Le rêveur (BxB)

Chapitre 1

Mon portable vibre, je le sens dans ma main droite. J'ai appris à me réveiller d'une autre façon, par le toucher des objets. Comme objet convaincant, mon portable, lui, peut vibrer, je me repère à ses vibrations. Ce n'est pas conseillé de le faire tous les soirs, mais je n'ai pas d'autres moyens pour le moment. Merci l'accident qui m'a fait perdre mon audition.

Je me lève et déjeune dans le salon, dont la décoration assez chic me pique toujours autant les yeux. Ce n'est pas que trouve l'architecture horrible, mais ça fait très bourgeois de bonne famille. Je vis dans cette maison bien trop immense avec ma tante, la sœur de mon père. Cette dernière m'a pris sous son aile quand elle a appris le décès de mes parents, elle est devenue une personne à qui je peux me confier. Lorsque les infirmiers ont annoncé leurs décès, elle s'est portée volontaire pour devenir ma tutrice. Bien sûr une autre personne s'est proposée pour devenir mon tuteur, mon oncle. Seulement en dépit de ses accès de violence physique, j'ai préféré être pris en charge par ma tante. De plus, je n'ai pas tellement d'affinité avec lui. Cet homme est tout simplement un banquier véreux, il court après l'argent. Voilà ce que m'ont dit mes parents à son sujet. Ma tante travaille en tant qu'infirmière dans un hôpital extrêmement réputé et elle surveille beaucoup mes oreilles. Je passe pas mal d'examens pour qu'elle puisse voir si ça ne s'aggrave pas. Cependant, je sais que jamais ne je vais pouvoir entendre à nouveau. Mes tympans ont été gravement endommagé et mes cellules auditives sont abîmées. Malgré ça elle m'incite à prendre un traitement, je n'ai jamais compris pourquoi d'ailleurs. Je ne peux plus entendre, donc c'est peine perdue. Quand une cellule auditive est abîmée ou détruite ça ne repousse pas, ce n'est pas comme les dents. Je sais qu'elle garde l'espoir que je puisse retrouver mon ouïe, mais ça fait longtemps que cet espoir s'est éteint. Ce n'est pas une pensée défaitiste, mais je suis réaliste, à moins d'avoir un miracle qui me tombe dessus, entendre à nouveau dans mon cas, c'est très rare.

Je prends quand même ce traitement inefficace pour éviter qu'elle me harcèle, je ne sens aucune différence en le prenant de toute façon. Par ailleurs, je peux la comprendre dans un certain point, c'est ce que j'ai souhaité aussi au début. Seulement, la vie l'a décidé autrement, elle n'est pas si rose qu'on le prétend. Même avec de la bonne volonté ça ne va rien changer du tout, à quoi bon s'accrocher à un souhait irréalisable ?

Après avoir fini, je me dirige vers la salle de bain pour m'habiller et me coiffer. Je jette un bref regard à travers le reflet de ma glace et je constate que je ne suis plus du tout le même, comme d'habitude. J'ai toujours ce visage ovale et fin, les joues légèrement creuses les cheveux mi-longs noir coiffé vite fait en bataille et ces yeux verts comme la couleur des pierres de jade. Je ne suis pas très musclé, je me considère comme mince, voir maigre pour d'autre. Par moment, je pense que je suis un squelette ambulant, tellement que je me trouve maigre. J'exagère trop peut-être, mais c'est l'impression que j'ai sur mon physique. J'enfile un pull gris assez large, un pantalon slim noir et une paire de bottes de la même couleur. Je me recoiffe vite fait, j'admets que ce n'est pas vraiment nécessaire dans le fond. Je sors, je prends mon sac de cours, mon portable et mon manteau long bordeaux. Je préviens ma tante de mon départ, pour sentir les pas dans la maison je pose la paume de ma main sur un mur, ça me permet de sentir les vibrations. Des fois, je me déplace carrément dans la pièce où elle est. Ses pas se rapprochent de moi, puis je la vois arriver avant de m'ouvrir la porte.

- À ce soir, lui dis-je.

- À ce soir Louan, soit prudent surtout je viendrais te chercher à la fin des cours, me dit-elle alors que je lis sur ses lèvres.

J'emboîte le pas et commence à prendre le chemin vers mon établissement scolaire. Mon cœur commence à se serrer car je vais une nouvelle fois de plus subir les moqueries des gens. Je ne le supporte plus. Pendant mon trajet que j'exécute à pieds, je reste attentif à ce que je vois, par exemple pour traverser une rue, ce n'est pas bien compliqué, mais je reste prudent. Les conducteurs sont de vrais fous au volant, ou encore quand il y a beaucoup de monde sur un trottoir, je change, eux ne savent que je suis malentendant. Ça m'évite de les percuter, voir pire, de me trouver au mauvais endroit s'il y a une altercation. Je prends l'habitude de faire ça, maintenant, au moins, pas de soucis. Quand le quotidien habituel est différent, difficile de retrouver le juste équilibre dans tout ça, c'est une habitude à prendre. Je ne suis pas un fuyard, contrairement à ce qu'on peut penser, c'est juste que je ne veux pas me prendre la tête avec des soucis de ce genre.