Le pourchasseur pourchassé.

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Le soir, au coucher du soleil, quand le ciel étalait ses couleurs pastel: bleu, vert, orange, parfois rose. C'était à ce moment qu'arrivait l'impensable. Quand les lumières de la ville commençaient à éclairer le ciel qui s'assombrissait, on distinguait l'ombre menaçante du fameux Oméga S. Démon que le temps avait créé, né des ténèbres et se nourrissant de lumière. Il ne craignait qu'une seule chose, les élites Mister-Pol qui avait été choisies pour protéger le peuple. En réalité ce n'était pas tant les Mister-Pol qu'il craignait, mais plutôt leurs armes: des tubes de magnanum. Une pierre que l'on avait découverte depuis peu dans les mines de l'Ouest du pays. Elle avait pour propriété de s'éclairer dans l'obscurité, elle émettait une lueur orange presque fluorescente. Son éclat faisait fuir les ténèbres du monstre de la nuit. Les lampadaires de toute la ville avaient, depuis cette découverte, été remplacés par des globes taillés dans cette pierre pour protéger les habitants de la menace.

Quelle menace ? A vrai dire, personne ne le savait vraiment, et personne ne cherchait à le découvrir. On racontait que dans le sud, plusieurs villes avaient été dévastées par la créature. Les rumeurs étaient diverses et la terreur avait gagné les provinces, cela avait provoqué pas mal de grabuge auprès des paysans. Le monde entier était plongé dans la peur.

On a nommé cette période la période "Lampanique". Quel nom étrange... Durant cette période, des groupuscules résistants s'étaient formés. Leur but était inconnu de tous, sûrement parce que le gouvernement étouffait l'affaire, et là encore personne ne cherchait à savoir ce qu'ils voulaient. Enfin, personne... c'était sans compter sur mon incontrôlable et démesurée curiosité.

J'avais toujours été curieuse mais là, on touchait des sommets. C'était plus fort que moi, je ne pouvais pas faire comme si de rien n'était... pendant de longues semaines j'avais attendu, sans faire d'histoire, sans poser de question, j'avais vraiment essayé de ne PAS m'y intéresser. Mais le fait est que... je m'y intéressais. Cependant je restais quand même discrète sur mon désir d'en apprendre davantage à propos de cette résistance. Je n'avais pas vraiment envie d'être arrêtée. Même si, selon moi, il n'y avait pas beaucoup de risques que cela m'arrive, mais mieux valait être prudent.

Bref, depuis un certain temps je menais ma petite enquête. J'avais tout d'abord commencé par chercher tout ce que l'on pouvait trouver sur l'Oméga S, sans grand succès - j'aurais dû m'y attendre - car pratiquement tout ce que j'avais pu trouver était soit des articles imprécis où l'on abordait vaguement le sujet du monstre sans vraiment s'attarder sur sa nature, soit les sites du gouvernement classés top secret. j'ai donc fini par changé la cible de mes recherches et essayer de - plus ou moins - traquer les résistants. Ce qui me menais tout droit à , tenez-vous bien, une piste !

Il était jeune mais plus âgé que moi, et il était très discret. J'avais dû le chercher pendant des semaines avant de retrouver sa trace. On le surnommait le pourchasseur, et tout le monde le respectait. Enfin, le craignait plutôt... il était loin d'être une personne de confiance, c'était même à ce qu'on disait le plus dangereux des résistants. Savez-vous pourquoi ? Parce que ce jeune garçon était un tueur à gage. Le plus compétant de la région. Rien que ça... malheureusement pour moi, c'était également le seul à détenir ce que je convoitais: des infos.

Je me suis donc mise à le chercher, puis j'ai fini par retrouver sa trace. Il était en route - par un heureux hasard - pour la ville voisine. Je marchais tranquillement en direction de l'endroit où j'étais censée le retrouver lorsque je l'ai aperçu. à vrai dire je ne vis que sa longue cape arpenter le trottoir, mais je su tout de suite qu'il s'agissait du pourchasseur. une atmosphère de mort régnait tout autour de lui, et même à la distance où je me trouvais il m'était possible de la ressentir. L'idée m'a effleurée que, peut-être, les rumeurs selon lesquelles il aurait été maudit il y a de cela longtemps et que son cœur était le même que celui d'un démon n'était pas totalement fausses. Mais malgré les sueurs froides que me procurait sa seule présence, je décidai d'aller à sa rencontre.

Ok, j'avoue, j'étais morte de peur quand j'ai franchis la porte du bar où il était entré. En même temps c'était un bar réputé pour être un nid à criminel, ce qui pour être franche ne m'a pas paru très surprenant. Pour vous décrire la scène, non seulement c'était un endroit plus que lugubre avec un éclairage tellement faible que j'avais d'abord pensé que les propriétaires de ce trou avaient oublié de payer l'électricité, mais en plus lorsque je suis rentré, tous les gens présents dans cette caverne m'ont regardés d'un air particulièrement hostile. Tout à fait entre nous, je ne me suis pas réellement sentie comme chez moi dans ce bar.

Vous l'aurez compris, c'était pas un endroit très fréquentable pour des gens comme moi, c'est à dire... normaux. Enfin bref, malgré l'endroit et l'ambiance, je suis quand même parvenue à me glisser jusqu'à ce gars qu'on appelle le pourchasseur. J'ai hésité beaucoup sur la manière de l'aborder mais j'ai opté pour la manière "sûre de moi" (sans vraiment l'être, ça va sans dire).

- C'est toi qu'on appelle le pourchasseur ? dis-je en rassemblant toute ma volonté pour ne pas trembler.

Un léger murmure s'est fait entendre et a vite laissé place à un silence de mort. le garçon ne me prêtait pas la moindre attention, il restait muet le visage caché sous sa cape noire et son verre entre les mains. J'ai reposé ma question avec plus de voix cette fois. Un court instant je me suis demandé s'il n'était pas sourd puis après quelques secondes il a soupiré et s'est tourné vers moi, doucement.

- Qu'est ce que tu me veux ? lança-t-il

Mon temps de réaction s'est prolongé, il avait une voix étonnante. beaucoup moins brutale que je ne l'aurais imaginé.

- Je voudrais des informations. Lui répondis-je

Sa réaction m'a tellement surprise que j'en suis restée bouche bée : il s'est levé doucement , a payé son verre et est sortit du bar sans un mot, dans un très grand calme, me laissant seule devant une chaise vide.

*

J'étais effarée, il était parti !
Je sentais la colère monter en moi, et je ne prêtais même plus attention à l'endroit dans lequel j'étais (cette vieille caverne miteuse et lugubre). Je n'avais qu'une pensée en tête, le rattraper et bien évidemment lui faire regretter ce qu'il venait de faire.

Je sortis en trombe du bar, et me retrouvais dans la rue, seule. Il avait disparu; et je n'avais pas la moindre idée d'où il avait bien pu passé.
Bien évidemment, il faisait si sombre dans le bar que même s'il s'était tourné vers moi, je n'avais pas vu assez distinctement son visage pour pouvoir le reconnaitre dans la rue (même si dans le cas présent la rue était plus déserte que le pôle Sud). Ce qui ne m'avançait pas...

J'avais mis tellement de temps à retrouver sa trace et voilà qu'il me filait entre les doigts. Le destin lui même semblait être contre ma petite investigation. Cependant je ne renonçais pas et j'essayais de le rattraper. Qui sait, peut être qu'en tournant dans une rue au hasard je le retrouverais sans chercher bien longtemps.

C'était une fausse bonne idée... J'ai tourné en rond pendant des heures, d'abord pour le retrouver puis ensuite pour retrouver mon chemin car, c'était à prévoir : je m'étais perdue à force de tourner dans toutes les rues sans regarder leur nom.

Dusk ShadowsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant