Signe avait pris de l'avance pour endosser le rôle d'éclaireur. Plus le temps passait, plus le groupe se rapprochait de la montagne. L'once avait trouvé la piste des singes depuis plusieurs minutes déjà et s'appliquait à ne surtout pas la perdre. Une chose était certaine : elle conduisait au cœur de la chaîne.
Le léopard des neiges trouva enfin l'entrée d'un tunnel naturel qui s'enfonçait très loin devant lui. Signe le signala à ses compagnons qui la rejoignirent avec hâte. Sighild fit quelques pas à l'intérieur afin d'observa les alentours. L'air était étrangement chaud et lourd. Derrière elle, Thorkil trouva une pierre où s'asseoir. Eivind remarqua son malaise, s'approcha et lui demanda ce qu'il se passait :
— Je n'y arriverai pas, confessa-t-il.
Sighild se tourna vers le maître d'armes à ces mots.
— Je porterai ton havresac, proposa le pisteur. Tu seras plus léger et plus à l'aise pour marcher.
— Ce n'est pas ça, souffla Thorkil. Je suis fatigué à cause du voyage et du manque de nourriture. Je doute d'arriver au bout du périple et la pensée de mourir avant de revoir ma famille me terrifie.
Sa meneuse le rejoignit :
— Nous touchons au but, Thorkil, tu dois lutter. Si les troupeaux sont là-dedans nous pourrons bientôt manger à notre faim, le voyage de retour sera plus aisé.
— Nous trouverons bientôt les singes, oui, mais aurai-je seulement la force de me battre s'il le fallait ? Oh Sighild ! Je crois que je ne survivrai pas et j'ai peur, tellement peur.
— Que veux-tu faire, alors ? demanda-t-elle. Rester ici et attendre la mort ? Rentrer seul et mourir ? Ou venir avec nous et mourir en donnant une chance aux autres de survivre ?
— N'es-tu pas capable d'épargner même Thorkil ? intervint Vilfrid, contrarié. Fais au moins semblant, ça nous changera.
— Ferme-la, Vilfrid, ordonna la chasseuse. Je ne t'ai rien demandé. Ta décision, Thorkil ?
L'homme soupira. Sa cheffe n'avait pas tort ; quitte à mourir, autant le faire en essayant de sauver le village.
Prenant appui sur son épée, le grand barbu se releva. La mort était le seul repos du guerrier.
— Tu as raison, Sighild. Si je meurs, ce sera au combat. Je te suis.
Elle hocha la tête d'un geste entendu avant de reprendre la marche, guidant le groupe le long du boyau rocheux.
L'orbe au cou de Signe fut bientôt la seule source de lumière qui perçait l'obscurité. Les guerriers étaient si loin sous terre que les rayons du soleil ne les atteignaient plus à présent. L'allure se ralentie à cause du manque de visibilité. Les compagnons se rapprochèrent les uns des autres afin d'assurer leur sécurité.
Après plus d'une demi-heure de marche dans ce dédale de galeries où montait une odeur nauséabonde d'urine et d'excrément, Signe annonça voir de la lumière. Ils étaient trop bas sous terre pour que ce soit le fait du soleil pourtant personne n'émit cette hypothèse, craignant certainement ce que cela impliquait.
Les compagnons se positionnèrent en file indienne et rasèrent la paroi jusqu'à atteindre les limites d'une caverne. Sighild fit signe à son groupe de se baisser et fut obéie sur l'instant. La chasseuse s'avança un peu et passa sa tête dans l'ouverture.
Le chemin sur lequel ils se tenaient descendait en pente douce dans une cavité aux dimensions inénarrables éclairée par des centaines de torches et des puits de lumière. Les avents naturels permettaient d'évacuer un peu l'odeur infecte de l'endroit car de part et d'autre du sentier se trouvait le gibier disparu. Des centaines d'animaux somnolaient comme s'ils avaient été drogués pour les tenir tranquilles, sans quoi il aurait été impossible de les contenir.
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Livre 1 - Sighild
FantasyEn Sigvald, pays enneigé s'il en est, l'hiver précoce s'installe à son aise, prenant de court les villages isolés. Le gibier se raréfie puis disparaît des terres de manière mystérieuse, condamnant les populations à la famine si rien n'est fait. C'es...