Et si... ?

Gaston

Je lève la main pour saluer le tavernier et tourne les talons. Les portes battantes se balancent quelques instants derrière moi. Je laisse des traces profondes sur mon chemin, saleté de boue !

Arrivé devant chez moi, je vois la porte au sol. C'est vrai, elle est cassée. Je la soulève et la pose contre le mur extérieur de la maison. Je pénètre ensuite à l'intérieur. Une violente quinte de toux me prend. Une poussière opaque m'empêche d'y voir clair, d'ailleurs mes yeux me piquent. Des morceaux d'assiettes sont répandus sur le sol. Je sais que c'est LeFou qui a fait ce carnage ! J'avance doucement et sens quelque chose sous mes pieds, je me baisse pour le ramasser et le lâche aussitôt. Un balai ! LeFou a cru que j'allais m'abaisser à faire le ménage ? C'est un travail de femme !

- LeFou ! Viens ici !

Il n'est nulle part, je l'aurais entendu trembler bruyamment. Une pensée me vient pour Belle. J'espère qu'il ne lui a rien fait, ce serait dommage qu'elle soit endommagée avant mon mariage !

- LeFou ?

Je monte les marches en quelques pas et attrape la poignée de la porte. Elle est fermée. Tant mieux, cela signifie que mon invitée est toujours là. Je respire. J'aimerais vérifier sa présence mais la clef n'est plus sur la serrure. Encore LeFou, je présume ! Il va le payer très cher !

Je sors en trombe de la maison, à la recherche du coupable. Je regarde dans chaque boutique, scrutant à travers les vitres, entre les étagères, derrière les meubles, en vain.

Au niveau de la fontaine, les Triplées sont assises, brossant leurs cheveux. Je m'approche rapidement d'elles.

- Je cherche...

Elles me coupent.

- Si c'est Belle que tu cherches...

- ... Elle est partie ...

- ... Car elle ne t'aime pas !

- Quoi ? Je ne vois pas de quoi vous parlez, Belle est chez moi et nous nous marierons dans la semaine ! Je cherche LeFou !

- Elle nous a tout raconté...

- ... Elle ne t'aime pas...

- ... Et te conseille de nous épouser !

Elles tendent toutes la main en avant, battant des cils exagérément.

- Je n'ai que faire de vos niaiseries, Belle est chez moi et je l'épouserai ! Maintenant, dites-moi où est parti LeFou ?

Elles se regardent entre elles, se sourient, puis montrent toutes des directions différentes de leurs mains.

- Il est parti par ici...

- ... Ou dans cette direction...

- ... Ou par là !

Elles m'avancent bien ! Je continue dans la même direction, énervé. Mes bras se balancent rageusement, LeFou a de plus en plus des raisons de se cacher !

Un jeune homme sort d'une étable.

- Hé, toi !

Il me voit et une lueur de frayeur passe dans ses yeux.

- Ce n'est pas toi qui t'es enfui l'autre soir ?

- M-moi ? Il doit y av-voir une erreur Gaston, j-jamais je ne ferai ça !

- Pourquoi trembles-tu ?

Il ne répond pas, se ratatinant sur lui-même.

- Alors que je combattais avec gloire et... courage, j'ai vu de loin un lâche désertant le château...

- Je ne sais pas qui c'est...

- Pourtant si, tu le sais, il portait les mêmes bottes que toi, c'est donc que tu les lui as volées ?

Je n'ai pas vu les bottes de celui qui fuyait, mais je sais que c'est lui.

- Je... non, enfin oui, ces bottes sont à moi, enfin, je veux dire...

Je l'attire dans une ruelle sombre...