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Tarik
09:47

- Oh ta race, y'a du courrier pour Tarik... Andrieu ? Ton nom de famille c'est Andrieu ? s'écria mon compagnon de cellule, avant d'éclater de rire.
- Y'a quoi ? Pourquoi tu rigoles ? C'est l'nom de mon père et toi tu rigoles ? demandais-je en m'approchant de lui.

J'allais pas le tapper, il était tout keus comme un cure-dent, c'était un minot  et j'tappe pas les minots, moi.

- Nan mais, reprit-il toujours en souriant. Tu m'as dit que t'étais algérien nan ?
- Algérien-corse, le mariage mixte tu connais pas, fils de pute ?

En voyant mon air sérieux et énervé, son sourire s'efface peu à peu de son visage.

- Hassoul, t'as du courrier.

Du courrier ? Pour moi ? Il me tendit une enveloppe que je lui arrachai des mains. J'pouvais pas l'ouvrir maintenant, vu qu'il était là. J'attendrai qu'il parte.

*
10:55

"Adresse de l'expéditeur : Jade ***** (sah j'fais des étoiles parce que j'ai la flemme de trouver un nom), 39 rue sarrette, Bâtiment D, appartement 68, Résidence La Verrerie, 33800 Bordeaux."

Quand mon cerveau fit le rapport entre ce que je vis et ce que je lus, mes yeux s'écarquillèrent un instant.
Déjà, premier choc : Je venais de recevoir une lettre.
Je venais de recevoir une lettre qui, qui plus est, venait de Jade : deuxième choc.
Mon coeur se mit à s'accélérer, bizarrement, je redoutais le moment de l'ouvrir. Après tout, peut-être que cette lettre était juste une lettre d'adieu : "Oui, bonjour Tarik, je me suis mariée avec un imam meilleur que toi dans tous les niveaux, qui d'ailleurs, est un dieu du sexe. Voilà, merci, besslama."
Peut-être ? De plus, le fait de n'avoir reçu aucun appel de Sadjo, renforçait mon idée.
Mais il fallait bien que je l'ouvres un jour ou l'autre nan ?
Je déchirais l'enveloppe, sans vraiment prêter attention à la force que j'y donnait, et la parcourut du regard en une vitesse incroyable.

Je restai un instant à observer le mur gris et froid qui se tenait devant moi, un large sourire sur le visage.
Alors, elle ne s'était pas mariée avec un imam. Bien au contraire, elle avait changé d'avis.
Vite, j'attrapai une feuille et un stylo qui traînait par là :

"Salam Jade,
Bon sah, j'vais faire court, t'sais très bien j'aime pas trop écrire. J'suis grave ferhane que tu m'ai envoyé une lettre. Sans te mentir, ici c'est la galère, j'me sens enfermé comme un chien, et j'pense que c'est ça l'plus dur.
On va faire notre hlel in shâ Allah à ma sortie, tu me manques hayati wAllah c'est un truc de ouf.

Vas-y,
Tarik.

Ps : Crois pas j'suis un PD et tout, aussi, genre j'oublie vite, nan, juste j'te pardonne. Pour notre hlel, tu veux quoi comme gamos mdr ?"

*
Jade
09:34

Quand j'eut finis de lire sa lettre, je m'allongeais sur mon lit, la feuille serrée sur ma poitrine, le regard rêveur.
Il m'avait répondu. Mon dieu, j'étais tellement contente qu'il ne m'en veuille pas.
J'voulais lui répondre, mais je savais pas trop quoi écrire sur le coup, sincèrement. Orh, de toute façon, j'avais toute la journée pour la poster. Fallais que j'aille en parler à Sana.
J'veux une Maserati. Ouais, c'est bien une Maserati.

*
13:26

- Ah, vas-y, rentre dans le salon, y'a personne, me dit mon amie en ouvrant.

J'entrais donc et alla m'asseoir sur le canapé. Quelques minutes plus tard, elle me rejoint.

- Be...
- Sana faut que j'te dises hajja, la coupais-je brutalement.
- Putain, nan...
- Quoi ?
- À chaque fois que tu me dis ça, c'est pour m'annoncer un truc louche. Me dit pas que t'es enceinte de Nabil ?

Hein ?

- QUOI ? m'écriais-je. MAIS NHEL SHEITAN NAN !
- Hamdoullah ! Y'a quoi alors ?
- J'ai reçu une lettre de Tarik.

Elle me jugea un instant. C'était fréquent chez elle, elle restait là à te regarder, sans sortir le moindre mot, comme si elle essayait d'assimiler tes paroles, à les comprendre et à faire le rapprochement avec tout ce qu'elle avait entendu. On aurait dit Ayoub.

- Attend, daigna t-elle enfin à sortir.
- Quoi ?
- Mais t'aime pas, Nabil, de base, toi ?

Putain, mais elle me pose des questions dont, moi-même, je ne sais pas la réponse. Oui, je crois que d'un côté j'aime Nabil. J'ai en permanence envie d'être avec lui, de l'aider, de manger avec lui, de l'embrasser gueh. Mais d'un autre côté, j'aime Tarik et c'est avec lui que j'veux me marier. Mais, en y repensant, m'imaginer ma vie loin de Tarik, m'était impossible. Putain, mais j'suis qu'elle genre de pute à jouer avec deux frères wAllah ?

- Mais... Mais...

Et c'est à ce moment que j'éclatais en sanglot. J'en pouvais plus.

- Oh hbiba, pourquoi tu pleures, me demanda t-elle, avant de me prendre dans ses bras.
- J'en ai marre de devoir faire un choix ! lâchais-je entre deux pleurs.
- Quoi ?

Elle se redressa et me prit par les épaules.

- Un choix entre Nabil et Tarik ?

J'hochai à nouveau la tête, des larmes ruisselant abondamment sur mes joues.

- Mais Jade... Jade, reprend-toi.

Oui, elle a raison, t'as pas le droit de te laisser aller comme ça, Jade. J'hochai la tête et essuyai mes larmes, le hoquet de la tristesse se déclencha alors en moi.

- Moi, sah, reprit-elle. J'vois pas il est où le dilemme...
- Ben...
- Est-ce que, me coupa t-elle, Tarik t'as déjà dit "Je t'aime" ?
- Ben, oui, répliquais-je entre deux hoquets.
- Et Nabil ?

Il ne m'avait jamais dit qu'il m'aimait.
Voilà la conclusion : il n'avait pas de dilemme, parce que Monsieur Nabil Andrieu s'en battait complètement les couilles de moi.

*
Nabil
18:21

Elle me manque. Sah, j'ai beau baiser toutes les kehs de Thaïlande, j'ressens toujours ce vide en moi. C'est elle que j'ai envie de baiser. J'sais c'est cru, tout ça, que ça s'fait pas de dire ça à propos d'une femme, surtoût quand elle est voilée, mais j'm'en fous c'est la vérité, j'suis un homme, j'ai des besoins. J'ai qu'une seule envie, c'est de retourner en France, de la prendre dans mes bras, de faire un p'tit hlel vite fait et d'ensuite lui faire la dose de bébés. Mais la vie, elle est pas aussi facile, Nabil. Depuis le début, j'savais qu'elle était promise à Tarik, mais j'préférais fermer les yeux. Peut-être que j'me disait que si j'les fermaient bien forts et que j'les réouvraient : les embûches, qui se trouvaient sur notre chemin, auraient disparu. Mais la vie, elle est pas aussi facile, Nabil. Donc, maintenant, tu vas fermer ta gueule et vite aller trouver de quoi te piquer : tout compte fait, t'as pas tout oublié.

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أمينة
@GhettoYouth_

À suivre...

[PNL] Jade - Le choixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant