La maison sur la colline

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Après 6h00 nous nous garons enfin, devant une grande maison en pierres, au bout d'une allée de platanes. Nous sommes entourés par la forêt, et je trouve ça vraiment effrayant. Mon frère sort en claquant la porte. Il shoote dans les graviers, il a les yeux brillants, comme si il allait pleurer. Ma mère le regarde, l'air inquiet, puis me regarde, l'air maintenant interrogatif. Je fronce les sourcils et hausse les épaules pour lui montrer que je ne sais pas ce qu'il se passe.
- Que se passe-t-il mon chéri ? Demande-t-elle.
Martin nous tourne le dos.
- Rien, je décompresse du long trajet. À combien de kilomètres est la ville ?
Il est toujours retourné.
- 4 kilomètres, mais nous pouvons rouler vite sur cette route qui longe la forêt, il n'y a jamais personne. Tu es sur que ça va ?
Il met ses écouteurs et disparait derrière la maison.
Maman me fait peine, son regard est brouillé par la tristesse et par l'interrogation.
- Ne t'inquiètes pas maman, j'irai lui parler tout à l'heure.
Nous entrons dans la maison, qui est composée d'un rez-de-chaussée avec le salon, la cuisine et une salle de bain, d'un premier étage avec quatre chambres et une salle de bain assignée à chaque chambre. Un dernier étage est le grenier, où il n'y a rien mis à part d'inombrables cartons poussiéreux dans lesquels je pourrai fouiller quand je m'ennuirai.
J'envoie un texto à Charly :
"Nous sommes arrivés. C'est très grand, il y a une forêt tout autour, cet endroit me fait peur, j'aimerais que tu sois là. Martin est triste, je ne sais pas pourquoi. Toi qui parlais souvent avec lui, tu sais quelque chose ? Tu me manques, XOXO"
Il me répond immédiatement, comme toujours :
"Si tu as peur, dis-toi que je pense à toi. Je t'aime. Pour Martin, c'est un peu long. Appelle-moi et je te le dirai <3"
Je suis contente de savoir que Charly va m'éclairer pour mon frère, alors je l'appelle.
- Allô Abby ?
- Oui Charly, ça va, toi ?
- Oui comme d'habitude. Martin a un chagrin d'amour, c'est pas plus compliqué. Depuis deux moi il me parle d'une Leslie, et apparemment elle est déjà avec un autre maintenant qu'il est parti. Il est vraiment amoureux, alors il a du apprendre la nouvelle dans la voiture. Voilà, il a besoin de réfléchir, et je suis sur qu'il va encore vivre plein d'aventures avec d'autres filles ici.
- Il ne m'en avait pas parlé, à moi. Tu es vraiment parfait, Charly. Je ne savais pas que tu étais le confident de Martin, hihi, merci de me l'avoir dit, je vais essayer de lui remonter le moral. Je t'aime, bisous.
- Derien, je t'aime aussi, bisous et bonne rentrée dans ton nouveau lycée.
Je suis contente et rassurée d'avoir entendu sa voix. Je me dirige vers la chambre de mon frère ( je lui ai laissé la plus grande ) et je toque :
- Ouai, tu veux quoi ?
- Je peux entrer ?
- Ouai vas-y.
Je rentre, il est sur son lit, les joues rouges et les yeux brillants de larmes.
- J'ai pas pleuré, je viens de bailler.
Je souris. Mon frère a toujours été un très mauvais menteur.
- Tu sais Martin, je sais que tu as pleuré et je sais aussi pourquoi. Tu n'as pas de honte à avoir, les filles craquent pour les garçons qui pleurent.
- Ne te moque pas de moi, les filles ne m'intéressent pas.
Je ris.
- Je n'en suis pas si sure. Tu sais, des filles bien, il y en a plein. Leslie n'était pas si bien que ça, et elle n'était pas amoureuse de toi. C'est dur, mais c'est comme ça. Tu es beau, tu es gentil. Tu as tout pour plaire, tu en retrouveras une que tu aimeras encore plus. On parie ?
Il me regarde et me sourit.
- On parie.
Il tape dans ma main. Je le laisse et je vais dans ma nouvelle chambre. Je commence par coller sur les murs des posters des rolling stones, des photos de mes amis, des souvenirs. Je branche ma chaîne hi-fi et écoute un CD. J'envoie des textos, je regarde qui est Leslie sur facebook, elle est très jolie, mais il y a sur son mur plein de photos avec des garçons différents. Mon frère était aveuglé par son amour.
Je passe un bon moment à me demander si je suis vraiment amoureuse de Charly, ou si je ne sais pas ce qu'est l'amour, et que je pense aimer Charly alors qu'en fait il est comme un ami très proche. Ma mère toque à la porte, je le sais car j'ai reconnu le bruit de ses talons dans le couloir. Je lui dit d'entrer.
- Alors, tu as percé le secret de Martin ?
- Oui, il s'est fait briser le cœur par une Casanova féminine.
- Ah c'est jamais facile, tu pense que je peux lui parler ?
- C'est déjà fait.
Elle me regarde et me sourit. Elle ferme la porte et va s'asseoir sur mon lit à côté de moi.
- Tu sais, maintenant que nous sommes dans une vie tranquille et que la ville est un village, je pensais que tu pourrais te trouver un job pour les week-ends et les vacances, enfin tu vois ce que je veux dire.
- Oui, si ça peut me faire un peu d'argent, je ne dis pas non.
Je pense vraiment que c'est une bonne idée.
- Tu pourrais aller à la mairie demain, je peux t'y emmener.
- Ok, demain j'irai me renseigner.
Elle repousse une mèche de cheveux devant mon visage, elle sourit et me prend dans ses bras :
- Ma petite fille, je t'aime, tu le sais. Ce déménagement, c'est que du positif, cette maison est géniale, nous l'avons eue pour un petit prix par rapport à ce qu'elle vaut.
Soudain je pense à la maison. Tous ces cartons au grenier...
- Dis-moi, maman, qui a vécu ici avant nous ?
- L'agente immobilière m'a expliqué qu'une femme vivait ici avec son fils, et qu'elle est partie suite à un grand malheur vécu il y a trois ans. Elle a souhaité que ce malheur reste tu. Et elle a mis la maison en vente, nous voici aujourd'hui !
- Et les cartons du grenier, ils sont à elle ?
- Des cartons ? Sûrement, l'agente ne m'a pas dit qu'elle avait laissé des affaires, j'irai voir ça plus tard.
Maman sort, je l'entend marcher jusqu'à la chambre de mon frère, tenter une conversation à propos de Leslie et se faire rembarrer, puis je l'entends descendre et enfin préparer le dîner.
Dimanche fut exemplaire. Levée à 8h00, 10h00 à la mairie, rentrée à la maison avec un job en tant que serveuse dans un café à 12h00, repas de midi à un restaurant du village, balade dans un sentier dans la forêt avec ma mère et mon frère, à partir de 16h00 préparation des affaires pour la rentrée, puis je décide d'appeller Charly.
- Allô Abby ?
- Charly, tu vas bien ?
- Non. Tu me manques trop, je me sens vraiment seul. Heureusement que ma sœur est là, je ressens un vide immense.
- Ça me fait de la peine de t'entendre dire ça. Tu me manques aussi, mais ça ne fait qu'un seul jour ! Qu'as-tu fait aujourd'hui ?
- J'ai accompagné ma sœur faire du shopping au centre commercial, et toi ?
- J'ai d'abord décoché un stage de serveuse dans un café au village, puis je me suis baladée dans la forêt avec ma famille. Belle journée ensoleillée, et à Paris ?
- Pluie, pour la première fois depuis des semaines. Tu as emporté l'été et le soleil avec toi. Comment va Martin ?
- Bien. La journée lui a remonté le moral. Demain nous allons tous les deux découvrir nos nouveaux établissements scolaires.
Un silence règne. Trop long à mon goût.
- Charly ?
- Je suis là. Je dois te laisser, je t'aime.
- Je t'aime.
J'ai parlé avec Charly, tout se passe comme je m'y attendais. Je suis contente, je sais qu'il va s'en remettre, même si j'ai peur que la distance prenne trop de place entre nous au fil du temps.
Le soir, je m'endors, je suis sereine pour la rentrée demain, il n'y a aucune raison que ça se passe mal.

AbbyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant