M comme Maïa

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Assise sur ma chaise, le décolleté plongeant et les jambes croisées, je lançai des regards désireux à Lykos. Pour l'instant, le plan avait l'air de marcher. Je devais tenir mon rôle de traînée du lycée afin de m'approcher du beau gosse et ainsi trouver le moyen de piéger Otello.

Piéger Otello n'était pas compliqué, il fallait juste quelque chose pour l'enregistrer et un moyen de pression. Avec Nausicaa, nous avions monté le plan pendant les vacances. Je devais à la base m'approcher directement d'Otello mais il s'était mis entre temps avec la pimbêche de Giana. Ça ne nous aidait pas.

Le résultat des votes pour la déléguée du lycée avait été truqué. Comment le savions-nous ? Nausicaa et Otello avaient été désignés pour comptabiliser les votes de l'urne. Elle fit la première moitié avec une très grande majorité pour Aurora. La proportion de votes déjà ouverts notée par Nausi' ne pouvait que traduire la défaite de Rio, le reste des votes ne pouvant atteindre une égalité ou une supériorité parfaite.

En un rien de temps, je m'étais mise d'accord avec elle que nous devions à tout prix faire éclater la vérité au grand jour. Il était hors de question d'abandonner un projet pareil. Nous n'avions pas d'alliés jusqu'à présent et devions miser sur nos propres capacités. Du jour au lendemain, je m'étais transformée en une fille vulgaire alors que j'étais la prude qui faisait les cours de soutien de maths aux 9th après les cours.

- Salut beau gosse. Commençai-je en défaisant légèrement la ceinture de ma cible.

Nous venions à peine de sortir de la salle de classe que j'attaquai déjà par la voie de la grossièreté. Cela marchait étonnement bien sur les gars de son genre, impliqué dans le monde nauséeux et superficiel de l'amour lycéen. Il me faisait de la peine.

- Je dois rejoindre Otello, ça va être légèrement compliqué maintenant, mais glisse ta main aussi loin que tu peux. Répliqua-t-il d'une voix rauque.

La pitié se mua en dégoût. Ce garçon n'avait aucun principe. Je n'étais pas mieux mais je faisais cela dans un idéal de justice, lui, par pur habitude.

- Si tu veux, je t'accompagne jusqu'à Otello et on enchaîne juste après. Proposai-je avec un sourire pseudo-irrésistible.

Lykos poussa un gémissement maîtrisé sous les yeux horrifiés de certains élèves avant de m'enrouler les épaules avec un bras et m'amena jusqu'à son meilleur ami.

Bien joué Maïa.

- Giana a rompu. Lâcha Otello dégoûté au blond.

Intérieurement, je poussai un petit cri de joie. Le plan se dénouait facilement, plus de lèche-bottage sur Lykos... Je pouvais me concentrer sur la façon de le coincer avec Nausicaa.

J'envoyai un message d'information à ma meilleure amie, sûrement occupée à ranger quelques livres de la bibliothèque.

« Otello est libre. Je le coince au local nettoyage dans quinze minutes chrono et t'y entres. À toi de jouer Nausi' »

Il était l'heure de manger et Lykos me proposa d'aller avec lui aux toilettes. Avant cela, je proposai innocemment à Otello de m'aider à trouver le chemin jusqu'au local de nettoyage. Je fis semblant d'avoir été punie pour avoir séché les cours et devait impérativement faire des travaux de nettoyages généraux. Il fallait occuper Lykos.

- J'ai plus de capote pour toi, tu veux bien en acheter avant au distributeur sur le parking. On se rejoint à la troisième cabine. Susurrai-je à l'oreille du con.

Otello m'accompagna gentiment jusqu'au local. Sur le trajet il croisa le regard de Giana, la peste aux cheveux aussi violets qu'une de ses amies.

- Elle a cassé comment ? Demandai-je en ne jouant plus aucun rôle, inquiète de voir les yeux du garçon se ternir de rage.

Il soupira en tournant à droite.

- Je ne lui ai pas apporté de cadeau ce matin alors que c'était nos « deux semaines » de couple. Elle n'a pas apprécié et elle m'a plaqué. Raconta-t-il la voix lasse, les pas lourds.

Sur ces mots, j'entrai dans le local. Nausicaa n'était pas encore arrivée. Mince, que devais-je faire ?

- Otello ? Entamai-je moins sûre de moi.

Le garçon entra dans la pièce l'air inquiet.

- Tu sais tu ne devrais pas autant souffrir pour une fille comme elle. Si elle se fiche de ce que tu ressens, ça ne sert à rien. Elle n'en vaut pas la peine. Conseillai-je sincèrement.

Il se posta dans un coin du local. De mon côté, je m'approchais de la porte du local, au cas où ma meilleure amie arriverait pour que je file en douce.

- C'est facile à dire, tu n'as pas l'air de chercher à avoir une relation sérieuse. Moi j'en voulais une, bordel. Jure-t-il en baissant les yeux.

C'est là que je m'étais dit que Lykos n'avait rien à voir avec Otello et que potentiellement, j'étais carrément le genre de fille à apprécier un peu trop le gars en face de moi à présent.

- Je suis tellement désolée. Lâchai-je en entendant les coups à la porte de Nausi'.

J'étais partie sans rien ajouter, le laissant aux mains de ma meilleure amie alors que la seule nouvelle envie en tête de la vraie Maïa était de l'embrasser pour le consoler.

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