Scène 3 - Enchanté.

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Une promesse résonnait dans la tête de la jeune fille. Une promesse d'un monde meilleur, en tous cas, pour elle.

Toriel avait énoncé le nom du monstre qui rendait souvent visite à la jeune fille. Cette simple nomination avait fait naître en la jeune enfant un espoir qui lui permit de supporter une journée où cris, pleurs, aurevoirs et agitation devenaient insoutenables et envahissants.

Peu avant que les gouvernantes ne s'enfouissent dans les cuisines, Frisk, plus impatiente que jamais, se posta devant la chambre de sa maman de substitution. Elle hésita quelques secondes, tendant une oreille fatiguée sur la lourde porte de bois. Une chanson feutrait à travers la cloison.

L'émotion l'envahit et la bouffa toute entière. Elle avait déjà entendu cette chanson auparavant et savait tout ce qu'elle représentait pour la gouvernante, elle, qui avait perdu ses enfants très jeune. Elle ne s'était jamais réellement épanchée sur ce sujet, qui animait en elle une douleur insurmontable, mais elle avait laissé comprendre que son premier enfant s'était donné la mort, alors que le deuxième avait disparu dans quelques circonstances dépassant l'entendement.

Frisk eut les larmes aux yeux. Sa vision se brouillait, les lourdes larmes s'écrasaient sur le sol. Elle fut emprise de soubresauts et du bien vite soutenir son poids contre le mur jouxtant l'entrance vers un monde de solitude, aux notes aussi douces qu'acidulées. Finalement, elle réussit à se contrôler, reprenant le dessus sur ses émotions fugaces, et sécha ses larmes d'un revers de manche. Elle respira fort, avalant quelques bouffées d'oxygène qui souvent, lui manquaient. Puis elle toqua, et attendit la permission pour entrer.

Toriel finit par lui ouvrir, et fut surprise de trouver la jeune enfant.

- Que me vaut ta visite?

Depuis la matinée, Frisk avait un vague sentiment d'incompréhension, mêlé à de la frustration. Depuis que sa gouvernante avait prononcé le nom interdit du monstre, elle brûlait d'impatience d'en savoir plus. Elle était animée d'une vague d'espoir, dont elle s'était tellement privée.

Elle dessina avec ses doigts, dans l'air, le nom interdit. Toriel resta abasourdie, et ce qui suivit aspira tout ce en quoi Frisk avait bâti sa journée.

- Sans? Est-ce que c'est... C'est le nom de ton ami imaginaire?


Frisk fixa sa gouvernante, ahurie. Elle la fixait mais ne la reconnaissait pas. Son cœur s'emballa, sa tête tourna. Les étoiles descendirent du ciel et vinrent se coller à son visage. Sa tête tournait, tel un manège à chevaux mal réglé. Ses intestins menaçaient de quitter son corps, de s'arracher de cette existence reniée. Le visage de la gouvernante se déforma en une figure inconnue, plus horrible encore que tout ce qu'elle avait connu, avant de s'éteindre. Les yeux clos, tout ce que la jeune fille avait connu s'évanouit.


Lorsqu'elle les rouvrit, elle était allongée sur son lit, une luminosité orangée berçant la calme pièce. Sur le dos, elle contempla son plafond, l'esprit embrumé. S'était-elle... Evanouie?

Elle tourna la tête vers le placard qui lui faisait tant peur.

Il était sombre, des visages menaçants se dessinaient. Mais elle continuait de les fixer. Un bruit inconnu se déversa dans ses oreilles. Elle se sentait vide, tout au fond d'elle. Le manque s'installa, annihilant tout sur son passage. La forêt intérieure de la jeune fille brûlait comme un feu de forêt dévastateur, lui arrachant les tripes, lui arrachant le cœur.

Le bruit de succion devenait de plus en plus fort. Elle qui était habituée aux craquements d'os sentit son échine se glacer. Ce n'était pas Sans. Mais quelque chose de pire.

De très fines branches de lierre finirent par ramper sur les parois de l'armoire. Noirâtres, comme pourrissants. Un son aigu et grave, rauque et limpide, un cri, un chuchotement, tout lui parvint en même temps. C'était son nom, "Frisk". Plus elle le répétait dans sa tête, moins il avait de sens. "Frisk". Etait-ce ce à quoi elle se résumait? "Frisk". Rien d'autre qu'un agencement de son qui vrillent les tympans. "Frisk". Elle ne savait pas. "Frisk". Elle ne savait plus. "Frisk, viens".

Elle se leva, sans trop savoir quand, ni quoi, ni pourquoi, ni comment.

Les racines presque décomposées avaient envahi le sol de sa misérable chambre. Plus imposantes, toujours plus effrayantes.

La jeune fille hurlait intérieurement, mais un simple sentiment avait pris le pas sur l'horreur, la peur, l'angoisse, la tétanie:

La détermination.

Alors elle s'enfonça dans son armoire, toujours plus loin, enjambant des racines et des branches, toujours plus étoffées, jusqu'à arriver à un cul-de-sac.

- Howdy! Tu es nouveau dans l'Underground.

Doucement, Frisk se retourna.

- Je ne t'ai jamais vu avant.

Doucement, le sentiment de danger s'éveilla.

- Je m'appelle Flowey.

Doucement, la panique s'interposa.

- Flowey, ...

Doucement, l'œil gigantesque la scruta.

- ... Ton pire cauchemar.

Schyzophrenia Syndrome [HORRORTALE Fanfiction] (FR)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant