De L'Autre Côté du Comptoir

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NAMJOON

J'ouvre les yeux, une musique douce et plaisante envahie mes oreilles, mon esprit divague. Il me faut quelques instants pour comprendre que l'endroit dans lequel je me trouve n'est ni ma chambre ni mon salon. Je me relève incrédule. Pourquoi ici ? Je ressens une certaine nostalgie mais surtout une grande détresse.

-Namjoon c'est toi ?

Je ne le vois pas arriver mais ces quelques mots qu'il prononce m'informe aussitôt de son identité.

-Que fais-tu ici tout seul ? Viens nous rejoindre !

Le sourire qu'il me lance me contamine, je décide de le suivre et de quitter la salle de classe. Il m'entraine dans des longs couloirs qui me sont familiers.

-Le temps est parfait pour un match de basket ça serait dommage que tu ne sortes pas alors que le ciel est si bleu !

Sa bonne humeur communicative et son sourire doux et lumineux me font manquer un battement. Nous marchons encore un moment, dix, quinze minutes ? Ce couloir semble interminable. Soudainement l'endroit devient plus sombre. Il se retourne pour me faire face, ce n'est plus la même personne qui se trouve devant moi. À ses pieds je découvre un corps baignant dans une flaque de sang.

-C'est de ta faute !

Il m'attrape violemment le cou, ses ongles s'enfonçant dans ma chair.

-Et tu dois payer pour ça !

Je le repousse de toutes mes forces et essaye de retrouver mon souffle. Il me pointe du doigt le visage déformé par la rage.

-TOUT CELA EST DE TA FAUTE ! TOUT EST À CAUSE DE TOI !

Aucun son ne sort de ma gorge, comme filtré par la peur et l'incompréhension. D'autres corps inertes apparaissent autour de nous.

-Vas-tu continuer à vivre avec ce péché ?

Il me lance un regard où je peux lire tout le dégoût et la haine qu'il ressent.

-Penses-tu seulement vivre après cela ?

Je me réveille à bout de souffle, des gouttes de sueurs froides coulent le long de ma tempe. Encore. Ces mêmes cauchemars me rendant fou chaque nuit.

4:07

Je me lève pour prendre une douche, je sais bien que je n'arriverai jamais à me rendormir alors j'ai pris l'habitude d'exploiter ces insomnies de manière à les rendre utiles.

L'eau coule doucement contre mon corps. C'est froid. Je regarde les gouttes dévaler la surface de ma peau. C'est vrai... Le cumulus déconne. Il faudrait que j'appelle un technicien. Je reste un moment sous cette chute d'eau froide j'espère être plus réveillé une fois sorti mais mes cernes noires ont du mal à s'effacer.

Je décide de travailler pour me changer les idées. Oui, ma vie est tellement pathétique qu'il faut que je travaille pour ne pas me retrouver face à moi-même et mes idées noires.

*

14:16

Les minutes, les heures défilent mais je continue de taper sur les touches de mon clavier. Les gargouillements venant de mon ventre m'alertent que ça fait plus de 3 jours que je n'ai pas pris de repas conséquent. Je me lève, après avoir constaté que mon réfrigérateur est complètement vide je décide de commander.

J'allume la télévision et tente d'écouter les conneries que nos dirigeants essayent de nous faire avaler. Tentative échouée. Je change vite pour un documentaire animalier sur la vie mouvementée des animaux d'Afrique. Alors qu'une magnifique girafe apparaît à l'écran une soudaine douleur à la tête me parvient et des souvenirs du week-end dernier me reviennent...

~

-Mais tu vas fermer ta sale gueule ?

-Ce n'est pas très gentil ça... Vous savez même si cette fille vous a jeté il y a peut-être un moyen de la récupérer, les filles regrettent souvent après la rupture.

-Non ça me va comme ça.

-Mon dieu !

-...Quoi ?

-Seriez-vous un libertin ?!

Mais qu'il est con.

-Si vous faites partie de ces personnes qui font pleurer les jolies filles vous pouvez partir. Sais-tu combien de larmes j'ai dû essuyer dans ce bar ?

Je le regarde avec un sourcil relevé.

-Et les moches elles peuvent aller se faire voir ?

-Non puisqu'aucune fille n'est moche.

-... T'essayes de te la jouer gentleman c'est ta seule façon de les attirer ?

Je tourne mon verre dans mes mains tout en observant le fond complètement vide.
Quand je relève la tête j'ai juste le temps d'apercevoir un léger rictus qui me donne froid dans le dos. Alors qu'il continue de nettoyer ses verres (d'ailleurs beaucoup trop nombreux pour un bar dont je suis actuellement le seul client ) il reprend la parole.

-Connais-tu la girafe ?

Je le regarde comme s'il était fou.

-Tu vois ce qu'elles ont sur la tête ? On pourrait se demander mais quelles sont ces petites cornes ? Et bien ça s'appelle des cornillons, et ce sont des os qui sont recouverts de peau. On n'est pas encore sûr de la fonction exacte de ces petites cornes... Mais sur ces cornillons il y a des glandes odorantes, lorsque les girafes mangent des feuilles en haut des arbres, elles y laissent leurs odeurs. Ça leur permet de savoir qu'il y a une girafe dans le coin. Aussi les cornillons de chaque girafe sont différents, c'est ainsi qu'elles peuvent se reconnaitre.

D'accord j'ai maintenant la confirmation. C'est un fou. Je n'en doute plus. Mais il a au moins la prétention de m'apprendre quelque chose...

-Les girafes sont des animaux très particuliers et plutôt incroyables. Elles arrivent à atteindre leurs objectifs si facilement avec une telle organisation. Mais malgré cette hauteur qu'elles mettent à la plupart des autres animaux, elles se sentent profondément seules. C'est ainsi qu'elles essayent à tout prix de trouver un conjoint pour atteindre les hauteurs ensemble.

Alors que j'étais prêt à taper le numéro des hommes en blancs son regard me remet en question, me fait penser que ce n'est peut-être pas un simple fou et qu'il essaye plutôt de me faire passer un message. C'est alors qu'il se rapproche de moi et me chuchote à l'oreille.

-Allez on baise ?