pas dans ses codes et ses boîtes, la vie peut être dure, vraiment dure. Aujourd'hui, les regards ont changé. Les gens se retournent sur moi, tout aussi troublant qu'appréciable. Je suis la version 2.0 de moi-même. Et si la Floride est pleine de vice, je me sens comme un symbole de pureté. Jeune, naturelle et optimiste. Larry m'attend dans une berline noire au coin de la rue. Je profites de l'instant en marchant dans la rue. C'est appréciable d'être personne dans ce pays. Je ne suis pas «  la fille de  », je suis une jeune femme qui se balade en toute quiétude dans les rues de la ville. Je salue le chauffeur et m'engouffre dans la voiture climatisée. Ce mois de juin est intense ici, rien à voir avec la moiteur ambiante de Paris et son air étouffant. J'apprécie la fraîcheur de la voiture. Larry est assit à côté de moi, malgré la fatigue du voyage, il est souriant. Il vient de se farcir vingt heures d'avion aller-retour, tout ça pour moi. Je lui souris, reconnaissante. Je redécouvre ma ville à travers les vitres de la voiture. Et j'aime cette vue. Elle me transit. Je suis de retour, ma jolie. Puisses-tu m'épargner cette fois-ci. J'envoie un message à ma mère.

«  Arrivée à bon port  ! Le cadeau est magnifique. Je t'aime tellement ♥  »

Le trajet jusqu'au quartier privé de mon père dure moins de vingt minutes. J'ai un trac monstre. Revoir tout ceux et celles que j'ai quitté m'angoisse un peu. Nous ne sommes plus des ados prépubères. Ils ont dû changer, aussi bien que j'ai changé. Je ne parles pas que du physique, bien évidemment. J'ai pris en maturité et en confiance en moi. Même si ma sensibilité est toujours intacte, je me sens vivante. Je l'ai gagné et amplement mérité. Je pose ma tête sur l'épaule de Larry, son bras dur est un réconfort. Il ne me repousse pas, il sourit tout en pianotant sur son portable. Je me laisse bercer par la voix de Nina Simone qui se diffuse lentement dans les enceintes.

«  It's a new dawn

It's a new day

It's a new life

For me

And I'm feeling good  »*

La voiture s'arrête devant un portail imposant. Depuis toujours, il m'impressionne. Une sorte de douane avec des gardiens postés et armés. Une prison ne serait pas aussi bien sécurisée. Je me sens toute petite devant l'imposante grille qui s'ouvre une fois le contrôle effectué. Je soupire pour me donner de la contenance. L'impression d'être une starlette qui se rend à une avant-première avec tapis rouge m'interpelle. Je ris doucement de mon imagination débordante. La voiture s'arrête complètement au bout de quelques minutes. Ma portière s'ouvre à la volée. Et je vois des bras, des têtes qui se jettent sur moi. L'assaut me surprend et m'émeut à la fois. C'est bon d'être chez soi. Je détache ma ceinture à la hâte pour presser les corps en ébullition au plus près de moi. Dexter a maintenant quinze ans. Mon petit frère est devenu un beau jeune homme qui a hérité des yeux foncés de maman. On se ressemble beaucoup lui et moi, il est la deuxième personne la plus chère à mon cœur. Heureusement pour moi, il vient à Paris à chaque vacances et on s'écrit quasiment tous les jours. Je sors de la voiture avec difficultés. Dexter dans mes bras, aussi ému que moi. Ce petit mec est aussi la sensibilité personnifiée. Un cœur tendre dans un corps immense. Il me dépasse d'une tête avec mes talons. La seconde paire de bras est celle de ma sœur, Joan. Elle est toujours aussi magnifique. Grande, élancée, ses cheveux blonds clairs attachés en tresse déstructurée, et ses yeux gris plus foncés que les miens, remplis de larmes.

Délictueux [En Pause] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant