Chapitre 12

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Le lundi matin, les élèves les plus âgés de la maison Serpentard commencèrent leur journée en rassurant leurs plus jeunes camarades, dont certains étaient tout bonnement terrorisés à l'idée de se rendre dans la Grande salle. De toute évidence, la violence psychologique pouvait parfois faire autant de ravages que la violence physique, et cela, les autres maisons l'avaient utilisés à merveille.

Drago, qui, pour une fois, ne s'était pas levé aux aurores pour échapper au petit-déjeuner en compagnie de ses amis, se tenait debout dans un coin de la salle commune, l'expression fermée, si bien que personne n'avait tenté de l'approcher. Le regard vide, le visage pâle et les joues creusés par la fatigue et l'angoisse, il était encore plus effrayant qu'à son habitude, et même certains Serpentard le regardaient avec un soupçon de crainte dans les yeux. Sûrement parce que tout le monde savait qu'il était le fils du déchu bras droit du Seigneur des Ténèbres, la progéniture d'un Mangemort aussi fanatique que sanguinaire, et forcément, cela ne lui faisait pas une bonne publicité.

Et quand il voyait tous ces gamins de onze ou douze ans, pétrifiés par la peur des insultes et des menaces qu'ils étaient susceptibles de recevoir en mettant un pied en dehors de la salle commune, tout en sachant pertinemment que c'était lui qui avait causé ce désastre, il avait envie de vomir. S'il y avait bien quelque chose qu'il avait toujours respecté, c'était l'unité de sa maison, et ce code d'honneur tacite selon lequel les Serpentard se serraient les coudes et se protégeaient, quoi qu'il arrive. Et voilà que par sa faute, tous ses camarades se retrouvaient accusés d'un crime qu'il était le seul à avoir commis.

Blaise s'était même battu, bon sang. Tous persuadés qu'ils étaient de défendre l'honneur de leur maison innocente, tous sûrs et certains que l'attaque ne venaient pas de l'un d'entre eux. S'ils avaient su, ses meilleurs amis, qui pointaient avec agacement la « stupidité » de leurs camarades qui pensaient que l'agression de Katie était le fait d'un Serpentard, qu'il était le coupable. Lui, en qui ils avaient toujours eu une confiance totale.

Il essayait bien se convaincre que la cause du Seigneur des ténèbres était ou serait bientôt, par définition, leur cause à tous, histoire de calmer la brûlure de la culpabilité dans sa poitrine, mais il ne pouvait se départir de cette impression détestable qui lui collait à la peau : celle d'être en train de les trahir.

Quand il était seul dans la Salle sur demande, il réussissait à oublier cette sensation, mais là, à regarder les visages angoissés des 1ère années, l'expression douce de Daphné consolant les plus jeunes, ou encore l'air sombre de Théo, qui devait certainement être révolté par la situation, il se sentait comme un traitre.

Il continua de se sentir ainsi quand ils sortirent dans le couloir pour se rendre dans la Grande salle, et ce sentiment ne le quitta pas quand il s'assit à la table des Serpentard en face de Goyle. Il faisait tout pour que ses amis ne lui adressent pas la parole, mais cela ne lui demandait de toute façon presque aucun effort : de toute évidence, ils avaient tous bien mieux à faire que de se préoccuper de lui, désormais. A les regarder, Drago avait l'impression de n'avoir jamais été l'un des leurs.

Ils étaient devenus tellement différents, depuis ce jour de juillet où ils s'étaient retrouvés chez Pansy, et avaient ri durant de longues heures sous le ciel bleu. A l'époque, il avait encore l'illusion que tout allait bien se passer, galvanisé par la chaleur des rayons du soleil et la force que lui procuraient ses amis autour de lui. Il ne l'aurait jamais avoué, mais toute sa vie, c'était eux qui l'avaient fait tenir, qui lui avait permis de goûter à la joie et à la liberté dans un monde qui souhaitait le voir impassible et enchainé. Eux qui avaient été l'origine de ses plus grandes joies et les pansements de toutes ses peines.

Mais à présent, plus prisonnier que jamais de la cage dorée dans laquelle il était né, tout avait changé, et il était seul pour faire face au cyclone destructeur dans lequel il était pris au piège.

Mais au fond rien n'a de sens.Where stories live. Discover now