Chapitre 11 - Passé

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PDV DE GABY

J'ai froid. On est la veille d'Halloween. La veille de mon anniv'. Ce 30 octobre pince rudement et mon manteau beige n'est pas assez épais. Je marche d'un pas rapide.

J'aimerais arriver avant le lever du jour parce que je ne sais pas à quelle heure il va pointer le bout de son nez. Alors que je me dépêche, je suis bousculée par une grande masse sombre.

Il me rattrape in extremis. Je lève les yeux sur le garçon. Et on reste la un instant. Je me blottis contre lui. Les larmes commencent a venir mais je me retiens.

Il me rend mon étreinte.

Lui : Qu'est-ce que tu fous là ?
Moi : Je te cherchais.
Lui : Tu es vraiment pas possible.
Moi : Tu te sens bien placé pour me dire ça ?

Il se met a rire et à me bercer doucement. Puis il se dégage et me remet sur pied.

Lui : Ca va?
Moi : Oui.

Et mon oui était sincère. J'allais bien. Non pas que l'angoisse était retombé. Ni le malaise d'ailleurs mais je me sentais bien. J'étais contente de retrouver des bras où me blottir et un ami qui pouvait me réconforter.

Il n'a rien rajouté de plus et on a longtemps marché vers la tombe.
Il s'est accroupi devant. Tête baissée. Et je suis restée derrière silencieuse. Debout. Les mains jointes.

Enfin au bout d'un moment il s'est relevé m'a regardé, et m'a tristement sourit.

Moi : Où tu étais passé ?

Il me regarde penaud, me prend soudain la main, me la serre fort et il prend cette mine pincée. Cette mine qu'il fait quand il sait qu'il va dire quelque chose qu'il n'a pas envie de dire, qu'il n'a pas envie d'avouer. On a toute cette tête là, quand quelque chose nous tracasse quand on a fait une bêtise et qu'on doit dire cette bêtise. C'était la tête qu'il avait.
Et quand il relève les yeux vers moi. Je comprends. Je comprends qu'il me le dira contre son gré pour ne pas m'énerver ou qu'il me mentira parce qu'il n'a pas envie de me le dire.

Lui : J'étais ...
Moi : Je n'ai pas besoin de savoir ne t'en fais pas. Allons y.

Je ne sais pas ce qui m'a pris. Sur le moment je voulais savoir, je voulais qu'il se confie a moi. Mais quelque chose comme un dicton que mon père me répète toujours qui est : "quand on pose des questions on s'expose aux réponses."
Et soudain je n'ai pas eu envie de savoir.

Je marche droit devant regardant de temps en temps le paysage d'automne qui se profile devant moi. Je suis tellement perdue dans mes pensées que je ne remarque pas le geste subtil que fait Logan pour passer ses doigts dans les miens.

Il y a deux chemins qui mènent au RER.

On a pris le second.

L'atmosphère entre nous n'est ni tendu, ni apaisante. Il y a comme quelque chose qui émane de nos mains... Une douce tension. Comme si l'air autour détient de l'électricité. Pourtant il ne me serre pas fort. Il est juste là.

Lui : Derek.

Moi : Oui j'ai lu.

Il se tourne subitement vers moi et m'enlace fort posant sa tête sur mon épaule.

Lui : On était jeune et con. On habitait dans le fin fond du 93, à l'époque. Lui, il était orphelin et avait été recueilli par une famille d'accueil. Sauf que comme dans quasi toutes les familles d'accueil les parents sont débordés et les gosses qu'ils recueillent des problèmes ambulants. Derek était timide. Il parlait rarement. Son but c'était de se faire oublier auprès de l'aîné, Pierrick. Disparaître. Parce que cet enfoiré le frappait en permanence. Et que Derek ne disait rien. Pourtant un jour, on marchait, on était ensemble. Et on l'a vu. Il dealait. On s'est caché mais il nous a vu. On reconnaissait tous les mecs, ils étaient dans le quartier. On avait repéré tout le monde. Et Pierrick le savait. Cet enculé ...

Logan fait soudain une pause dans son récit. Il serre les poings jusqu'à que ses phalanges soient blanches. Je lui caresse doucement la main. Il me regarde comme apaisé et reconnaissant. Et il reprend.

Lui : Pierrick ne nous a pas dénoncé au gang. Il est venu nous menacer. Surtout Derek. Je n'en pouvais plus de le voir se faire massacrer sans en parler. Ses parents pensaient que c'était des voyous, que Derek en était peut-être un. Rien ne prouvait le contraire. Après tout, il se taisait. Et m'interdisait de parler. Parce que crois-moi que si j'avais pu, je l'aurais fait !

Son regard devient fou. Il est rongé par la culpabilité. Je ne savais pas tout ce qu'il a enduré et traversé. Ma vie me semble dérisoire et simple à côté de la sienne. Alors que je suis perdue dans mes pensées, il plonge son regard dans le mien. Je suis terrassée par ses yeux noisettes. La tristesse qui s'en dégage et surtout les remords qui percent dans sa voix me font trembler.

Lui : J'ai fini par craquer quand j'ai appris que ce fou l'avait envoyé à l'hosto. J'ai croisé ses parents dans le couloir et j'ai tout raconté. Et devine quoi ? Il ne m'ont pas cru. Quoi leur grand fiston adoré, leur Pierrot ! Je délirais pour eux c'est sûr. Le lendemain j'ai reçu la visite des policiers. Mon père m'a cassé la gueule quand il sont partis mais ça c'est une autre histoire. Donc ils étaient venus m'interroger persuadé que je trempais dans un truc pas net avec Derek. Et j'ai fini par leur donner tous les noms. Et à tout leur raconter. La plus grosse erreur de ma vie. Le lendemain de la sortie de l'hôpital de Derek ils l'ont retrouvé mort. Et moi j'ai fuis la ville pour me retrouver chez ma mère. A l'autre bout de Paris. Ils m'ont jamais retrouvé. Je ne viens ici qu'une fois par an à la même date. Et je fais tout pour m'éclipser vite. Parce que bien sûr les coupables n'ont jamais été mis derrière les barreaux. 

Puis comme s'il voulait vraiment tourner la page, il m'attrape la main et me ramène au métro le plus proche. Alors que je pense que notre escapade est fini il me lance.

Lui : Bastille ou Opéra pour le déjeuner ?

Moi : Bastille, je réponds sans hésiter trop heureuse qu'il ait encore envie de ma compagnie.

Le 11ème c'est un quartier chouette dans le fond même si en vrai on ne le remarque pas toujours, c'est un quartier de transition avec une grosse césure entre les bobos et la classe moyenne inférieure. Malheureusement le prix de l'immobilier flambe en ce moment et le 11ème devient peu à peu un quartier de « riches ». Mais Opéra c'est pire. Alors Bastille c'est très bien.

~Fin du chapitre 11~

NA : Je clos l'épisode Logan, pour l'instant. Oui je sais ça fait longtemps. J'espère que ce n'est pas trop long en informations j'ai hâte de passer la suite !

Merci d'avoir lu jusqu'ici ! ^^

<Akahime>

Une année pour tout changer - EN PAUSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant