✖ Chapitre 19 : Les livres de mathématiques ne vous cachent pas des regards ✖

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(Let Yourself Go - Green Day)


Mon stylo noir rebondissait avec un claquement sonore sur la feuille de papier. Clac-clac. Qu'est-ce qui m'avait pris? Clac-clac. C'était un comportement que je ne me connaissais pas. Jamais avant aujourd'hui je ne m'étais dit que j'irais faire la forte tête devant les autres. Clac-clac. Qu'est ce qui m'avait pris? La question me tournait dans la tête, heurtant ces moindres recoins. Je ne le savais clairement pas. J'ai toujours eu un tempérament de feu à l'intérieur, certes, mais j'ai toujours fait en sortes qu'il ne ressorte pas aux yeux de tous. Et là, devant ceux que j'espérais conquérir, il était ressorti. Clac-clac. Mais après tout, n'était-ce pas juste la vérité qui était sortie à cet instant ? Ne voulais-je pas simplement exprimer ce que je ressentais réellement vis à vis d'eux? Clac-clac. Mais quel était réellement le problème de ma relation avec les six autres? Étais-ce le fait qu'ils soient "populaires"?

Tout leur réussit. Pas moi.

-Mademoiselle Martin, pouvez vous cessez ce tintamarre ?

A contre coeur, je rangeais mon stylo, tentant de me concentrer sur les gribouillis noirs du tableau, écrit par notre chère Mme.Savages, une prof de français d'une cinquantaine d'années, rondelette, une jupe verte lui cachant les jambes et un châle jaunâtre recouvrant ses épaules. Sur l'estrade, elle apparaissait bien plus grande qu'elle ne l'était réellement : même moi, je la dépassais.

Voyant que j'avais effectivement fini de faire du bruit et que les trois quarts des regards s'étaient posés sur moi, elle remonta ses lunettes carrées sur son long nez, avant de reprendre son cours à propos du Cid - d'après ce que j'avais cru décrypter au tableau.

Je sentais encore le regard d'une ou deux personnes converger vers mon dos. En lançant un léger coup d'œil vers l'arrière, j'aperçus Nathan détourner les yeux, dirigeant ses rétines vers sa trousse tachée d'encre - étrange, il me semblait qu'elle était encore propre la semaine dernière. Quant à Pierre, j'avais le temps de voir ses cheveux plonger dans le livre de mathématiques qu'il tenait dans les mains. A priori, l'indiscrétion était une qualité que je partageais avec plusieurs personnes de la classe.

~•~•~•~•~•~•~

Je plaçais une main devant mon front, en visière de protection des rayons chatoyants de l'astre diurne, et manquait de tomber lorsqu'une masse indéfinie me sauta dessus, me faisant reculer de deux bons mètres. Une explosion de rire suivit, provenant de plusieurs personnes, y compris celle qui se trouvait au-dessus de moi. Je finis par apercevoir le visage d'Hécate, ses cheveux bicolores flottant autour de son visage. Lorsqu'elle se décala, ceux d'Alex, Simon et Léonard - décidément jamais l'un sans l'autre - m'apparurent alors.

-Sarah, on a une proposition à te faire.

J'arquais un sourcil, surprise. Agathe surgit de nulle part pour décoiffer sa soeur et nous proposa d'aller faire un tour au simply market avant de se poser dans le parc. Nous hochâmes tous la tête d'un commun accord avant de nous diriger dans la rue qui menait jusqu'au magasin de quartier. Dix minutes plus tard, provisions en main, nous nous asseyions sur la pelouse encore verte du square le plus proche des lycées Hélène Boucher et Maurice Ravel, souvent occupé par les déserteurs des cours, qui préférait s'enfumer la gorge plutôt que réviser leur géographie.

-Alors, quelle est donc cette proposition?

Agathe et Hécate étaient en train de s'acharner à ouvrir le paquet de cookies tout choco fraîchement acheté, tirant en tout sens sur "l'ouverture facile" - vous savez, le truc qu'ont créé les industriels pour faire des caméras cachées (je suis certaine qu'ils en font) - ce qui emplissait la pelouse d'un étrange bruit de plastique et d'aluminium.

Rock It (Inachevée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant