Bien après,
Mon smartphone encore à la main, je terminai de noter les quelques renseignements que l'on m'avait fournis. Je remerciai l'homme au bout du fil lorsque je posai mon stylo et raccrochai. Satisfait de ma démarche, je me levai de la table et alla déranger Antoine. Ce dernier était occupé à dormir dans sa chambre... à quatorze heures de l'après-midi. Bien décidé à lui faire retrouver un minimum de foi en son avenir, j'avais également pris l'initiative de ne plus faire attention aux multitudes d'excuses qu'il arrivait à m'inventer.
Sa chambre était plongée dans le noir total. Je jetai un œil vers les volets, ceux-ci parvenaient d'une façon miraculeuse à filtrer le moindre rayon lumineux. On devinait grâce à - ou plutôt, à cause - cette pièce que le rangement était loin d'être son domaine de prédilection. Quelques vêtements avait été jetés à travers la pièce et rabattus dans ses coins, une impressionnante collection de tout un tas d'objet divers était disposée à même le sol. Et enfin, une pile de livres épais traitant pour la plupart de géographie avaient été empilés pour servir de table de nuit. Savant parfaitement qu'il ferait tout pour rester dans son petit nid douillet, je m'approchai de la fenêtre. D'abord d'un geste lent, j'ouvris les portes vitrées en pivotant la poignée. Antoine respirait toujours profondément, et ne semblait pas vouloir se tirer des bras de Morphée. Je souris.
D'un coup, et avec un grincement qui se valait horrible, j'écartai les volets et laissai pénétrer la lumière librement. Antoine fut secoué d'un sursaut violent et se redressa, les yeux écarquillés. Il me lança un regard noir.
« Espèce de con ! tu m'as fait peur !
- Réveille-toi, il est quatorze heures passées.
- T'étais pas obligé de faire tout ce boucan !
- Oh, au contraire, fis-je en souriant, tiens. C'est pour toi, je t'ai pris un rendez-vous à quinze heures, tu ferais mieux de te dépêcher.
- Q-Quoi ? » marmonna-t-il d'une voix râleuse.Je lui passai un morceau de papier sur lequel quelques notes apparaissaient. Antoine se frotta les yeux avec sa paume en soupirant avant de lire lentement mais avec une attention passable ce que j'y avais inscrit. Il remarqua un nom :
« C'est qui ça, docteur Bonnaut ?, me demanda-t-il.
- Le psychologue qui va te prendre en charge.
- Comment ça un psy, j'veux pas voir de psy moi. Pourquoi t'as fait ça ?
- Regarde-toi, fis-je simplement, tu tiens franchement à rester toute ta vie comme ça ? On dirait une larve.
- La larve, elle t'emmerde. »Et le blond retourna se calfeutrer sous son épaisse couverture gris sombre, assez remontée pour que je ne distingue plus sa tête.
« Tu es vexé ?, ris-je.
- Non, j'ai seulement envie de dormir, protesta-t-il.
- J'ai jamais vu un homme ayant besoin d'autant de sommeil... Allez, sors, fais quelque chose !
- Et pourquoi t'es là, toi ? Tu devrais pas être au taf ?
- On est dimanche.
- Et merde. »Il se releva finalement de son lit. Enfin, de sa couverture. Il remarqua la fenêtre que j'avais laissé grande ouverte.
« Ferme ça tout de suite ! tu veux réchauffer tout le quartier ?
- Techniquement, c'est mon chauffage : je fais ce que je veux.
- T'as gagné, j'irai chez ton psy. Là, t'es content ? Je peux m'habiller tranquille ? »J'acquiesçai, plus satisfait que jamais. Je sortis de la chambre.
Peu de temps après, il revint dans le salon, entièrement préparé. Il s'était vêtu d'une manière simple et passe-partout. Ses cheveux mi-longs étaient désormais lavés et coiffés, presque brillants et il avait rasé sa barbe de près, mais ne l'avait néanmoins pas entièrement éliminée. Il avait bien meilleure allure ainsi. Je frappai mes mains l'une contre l'autre et me leva de ma chaise.
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Clichés.
Short StoryBasil, un jeune Anglais expatrié va faire la connaissance d'Antoine, un Français en dépression à peine plus âgé que lui. Le britannique va alors découvrir que celui-ci est bien plus surprenant qu'il ne le laisse paraître...