Quatre - Dernière Partie

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Z A C H A R Y

Deux ans après son décès

Je cours aussi vite que je peux. Je dois m'éloigner le plus possible de ces deux policiers. Ils sont malheureusement bien plus rapides que cet homme au corps frêle. Je n'aurais pas dû le posséder. Il me faut un corps plus en forme. Je presse alors le pas afin de trouver un coin où les policiers ne me verront pas. Je dois rapidement quitter cette ville, ce qui sera assez difficile avec cet individu chétif.

À bout de souffle, je m'arrête et je remarque qu'ils ne me suivent plus. C'est le moment idéal. Je m'avance vers une ruelle sombre et étroite, où un homme fume sa cigarette. Au moment où j'allais changer de corps, j'aperçois les policiers qui se dirigent vers moi, en me criant de me rendre. J'abandonne aussitôt l'idée de posséder un autre humain.

Épuisé, je reprends quand même ma course effrénée, quitte la route et m'enfonce dans la forêt. Sans m'arrêter, je jette un rapide coup d'œil derrière moi. À mon plus grand bonheur, personne ne me suit. À peine ai-je le temps de reporter mon regard devant moi que je trébuche sur une racine à la surface du sol, disposée juste avant une pente assez abrupte. Je dégringole la côte à toute vitesse, en me cognant sur plusieurs rochers. La descente finit, et je me redresse difficilement, malgré mon étourdissement. Puis, j'enlève les feuilles collées sur mes vêtements. Mes avant-bras sont endoloris et ensanglantés du fait que je me sois protégé le visage avec. Heureusement, car l'homme qui habite ce corps serait sans doute défiguré à son réveil.

J'observe autour de moi et ne vois ni route, ni maison, ni pancarte qui pourrait m'indiquer où je suis. C'est l'endroit idéal pour laisser le corps du garçon à l'abandon. Je commence alors à extraire mon âme de son corps. C'est un processus assez difficile qui demande beaucoup de concentration. Enfin, je réussis. Le jeune homme s'effondre, probablement endormi ou même évanoui, à cause de la fatigue que lui ont procurée la course et la chute.

Je le quitte immédiatement, en m'imaginant la réaction qu'il aura lorsqu'il se réveillera. J'aurais bien aimé attendre pour la voir de mes propres yeux, mais je veux partir de cette ville. Elle me rappelle trop de mauvais souvenirs.

Il y a deux ans, c'est dans cette même ville que j'ai tenté commettre un braquage qui m'a conduit à la mort. J'ai appris, après mon décès dans un accident de voiture, que mon frère Murphy m'avait trahi lors du vol. Je m'étais alors promis de le faire souffrir, et j'ai réussi. Étonnamment, il arrivait à me voir et à m'entendre, contrairement aux autres humains. Le torturer par différents moyens m'était donc bien plus facile. Après l'avoir harcelé pendant un peu plus d'un an, j'ai finalement atteint mon but : le rendre fou à lié. Il s'est, par la suite, suicidé. Je l'ai retrouvé, pendu dans sa chambre. Je me souviens que ses amis étaient attristés de l'apprendre. Moi, ça m'était égal.

Après sa mort, j'ai tout fait pour oublier mon frère, et j'y suis parvenu. Je me suis alors découvert une habileté très spéciale : la possession. Être invisible a certainement ses avantages, mais le pouvoir de se transporter de corps en corps en a aussi. J'ai donc décidé de posséder différentes personnes pour enfreindre la loi, puisque défier les règles m'a toujours paru très amusant. Pour faire cela, j'aurais pu rester un simple fantôme. S'échapper des autorités est alors plus facile, puisque personne ne me voit. Mais le plaisir de voir les gens désorientés et paniqués lorsque je quitte leur organisme à un endroit au milieu de nul part est extrêmement amusant. C'est pourquoi après avoir échappé aux policiers, je laissais les gens seuls, dans des endroits perdus. Ils se réveillaient tout déboussolés, puis retournaient en ville pour se faire arrêter pour des crimes qu'ils n'avaient même pas commis. C'est encore un petit plaisir que je m'autorise aujourd'hui.

Le seul désavantage, lorsque je fais cela, est que je me retrouve, moi aussi, au milieu de nul part. C'est parfois inquiétant, mais aujourd'hui, je sais que je viens d'arriver par le sud. Si je veux partir, je dois donc suivre le nord. Je me mets alors en route vers l'inconnu, en espérant trouver une ville proche.

Deux minutes viennent de s'écouler lorsque j'aperçois une maison au loin, à travers les branches d'arbre. Je cours alors dans sa direction.

Lorsque je sors enfin des bois, je suis à quelques mètres de la lugubre demeure. Elle n'est pas en bon état. Elle semble même être très ancienne et abandonnée. En observant d'un peu plus près, je remarque une jeune fille, allongée sur le sol, proche de la porte d'entrée.

— Quelque chose n'est pas normal, pensé-je.

Je décide de m'approcher de la demoiselle. En arrivant à côté d'elle, je m'agenouille et l'observe. Elle est tout simplement magnifique, même avec ses cheveux bruns légèrement emmêlés, et sa peau extrêmement pâle. Ses joues sont parsemées de taches de rousseur claires.

— Que fait-elle allongée ici ? me demandé-je.

Elle habite peut-être cette maison, et s'est évanouie pour une raison quelconque juste avant de partir. Dans ce cas, je devrais l'emmener dans un endroit plus paisible.

Si elle habite ici, elle doit bien avoir une chambre. Je la prends alors dans mes bras, et pénètre dans sa demeure. Elle est très spacieuse, mais aussi assez poussiéreuse. Je me dirige vers le fond de la pièce, et toujours avec la fille dans mes bras, je monte les escaliers. À l'étage se trouve un petit couloir. À la fin de celui-ci, je peux voir une chambre à travers une porte entrouverte. Je m'avance aussitôt dans cette direction, et pose la demoiselle sur son lit.

Je remarque qu'elle a une minuscule plaie sur son front. Elle s'est probablement cognée en tombant. Alors que je m'apprêtais à partir pour chercher un morceau de tissu afin de nettoyer sa blessure, j'entends un craquement provenant du lit qui se trouve désormais derrière moi. Je me fige sur place. S'est-elle réveillée ?

— Qui es-tu ? s'exclame une voix féminine.

Elle peut me voir. Comment est-ce possible ?

Je commence à quitter la pièce avec l'idée de partir définitivement, lorsqu'une main se pose sur mon épaule. Mon sang se glace.

Qui es-tu ?

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Voilà, voilà ! C'est la fin du chapitre quatre. Dites-moi ce que vous en pensez dans les commentaires, et n'hésitez pas à voter !

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