Amour ?

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La journée est lente. Je ne cesse de penser à Justin, à la sensation de sa main sèche et chaude sur ma joue, à tout son être qui m'attire tellement. Je suis contente d'être son amie, même si je ne sors pas avec lui, je suis contente d'entretenir de bons rapports avec lui. Peut être parce que j'en ai peur. Diane me demande deux fois ce qu'il m'a dit, et je refuse de lui en parler. Elle reste à mes côtés mais son visage est crispé et l'ambiance est tendue lorsque nous mangeons toutes les deux au réfectoire.
- Écoutes, Abigaëlle, j'ai bien compris que tu ne m'écoutais pas souvent quand je te parlais, mais s'il te plaît écoutes moi maintenant.
Rien que le fait qu'elle m'ait appelée par mon prénom complet me force à lui accorder toute mon attention.
- Je t'écoutes.
- Tu fais ce que tu veux, etcetera... Mais fais attention. Justin est quelqu'un qui paraît si gentil et beau, si parfait, il se positionne en victime et
Je la coupe tellement ce qu'elle dit m'est insupportable.
- C'est faux, il ne se positionne pas en victime, c'est quelqu'un de très digne.
Elle me regarde, l'air exaspéré, puis reprend:
- Je poursuis, Justin est quelqu'un d'extrèmement dangereux, un criminel pour ainsi dire. Une mauvaise fréquentation. Je te dis juste, peut importe si tu restes en contact avec lui ou pas, qu'il est vraiment ignoble, et même si tu vis un rêve éveillé avec lui, ça ne durera pas. Je parle en connaissance de cause.
J'ai envie de rabaisser son beau visage dans son assiette de spaghettis, mais je m'abstiens car je ne comptes pas me retrouver dans le bureau du proviseur dès mon second jour. Je décide d'essayer d'en savoir plus.
- Comment ça, en connaissance de cause ?
Elle me regarde comme si j'étais une enfant naïve qui ne connait rien à la vie.
- Et bien... Je ne souhaite pas m'exprimer sur ça, pour l'instant.
- Mais je suis ton amie, tu peux tout me dire !
- Tu le fréquentes aussi.
- Non, je ne le fréquentes pas ! Il a essayé, j'ai refusé, c'est tout ! Ce matin il voulait juste savoir pourquoi, et je lui ai expliqué qu'il ne m'inspirai pas confiance. Il m'a laissée, et c'est tout.
- Très bien.
Dans ses yeux noirs je vois apparaître une jalousie immense. L'après-midi est aussi lente que la matinée, et quand retentit la sonnerie de 16h00, je sens des papillons dans mon ventre. J'envoie un sms à ma mère:
"- Je finis à 18h00 au final, ça sera comme ça toutes les semaines. Bisous à vous 2.
- Ma pauvre chérie, je ne t'en voudrai pas si tu ne fais pas tes devoirs alors. Xoxo"
Je souris. J'ai une maman géniale, je ne devrais pas lui mentir. Mais je m'en sens obligée. Maintenant que je l'ai vu, je mettrais fin à ma vie si j'apprenais que je ne pouvais plus le voir.
J'attends longtemps à l'arrêt de bus, quand soudain une troupe de mecs habillés de noir avec des tatouages aux poignets, des piercings aux oreilles et des boots de moto arrivent devant moi. Ils sont cinq, et ils ressemblent à la description que Diane m'avait donné sur ceux qui l'ont menacée. L'un d'eux est carrément beau, un grand brun avec les cheveux en batailles et des yeux noirs. Je le fixe un moment. Il ne peut pas m'agresser devant tout le... Il n'y a plus personne devant le lycée. Mon cœur se met alors à palpiter, j'ai soudainement froid et je tremble.
- Qu'est-ce que tu as à me regarder comme ça ?
- Rien, j'attends quelqu'un.
Ils se dévisagent tous et commencent à ricaner.
- C'est elle ! Pouah mais qu'est-ce que c'est que ce cul béni ! Il nous fait quoi le Justin ?!
Un petit blond avec l'air terriblement malsain me reluque de haut en bas. Je sens que je vais passer un très mauvais moment, quand soudain les têtes de deux d'entre eux se cognent, et je vois apparaître Justin. Il me regarde furtivement puis continue son affaire, finissant par tous les mettre par terre avec une immense agilité. Il met ses bras autour de moi, ce qui me réchauffe en un instant, puis m'aide à me lever. Il me regarde avec un regard doux et compréhensif.
- Est-ce que ça va ? Ils ne t'ont pas touchée ?
- Non non, mais j'ai eu tellement peur.
Il me serre dans ses bras et je pleure sur son épaule. Il me lâche doucement, puis se retourne vers eux.
- Les mecs, vous êtes malades, allez-vous en, vous lui avez fait peur.
Le grand brun se relève et dit avec l'air mesquin :
- Ça va, on rigole, elle a pas d'humour ta copine.
Je suis énervée. Pourquoi sont-ils là ? Je voulais être seule avec Justin, enfin non, mais... pas avec eux !
Justin me regarde, il voit que je suis consternée. Il a l'air honteux, alors il leur dit :
- C'est juste une amie. Je voulais juste passer un moment sympa avec une amie, et vous vous venez et vous faites mauvaise impression. Le gars, vous m'empêchez vraiment d'avoir une vie normale, vous me répugnez. Allez vous faire foutre. Je n'ai pas peir que vous me fassiez du mal, vous n'avez aucune force, autant physique que morale. Laissez-moi, je ne veux plus vous voir.
Les cinq fantastiques le regardent avec des airs de chiens battus. J'ai presque pitié pour eux. Le brun reprend :
- On est vraiment désolés, Justin, on voulait pas lui faire peur, on recommencera pas, on sera sages et gentils.
Justin le regarde, je vois ses pupilles se dilater encore une fois.
- Non mais vous vous êtes regardé !? Malfrats ! Allez-vous en tout de suite, vous n'avez rien à faire ici !
Les chiens battus détallent. Je décide de me faire entendre. Je fronce les sourcils.
- Mais c'était qui ? Tu ne te rends pas compte ! Je n'ai jamais eu aussi peur !
- Peur de quoi ?
- Peur d'eux !
- Tu as cru qu'il allait t'arriver quelque chose ?
- Oui.
- Tu as cru qu'il allait t'arriver quoi ?
- J'ai cru qu'ils allaient me... enfin... me violer.
- Je ne laisserais aucun garçon poser la main sur toi Abigaëlle, je te le promets.
Cette phrase me fait chaud au cœur, mais je ne me laisse pas amadouer.
- Merci, ça va. J'ai déjà mon petit ami pour remplir ce rôle.
Ses yeux redeviennent aussi noirs que ce matin.
- Ton petit copain n'est pas là. Tu peux crier son nom, il ne t'entendra pas.
- Qu'est-ce que tu en sais ?
- Je ne suis pas idiot.
Je remarque qu'il parle de façon soutenue, et je trouve ça vraiment drôle et mignon.
- Je pensais que tu étais idiot, autant pour moi.
Il sourit, laisse apparaître ses dents blanches et me prend la tête entre ses mains pour la caler sous son bras. Il me taquine.
- Ah ah ! Lâche-moi, c'est bon, tu n'es pas idiot !
- Ok, je te lâche alors. Tu sais, je t'aurais bien tenue plus longtemps.
Je suis très embarrassée.
- Oh, désolée. Merci de m'avoir protégée Justin.
- De rien. Je serai toujours là. Maintenant, faisons connaissance.
- Je commence. Où es-tu né ?
- Ici.
- Tu as grandi ici aussi ?
- Oui, dans une grande maison, avec ma mère.
Tilt. Je fais le lien avec ma maison, où une femme aurait vécue avec son fils.
- J'ai emmenagé dans une grande maison. Une femme y vivait avec son fils.
Justin se met à marcher très rapidement puis à tourner en rond, il donne un coup de poing vraiment fort dans la paume de sa main.
- Merde ! Merde ! Putain, Abigaëlle !
- Quoi, quoi ?

AbbyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant