L'échappatoire

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La neige tombe, le silence est absolu. On ne peut entendre que le vent qui circule entre les branches des arbres nus, dévêtus par l'hiver froid qui domine maintenant les lieux. La poudre blanche est parfaitement répandue sur le sol et recouvre les feuilles tombées à l'automne. Toujours pas un bruit, ou du moins, pas un bruit qui sort de ce cadre naturel. Des battements d'ailes, le cri de la chouette qui annonce le début de la chasse, se font entendre et brisent cet espace calme. Les quelques rayons du soleil qui se couche traversent à peine les arbres, et n'éclairent que trop peu.

Puis, un souffle saccadé. Une multitude de pas qui s'enchaînent plus rapidement les uns que les autres. Affolée, elle jette brièvement un coup d'œil derrière elle : personne. Ses cheveux blonds emmêlés volent au-dessus de ses épaules, et ses bras s'agitent au rythme de sa course. Ses pieds, nus, frissonnent sous le froid de la neige, mais ne prennent cependant pas sa couleur, mais plutôt le brun de la terre humide. Les larmes coulent le long de son visage et viennent atteindre le creux de ses lèvres avec un goût légèrement salé. Ses jambes ne s'arrêtent pas. Les branches sèches et coupantes arrachent sa blouse blanche couverte de pois noirs, seul vêtement qui la recouvre. Sa peau pâle tremble, et sursaute au toucher de quelqu'un qui l'attrape par le bras. Elle se retourne : personne. Alors elle court de plus belle. Quelqu'un l'appelle, une voix grave, une voix d'homme, qui se rapproche de plus en plus, jusqu'à venir lui souffler à l'oreille. Paniquée, apeurée, elle se tourne instinctivement : personne. Elle recule lentement, tout en regardant autour d'elle, lorsque son talon heurte une pierre. Elle perd l'équilibre et tombe en arrière. Ses mains sont égratignées, son visage et ses jambes couverts d'hématomes plus ou moins récents. Elle se relève avec difficulté et recommence à courir, cette fois en espérant trouver une destination à sa fuite. Des dizaines de personnes apparaissent, puis disparaissent aussitôt derrière les arbres. Les mains devant les yeux, espérant échapper à ce cauchemar, elle s'aperçoit d'un coup que le sol a changé. Il est plus plat, régulier, granuleux et moins froid. Elle s'arrête, ouvre les yeux, et voit la route déserte qui coupe la forêt. Ses muscles ne peuvent plus la porter et deviennent aussi fragiles que du coton avant qu'elle ne s'écroule au beau milieu du gravier. Sa tête lâche et vient se poser à son tour.

Soudain, elle aperçoit une lumière, blanche et vive, terriblement attirante. Sa fatigue ne se fait plus ressentir, elle trouve la force de se lever.

Et une seconde lumière apparaît, à côté de la première, et elles semblent se rapprocher de la jeune femme qui s'avance elle aussi. Puis un bruit sourd vient l'obliger à se plaquer les mains contre les oreilles, et encore un autre différent, et un choc violent l'atteint.

Un silence. Complet cette fois. Un silence de paix qui est là pour l'éternité. Allongée, elle ferme les yeux. Un liquide au goût métallique vient lui chatouiller la langue, le même que celui qui l'entoure maintenant et colore ses cheveux, toujours emmêlés, mais immobiles.

Une voiture est arrêtée à quelques mètres. Son regard se tourne une dernière fois vers le ciel. Un ciel qui s'assombrit d'un bleu nuit. Le soleil descend vers l'horizon peu à peu, jusqu'à ce qu'il ne s'efface. Le dernier soleil de sa vie.

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Hey ! Comme vous l'avez peut-être remarqué, j'ai ajouté cette nouvelle dans ce recueil alors qu'elle fait déjà parti de mes histoires. Je voulais simplement commencer cette oeuvre avec la toute première nouvelle que j'ai écrite. J'espère qu'elle vous aura plu.

A bientôt pour une prochaine histoire !

Par-delà les apparencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant