II

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A quelques secondes d'entrer pour le match


J'échange un regard avec Laurent. On a tous le même avis. On trouve ça con. Terriblement con. Demander à Antoine de jouer. Lui demander de jouer contre le Portugal. Ce match en lui même, était une connerie. On entre sur le terrain. Les hymnes, la mise en place puis l'engagement. Les Portugais ont l'honneur de débuter le match. Le débuter avec Quaresma à la place de leur coéquipier. Mort d'une crise cardiaque. Mort alors qu'il faisait ce qu'il aimait le plus au monde. Mort sous les yeux de la personne qu'il aimait et qui l'aimait. Mort tout court. Quelle connerie. Le médecin disait qu'il allait bien. Il n'avait rien. Il n'aurait jamais du mourir à 31 ans. Personne ne devrait mourir aussi jeune. Le match est dur pour les deux camps. Il l'est encore plus pour les Portugais. Pour les Portugais et pour Antoine. Mais il s'accroche. Il joue. Il ne lâche pas. Il a sûrement la rage. Il doit se dire qu'il faut qu'il gagne. Il doit se dire... en fait, j'en sais rien. Je ne sais pas ce qui lui passe dans la tête.


A la mi-temps.


Laurent s'approche de moi.

"Je crois qu'il a fait une connerie."


Je me tourne vers Antoine.

"De quoi tu veux parler ?

-Je ne sais pas. Il est bizarre. Il n'a pas l'air bien."


Je me concentre pour détecter quoique ce soit. C'est vrai qu'il est blanc. C'est vrai qu'il a des cernes. Ca se comprend. Il l'a vu s'effondrer sur le terrain. Il l'a vu mourir. Le match va reprendre. Deschamps a décidé de me laisser sur le terrain. Gignac prendra ma place plus tard. C'est mieux ainsi. J'en ai parlé avec Didier. Il fera sortir Antoine avant moi. Pour que l'autre guignol ne se retrouve pas face à Antoine. Mon coéquipier est en pleine discussion avec Pepe. Quaresma s'est incrusté. J'ai bien envie d'y aller. Je regarde Laurent qui serre les dents. Il n'a pas digéré la finale de l'Euro, je crois. Ca se comprend. Il y avait clairement faute et Quaresma n'a rien prit. Le match reprend. On est en train de perdre. 2-1. Le but est signé Antoine. Il n'a pas célébrer. Je crois que je le comprends. Si Jennifer mourrait, je crois que je n'irais pas mieux que ça. De plus, la personne qu'il a perdu aurait du être face à nous ce soir. Il aurait du être pile en face d'Antoine. Portant le même numéro que lui. Cela fait 30 minutes qu'on a reprit. Tout se passe bien. On a égalisé, en plus. Laurent fait une faute plus que vulgaire sur le remplaçant de Ronaldo. Il l'a blessé, évidemment. Penalty pour les portugais. Il faut que Steve arrête ce but. Il le faut. Eder s'apprête à tirer. Il le fait. Au même moment, Antoine s'écroule sur le terrain. L'arbitre ne comptabilise pas le penalty. S'il était entré, il n'aurait pas compter. Eder devra retirer.


Après le match


Le match a prit fin. Il a prit fin du moment où Antoine s'est écroulé. D'un commun accord entre nous tous. Portugais comme Français. Plus pour la forme, Pepe et Raphaël ont parlementés quelques minutes avec les arbitres et les entraîneurs mais c'était clair pour tout le monde. Le match s'arrêtait. Il ne pouvait pas continuer. On le savait. Il n'aurait pas du jouer. On l'avait dit à Didier. On l'avait prévenu mais il n'en a fait qu'à sa tête. L'un d'entre nous va bientôt exploser. Ce ne sera pas moi, c'est sûr.

"Putain ! Il n'avait pas le droit de le forcer à jouer. C'était évident qu'il n'était pas en état."


Apparemment, c'est Laurent qui craque.

"On le savait. On n'a pas assez forcé. On n'a pas assez fait chier Didier.

-Tout ça pour un putain de Portugais !"


J'attrape le poignet de Laurent qui commence à se lever. Je sais qu'il en meurt d'envie. Je suis dans le même cas mais frapper cet abruti ne servirait à rien. Je secoue la tête quand il tourne le regard vers moi. Il comprend et s'assoit. On attend des nouvelles d'Antoine depuis déjà trop longtemps. Il va y avoir d'autre craquage.

"On aurait dû être plus attentif."


Je prends le coussin dans mon dos et le lance au visage de Kevin. Il ronchonne.

"En même temps, il avait qu'à se bouger cette semaine."


Cette fois, c'est Raphaël qui se lève et aucun de nous n'a le temps de l'empêcher de coller son poing sur la tronche de Gignac qui réplique, irrémédiablement. Kevin et Steve retiennent André-Pierre et Laurent et moi éloignons Raphaël. On sort de la pièce, tous les trois, suivit bientôt par la plupart des membres de l'équipe. On s'installe dans le jardin du château. On a besoin de calme. On a besoin que Gignac se la ferme. On a besoin qu'il reste loin de nous.

My heart will go on (Antoine Griezmann) [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant