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Quelqu'un toque à la porte, pourtant il est presque minuit. Est-ce la lumière qui s'émane de ma chambre qui à dû indiquer à une personne mon insomnie ?

- Oui ?

Emma rentre dans ma chambre avec dans ses mains, une boisson encore fumante. Elle se pose à mes côtés sur mon lit. Elle me tends la boisson que je distingue être un chocolat chaud avec de la chantilly maison. Je la remercie et bois une gorgée. C'est très bon.

E : - Quand je n'arrivais pas à dormir au foyer, je me faisais ce chocolat chaud pour apaiser mes douleurs. Un peu de chaleur réconforte toujours.

- Il est très bon, merci Emma.

Elle sourit et soupire, à ce que je vois elle n'est pas venue que pour m'offrir ce moment de réconfort.

E : - Crochet s'inquiète beaucoup pour toi. Il remarque que tu as changé mais il ne sait pas comment t'aborder, comment discuter avec toi des raisons de ces changements. Je me suis dis que tu arriverais peut-être plus à te confier à moi, notamment s'il s'agit d'une peine de cœur.

Mon père est inquiet ? Je ne pensais pas que mon état était à ce point minable. Je ne pense pas que je serais capable de lui raconter mes histoires, cette part d'ombre qui s'est immiscée en moi et qui s'est formée un nid douillet. Personne ne doit savoir ce qui s'est passé, personne. Ici, je suis cette fille qui bascule entre l'innocence et la découverte. Ici, l'identité que je me suis forgée en mer n'existe pas. Ici, je peux me laisser attendrir par un chocolat chaud. Ici, je suis en sécurité.

- Je vais bien Emma.

E : - Ce n'est pas l'impression que nous avons. Tu n'as pas à tout garder pour toi ! Tu as le droit de craquer parce que tu es un être humain, comme nous tous. Les larmes ne te rendent pas faible, elles te permettent de dissiper les œillères que tu te mets et ça ne peut que t'aider à te délivrer de ton malheur.

- J'insiste, ça va.

Je soupire en posant ma tasse sur ma table de nuit. Mon père entre à son tour dans la chambre, un visage déconfit.

K : - Je pensais avoir déjà eu le droit à ta crise d'adolescence.

J'arque un sourcil, pas convaincue. Puis, trois autres personnes nous rejoignent. Mais.. C'est quoi ce piège !? 

- Qu'est-ce que vous faites tous là ?

Je me lève du lit en croisant les bras sur ma poitrine, les sourcils froncés et les regardant tous.

MM : - Nous sommes une équipe et quand un membre de notre équipage ne va pas bien, les autres non plus. Tu prends tout ce qui t'arrive dans un silence de plomb, il faut que tu libères tes peurs et des peines. Tu as le droit de craquer de temps à autres.

- Oh, et qu'est-ce qui m'arrive au juste ?

Je n'apprécie pas vraiment la tournure des choses. Je me sens prise au piège et ça, ce n'est pas un sentiment de réconfort !

K : - Tu as passé une année vraiment difficile, j'ai pu lire à travers tes mots dans tes lettres. Je savais que jamais je n'aurais te laisser partir seule dans ta quête. Crois moi jeune fille, je suis passé par avant toi, je suis tombé au sol et personne n'était présent pour me relever. Je me suis laissé couler jusqu'au jour je ne pouvais plus aller plus bas, je n'ai jamais été aussi pitoyable de toute ma vie. Mais toi, tu as l'occasion de te relever et pour ça, nous sommes tous présents pour te tendre la main.

Ils se mettent tous à me sourire gracieusement, c'est pas possible c'est un complot. Pourquoi est-ce qu'ils font ça ? J'aimais bien moi me convaincre d'un mensonge, me plonger dans l'acidité de la démence universelle, me faire croire que dans un futur proche, tout s'arrangera. J'aimais ce cocon féérique qui me gardait loin de la dure réalité.

- Et peut-être que moi, ça ne me donne pas envie. Vous pensez me ramasser à la petite cuillère mais vous vous trompez ! Je suis plus forte que j'en ai l'air. Tout ce qui arrive fait parti de mon destin et je l'accepte. La désillusion est devenue ma partenaire de crime favorite et ça m'aide à ne pas sombrer dans la démence. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ? Qu'on m'abandonne constamment ? Je sais très bien que vous aurez une tirade si parfaite à ce sujet mais ce n'est pas ce qu'il me faut. Il me faut apprendre. Il me faut connaître. Il me faut détester pour continuer de ressentir.

Une larme coule le long de ma joue, moi qui ne pleure jamais, c'est ironique. Il faut croire que cette larme rejoint la fierté de Peter lorsqu'il a laissé la sienne claquer contre le parquet, comme quand il a claqué la porte sans se retourner pour voir ce qu'il avait laissé. Ce qu'il a laissé c'est une épave, une éponge qui infiltre en elle que de la saleté et qui la rejette sur les autres. Je ne suis plus rien, quand bien même j'ai déjà été quelque chose. Je déteste la façon dont il me fait sentir minable, la façon qu'il a de toujours s'en aller, la façon de tourner sa veste, la façon de ne rien prendre au sérieux, la façon de briser mon cœur encore et encore mais pire encore. Je me déteste de continuer de l'aimer.

Henry est le premier à me prendre dans ses bras. Je n'avais même pas remarqué sa grande taille, bientôt il me dépassera ce bambin. Il s'écarte en effaçant grâce au revers de sa main ma larme.

H : - Tout ce qui te manque tu le retrouves en chacun de nous. Tu n'es pas seule.

Je renifle et reste figée, attendant qu'ils s'en aillent. Ils finissent par comprendre ce silence et s'en vont, les épaules baissées et le souffle lourd. Ils doivent penser que c'est un échec mais ils se trompent. J'avais peut-être besoin de me prendre cette claque pour réaliser l'importance de ces évènements.

Je pleure. Je sens ma poitrine se serrer, ma gorge se nouer sous les multiples sanglots. Je pleure tellement que mes jambes s'effondrent sous le poids de mes larmes. Ma peine est immense, elle ne peut tout simplement plus porter tous les souvenirs de mon douloureux chagrin, alors je pleure pour évacuer. Je pleure parce que je n'ai plus que ça pour exprimer ma souffrance, je pleure parce que je pense que verser mon malheur est bien mieux que d'accroître autant de douleur. Je me laisse aller au son de mes larmes. Une symphonie de paix.

W I C K E D (2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant