Chapitre 12- "Mon cher papa"

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3 mois 1/2 plus tard...

Kate avait emmenagé chez James depuis assez longtemps déjà, mais elle parvenait pas à s'y habituer. A cette grande et belle maison, mais surtout à James. Chaque fois qu'elle le voyait, une haine profonde l'envahissait. C'était incontrôlable. 

Le ventre de sa mère commeçait à bien s'arrondir. Elle en était presque à son cinquième mois de grossesse. Et Kate désespérait de plus en plus chaque mois, en voyant l'accouchement approcher.

Kate avait réalisé que mal parler à James ne lui apportait que des ennuis, alors elle essayait de lui parler correctement. Peut-être s'adressait-t-elle à lui un peu sèchement, mais elle ne pouvait tout de même pas lui parler amicalement, il s'agissait de James Horton ! Ce dernier lui offrait souvent de petites sucreries, sûrement pour se faire accepter par Kate.

"Le jour où je l'accepterai, pensa Kate avec dégoût, les arbres se mettront à parler !

Kate se saisit de la photo de son père encadrée sur le bureau. Il avait l'air heureux. Il portait un chemisier bleu et tenait une barbe à papa dans la main gauche. Kate se souvenait bien de ce moment. Elle, sa mère et son père étaient partis à la grande foire de Dublin, la capitale irlandaise. Ils s'étaient bien amusés.

Kate lâcha le cadre brusquement. Des larmes glissèrent le long de ses joues. Elle fut alors envahie d'une détresse intense. Son corps fut secoué de soubresauts, ses pleurs redoublèrent. Elle sanglota longuement.

Puis elle sécha ses larmes. Elle avait une idée. Elle allait écrire une lettre. Pour son père. Pour qu'il sache à quelle point elle pensait à lui.


06/02/2016

Chicago, 33 Hamlet's street (adresse inventée)

Destinataire : Papa, au ciel


Mon cher papa,

Tu ne sais pas à quel point tu me manques horriblement. J'en veux terriblement à la mort de t'avoir emporté. Ce n'était pas de ta faute si tu n'avais pas réussi à arrêter la cigarette. Une fois qu'on commence, on ne peut plus s'arrêter. C'est la faute de la mort. 

J'espères que tout se passe bien au ciel pour toi, parce que moi pas du tout. Maman est enceinte d'un homme riche détestable nommé James Horton alors qu'ils ne se connaissaient que depuis deux mois et que je ne le connaissais pas. Tu te rends compte ?! Lorsque vous m'avez fait, avec maman, vous étiez mariés depuis 2 ans. Et c'était votre première fois à tous les deux. Et voilà que maman le fait alors qu'elle le connait que depuis 2 mois ! Je n'aurai jamais cru cela possible. Mais c'est toujours ma maman et je l'aime. C'est à James que j'en veux. Je ne peux pas supporter de le voir une seconde. Et j'habite chez lui depuis trois mois. C'est vraiment dur, papa. 

Au lycée, je vis un enfer. Chaque jour, on m'insulte contre ma rousseur, on me traite de mots obscènes, on me frappe à mort tel un puching-ball... Non, un puching-ball est sûrement mieux traité pour moi. Je me mutile comme personne, avec un compas, un rasoir, un cutter...Je me saoûle presque tous les jours. Je n'aurai jamais osé faire cela autrefois. Mais j'accumule trop les problèmes et il me faut évacuer tout ça, sinon j'explose. J'ai l'impression d'avoir un nuage de poisse noire au-dessus de ma tête. Chaque jour au lycée, une nouvelle humiliation. Chaque jour, mon visage défiguré est recouvert de fond de teint pour ne pas que maman se pose de questions. Chaque jour, je fais bien attention à cacher mes scarifications sous de longs habits. Chaque jour, je me mets trois tonnes de parfum pour ne pas empester l'alcool. 

Papa, tu me manques. Tout serai plus facile si tu étais encore là. Nous n'aurions pas eu besoin de déménager et je n'aurai jamais vécu tout ce calvaire. Je voudrais tant te rejoindre...

Ta fille qui t'aime, Kate Graham.

"CAROTTE"Où les histoires vivent. Découvrez maintenant