Chapitre 8

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-          La vache elle est tellement sexy... Reprit Framal, au cas où je n'aurais pas compris la première fois.

-          C'est la gogo danseuse, dis-je en gardant mes yeux fixés sur elle.

-          Jure ?!

-          Comment tu peux ne pas la reconnaître ?!

-          On croise tellement de meufs, comment veux-tu que je la reconnaisse ? Faut croire qu'elle ne nous a pas marqués comme elle t'a marqué, me rétorqua-t-il en me faisant un clin d'œil.


Je préférai ne pas relever sa remarque sortie sur un ton sarcastique.
Je me contentai de jouer avec le gobelet en plastique, le faisant tourner avec mes doigts, mes yeux rivés sur cet être qui m'hypnotisait bien trop.

Peut-être étaient-ce les jeux de lumières qui rendaient d'un coup l'ambiance de la boite glauque. Tout ce que je savais, c'est qu'elle paraissait aussi glauque que la boite, à cet instant précis. A croire qu'elle se métamorphosait suivant chaque ambiance, chaque endroit où elle se trouvait. Cette fille était un vrai caméléon.

Tous les hommes présents la regardaient comme si elle était un simple plat appétissant. Ils hurlaient et faisaient des gestes obscènes pour attirer son attention. Cette ambiance me répugnait de plus en plus. Je la vis lancer des regards haineux envers certains, ceux qui étaient les plus entreprenants. Si son regard avait pu tuer, tous les hommes présents auraient été morts sur le coup. Seulement, personne ne se rendait compte de cela, aucun d'entre eux ne voyait qu'elle était mal et honteuse de se trémousser devant eux. Personne ne comprenait qu'elle avait honte de se faire dévisager et de refléter une image aussi dégradante.

Comment une femme aussi classe et charismatique pouvait se transformer, le temps d'une soirée, en une poupée de luxe, inspirant de la vulgarité et des vices douteux ?

J'étais clairement mal-à-l'aise pour elle. La voir comme ça, répugnée et malheureuse, me gênait comme la première fois que je l'ai vu danser.

Malgré ça, qu'elle fut dans ce costume presque obscène à une heure du matin ou dans son jean et son pull Nike en plein après-midi, l'aura qu'elle dégageait restait époustouflant. Une femme réellement belle reste magnifique, quel que soit le rôle qu'elle endosse ou le costume qu'elle porte et qui la définit vraiment ou non.

J'aurais voulu m'avancer jusqu'à la petite scène, lui prendre la main et la faire descendre de là. J'aurais voulu lui donner ma parka et l'emmener dehors puis plus loin. Tenter de lui faire oublier cette soirée et toutes les autres. Lui donner une chance de se couper de ce monde, l'espace d'une simple nuit.

Je la regardai en me sentant impuissant. Pourquoi me sentais-je aussi concerné ? Pourquoi ressentais-je son mal-être comme s'il était en moi ? Comme si je souffrais autant qu'elle. Et pourquoi avais-je l'air d'être le seul à m'en rendre compte ?


-          Il faut croire que c'est une gogo de renom, pour faire l'ouverture d'une boite aussi huppée ! Je tournai ma tête vers Framal et fronçai les sourcils, irrité par sa manière d'aborder la chose. En même temps, on voit qu'elle a des ressources !

-          T'es sérieux de dire ça ?

-          Bah quoi ? Répondit-il en haussant les épaules, son regard toujours porté sur elle. Déjà pour ton anniversaire elle envoyait du lourd ! J'ai bien fait de la choisir elle, j'hésitais avec une autre en plus...


A cet instant précis, j'avais envie de le frapper mais je ne fis rien, je ne le regardai même pas. Je me contentai de garder mes yeux fixés sur elle et je contractai ma mâchoire lorsque nos regards se croisèrent. Ses yeux me criaient à l'aide tandis que son corps tentait de garder le contrôle. Elle se tint un peu plus droite et continua de bouger le temps d'une autre chanson. Puis elle sortit de la scène sous les sifflements et certains commentaires déplacés de quelques uns. Allait-elle revenir ou bien sortir par la porte de derrière ? Je n'osai pas la suivre ni aller prendre l'air pour tenter de la croiser. Je n'osai pas bouger, je gardai mes yeux rivés sur la petite scène désormais déserte, mes dents puissamment serrées et mes mains broyant mon verre en plastique. Comment pouvait-on se déshonorer à ce point ?

J'avais aucune chance Où les histoires vivent. Découvrez maintenant