Neuf

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H O P E

Bip. Bip. Bip.

Je suis dans une noirceur totale et n'arrive qu'à entendre ce bruit lointain qui se répète sans arrêt. Il se mélange à des échos de voix et des pas qui martèlent le plancher. Je tente de regarder autour de moi, mais je n'y vois rien. En essayant de parler, je remarque que je ne peux non-plus émettre un seul son.

Après ce qui me semble être une éternité, j'ai l'impression que les bruits se rapprochent de plus en plus. Ma vision se clarifie et je discerne une petite fille couchée sur un lit d'hôpital à une dizaine de mètres de moi. C'était elle, dans mon rêve.

C'était moi.

Sa peau pâle et la teinte bleu argenté du lit contraste sur le fond noir qui s'étend à perte de vue derrière la scène.

Sa mère, ou plutôt ma mère s'approche du lit avec un ours en peluche dans les bras.

— Tiens, ma belle, dit-elle entre deux sanglots. Je t'ai apportée Oli pour t'accompagner lorsque tu seras seule avec les médecins. Il t'aidera à avoir confiance et à garder espoir. Comme nous, il t'aime beaucoup.

Elle prend une grande inspiration, sèche ses larmes, et saisit la main de l'enfant en s'asseyant au pied du lit.

— Papa n'a pas pu venir aujourd'hui. Il avait beaucoup de travail et ne pouvait pas le manquer une fois de plus. Nous sommes très heureux que l'opération se soit bien déroulée... On espère juste qu'elle portera ses fruits.

La femme sourit, peu convaincue de ses paroles.

Je ne comprends pas de quoi elle parle. Quelle est cette opération ? Et qui sont ces médecins ?

Elle se lève, et en remarquant qu'elle tient encore l'ourson, elle se dépêche de le mettre à côté de sa fille, comme s'il lui évoquait de mauvais souvenirs. Sa mère lui embrasse le front, puis la quitte en s'effaçant petit à petit dans le sombre décor. Le lit et l'enfant disparaissent.

En entendant à nouveau les voix, je me retourne. C'est la même scène qu'avant, mais cette fois-ci, des machines étranges se trouvent partout autour du lit et de la fillette. Des personnes habillées en tunique blanche et portant toutes un masque leur couvrant le nez et la bouche les encerclent. Certains prennent des notes en examinant l'enfant, tandis que d'autres sont simplement en train d'attendre. Ils parlent si vite que je ne comprends pas ce qu'ils disent.

En cherchant à m'approcher d'eux pour mieux les entendre, je trébuche sur je-ne-sais-quoi et plonge sur le sol à pleine vitesse.

Avant de m'y cogner, je me réveille en sursaut dans ma chambre. Étourdie, je regarde autour de moi, mais personne n'est là. Je suis pourtant certaine qu'avant cet étrange rêve, j'étais dans le salon accompagnée des deux garçons. C'est alors que j'entends un énorme fracas, comme si quelque chose avait éclaté.

— Il y a quelqu'un ? crié-je.

Je m'attends à ce qu'on me réponde, mais je me rends vite compte que je suis seule. En me redressant dans mon lit et en posant mes pieds nus sur le plancher glacé, je deviens subitement étourdie et ma vision se trouble. Je m'agrippe aux draps à côté de moi, sachant très bien qu'ils ne peuvent pas m'empêcher de tomber. Après avoir patienté quelques secondes, les points noir et blanc qui brouillaient ma vision se dissipent.

Décidée à retrouver les garçons et trouver l'origine du bruit, j'enfile mes bottines en cuir orange brûlée. Pour une raison que j'ignore, quelqu'un me les a enlevées. Je le saurai lorsque je les retrouverai. Je quitte ma chambre et j'appelle mon ami en m'engageant dans le couloir.

— Zachary, où es-tu passé ?

L'autre jeune homme m'est inconnu. Je ne sais pas son nom, donc je ne peux pas lui crier de me rejoindre. De toutes façons, s'il m'avait entendu hurler, il serait déjà venu.

Je descends les marches et observe le salon en espèrant les retrouver ici. Toujours aucun signe de leur présence. Par contre, je remarque que le verre de la fenêtre du fond de la pièce est en mille morceaux sur le sol. Elle n'était peut-être pas en bon état auparavant, mais elle n'était pas complètement détruite. Quelqu'un l'a brisée, causant le vacarme que j'ai entendu il y a une ou deux minutes. Je dois retrouver mes amis, ils savent peut-être qui a fait ça.

Je passe par la porte d'entrée et me précipite à l'extérieur de ma demeure. Encore à leur recherche, je regarde autour de moi. Ils ne sont ni dans la maison, ni proche d'elle. La forêt est la seule option restante. Je ne sais seulement pas pourquoi ils y seraient.

— Où pouvez-vous bien être passés ? soufflé-je.

J'aperçois l'ombre d'un individu dans les bois. Il a l'air d'être tourné vers moi.

— Zachary ? répété-je à son intention.

La personne commence à s'enfuir. Ne voulant pas la perdre de vue, je commence à la poursuivre. Je quitte le seuil de porte pour m'engouffrer au pas de course dans la forêt. L'ombre s'éloigne vite de moi en serpentant entre les arbres et leurs branches. Alors que j'arrive au bord des bois et de la route, je la perds de vue.

Ce n'était définitivement pas l'un des garçons que je cherche. C'est probablement lui qui a fracassé ma fenêtre, mais pourquoi aurait-il fait cela ? Je dois en parler aux autres. Peut-être qu'ils auront des réponses à mes questions. Mais avant tout, je dois les retrouver.

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