Chapitre 9

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Tic tac tic tac tic tac

Michel Houellebecq a écrit : « [...] il apparaît que l'individu humain ne peut pas être heureux, qu'il n'est en aucune manière conçu pour le bonheur, et que sa seule destinée possible est de propager le malheur autour de lui en rendant l'existence des autres aussi intolérable que l'est la sienne propre ».

Tic tac tic tac tic tac

Je ne distinguai pas si la lumière qui provenait de l'extérieur était due au jour levé ou aux simples réverbères. Et sincèrement, je m'en foutais pas mal. Je me contentai de fixer le plafond, les mains derrière la tête et l'ouïe titillée par les aiguilles de l'horloge du salon.

Tic tac tic tac tic tac

Les bruits de la ville étaient étouffés par le double vitrage des fenêtres et me donnaient l'impression d'une vie lointaine. Peut-être n'y avait-il, tout simplement, pas de bruit. J'avais la sensation de me confiner dans un isolement néfaste, le silence de l'appartement me provoquant quelques sueurs froides que je ne maîtrisais pas.

Tic tac tic tac tic tac

La vue brouillée par l'épuisement et faussée par l'obscurité de la pièce me donnait une vision fragilisée et une perception négative de ce qui m'entourait. Je clignai plusieurs fois des yeux, en vain. Ils clignotaient à la même allure que les aiguilles de l'horloge, les picotements m'asséchaient les cornées et mes paupières s'alourdissaient. Mon envie de dormir, elle, était inexistante, malgré toute ma fatigue accumulée.

Tic tac tic tac tic tac

Un long soupir rompit la lourdeur de l'atmosphère, dans laquelle je m'étais plongé tout seul. Ma respiration était irrégulière et basse à la fois, se mélangeant à l'air que j'avais de plus en plus de mal à respirer. Le cœur serré, les poumons rétractés, l'œsophage douloureux, la gorge nouée, le corps endolori et la tête à l'envers, je sentis la déconnexion entre mon corps et mon esprit à son point culminant.

La remise en question était fatale.

Tic tac tic tac tic tac

Ma tête menaçait d'exploser tandis que des voix, que je tentais vainement d'étouffer, se jouaient de moi et de ma patience. D'un côté l'ange et de l'autre le démon.

Mon impulsivité m'a encore joué des tours et finirait par causer ma perte. J'avais cette fâcheuse tendance à agir sur un coup de tête par simple envie ou frustration du moment. Et ce qu'il s'était passé avec Elena, la nuit dernière, était un de mes nombreux actes irréfléchis.

Tic tac tic tac tic tac

La culpabilité s'ancrait un peu plus à chaque minute et je me sentais minable. Absolument minable. J'avais toujours eu ce besoin de m'emporter et de me mettre dans des situations pas possibles. J'en arrivais à me demander si je ne faisais pas ça volontairement, par pure addiction à l'adrénaline. Mais quand cette adrénaline redescend, tout le reste suit. Et moi avec.

Tic tac tic tac tic tac

Cette horloge commençait à me rendre fou. J'en arrivais à confondre les battements des aiguilles avec ceux de mon cœur. Les bruits se transformaient petit à petit en un écho criant qui transperçaient ma boite crânienne comme un marteau piqueur rouillé. Je fis machinalement bouger mon pied, comme si ce mouvement me permettait de rester un peu sur terre et de ne pas perdre totalement la tête.

Tic tac tic tac tic tac

Qu'est-ce qui ne tournait pas rond chez moi ? Pourquoi avais-je ce besoin incurable de toujours me mettre dans des situations que je finissais par regretter ? Pourquoi est-ce qu'être raisonnable me faisait tellement peur ?

J'avais aucune chance Où les histoires vivent. Découvrez maintenant