Une feuille, dans un carnet.

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Une larme roule le long de ma joue, elle dessine un chemin sinueux sur ma peau, comme un enfant qui grave dans le sable.
Le vent me gifle et s'engouffre dans mes pores, faisant voler mes cheveux dénoués et martelant mes vêtements à petites bourrasques régulières.
Ma montre tique et taque, chaque seconde s'envolant dans les méandres du passé, le temps file et défile sous mes yeux tel le linceul de Pénélope pour son aïeul.
Mes doigts gelés s'agrippent comme des condamnés à mes manches en laine, et mon manteau vert s'ouvre et se referme, laissant mon pull claquer contre ma peau froide.
Chaque minute qui passe est pour moi l'attente la plus douloureuse, la hâte ne peut m'empêcher de souffrir intérieurement.

Puis, au loin, une silhouette se dessine, ses traits deviennent nets, et malgré la foule je devine son visage.
Un visage d'ange, doté d'un esprit vif et rigoureux.
Des cheveux blonds en bataille, refusant éternellement de se soumettre à une coiffure quelconque.
Un sourire idiot s'imprime sur mon visage.
C'est dingue comme lorsqu'on aime on est niais, l'amour rend aveugle ET niais.

Et puis, je crois qu'il m'a aperçue, et l'instant d'une seconde un voile de satisfaction est passé sur son visage.

J'ai couru, un peu. Lui aussi, il me semble.
Le vent faisait voler mes cheveux derrière moi, comme dans les films hollywoodien, enfin, je l'imagine.

Et puis il a arrêté de courir, j'ai fait de même, je pense que nous ne voulions pas que notre première rencontre si je puis dire soit aussi clichée, et puis quoi, nous n'allions pas nous embrasser langoureusement non plus. Même si ce fut la seule chose qui me passait par l'esprit à cet instant précis.

Il a marché quelques mètres encore, afin de n'être qu'à plus que quelques centimètres de moi, et il a murmuré "Luna", avant de me prendre la main avec douceur.

"- Je savais que c'était toi".

Quel enjoliveur.

"- Prend moi pour une quiche.
- Non vraiment, j'ai fais le compte, je t'assure, Mathilde ne parlait pas tellement que ça à Lila, Sophie n'a pas de casier, Dalia, c'est à peine si elle connait mon prénom, et enfin, Amélie, la seule qui aurait pu correspondre, elle n'aurait pas eu la douceur d'âme pour écrire de si belles choses et le courage n'en parlons pas.
Luna, si je peut me permettre, tu une des personne la plus magnifique qu'il m'a été offert de rencontrer, tu es si intelligente, sensible, et adorable, et pour couronner le tout tu es belle.
- Ah parce que si j'avais été laide, cela aurait changé quelque chose?
- Non absolument pas, ce n'est pas du tout ce que je voulais dire, simplement, tu es une personne extraordinaire et tu m'as fait grandir et mûrir grâce à ces échanges.
- Arrête avec tes déclarations à deux balles, c'est touchant mais j'ai mis du temps à me maquiller alors je ne veux pas que tu ruines tout en trois phrases."

J'ai logé ma tête dans son cou, et lui sa main dans le creux de mes reins et nous avons marché, là où le vent nous emportait.

On a discuté tous les deux, longtemps, et on s'est un peu embrassés, peut-être, et puis on a un peu bu, beaucoup peut-être, et puis on a discuté, on est allés voir la bande avec qui j'habite.
Ça s'est terminé en soirée, et on s'est couchés vers six heure, enfin peut-être, je ne suis pas certaine de m'être vraiment couchée.
Mais j'ai la certitude que ce fut la plus belle journée de ma vie.

Luna.

Lettres à MilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant