La rue la nuit

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Il fait froid. Je suis emmitoufflée dans mon grand menteau noir avec le capuchon rabbattu sur le visage. J'entends le son de mes bottines qui frappent inlassablement les pavés de la rue du Lac, le va et vient des gens au marché de noël. J'accélère la cadence car il fait de plus en plus froid et j'ai la sensation désagréable d'être observée. Je suis seule et je m'inquiète de ne pas recevoir l'appel de maman que j'attends déjà depuis dix minutes.
Comme cette sensation ne me quitte pas, je marche jusqu'au marché de noël en faisant mine de regarder les encens et en surveillant derrière moi pour voir d'où vient ce sentiment, mais rien et je commence à paniquer malgré le joyeux monde du marché.
Le bruit du monde qui parle, celui des artisans et de la musique s'atténue dans ma tête. L'adrénaline monte de plus n plus, les odeurs aussi commencent à se faire moins présentes. Je me sens oppressée. Je veux sortir de cet endroit, prendre l'air, trouver du calme, mais, en même temps, je crains de sortir de ce monde protecteur.
J'ai froid... Une odeur se fait sentir par dessus les autres. Non. Pas eux... Pas encore !!! Je sors du marché et vais m'appuyer contre la muraille du château. Mon monde s'obscurcit... Je secoue la tête pour chasser l'obscurité et je cherche en vain la lumière. C'est alors que je perds le contrôle de moi même... Non... Pas maintenant !
C'est trop tard. Je deviens spectatrice et mon corps fait ce qu'il veut. Je m'entends hurler, pliée en deux, les mains sur les oreilles. Les gens se retournent, s'interrogent du regard. Pendant ce temps, je cesse de hurler et me redresse. J'entends les chuchottements, les grattements, les cris déchirants... Je reste plantée là, à fixer les gens d'un regard vide. Un homme s'approche de moi. Grand, blond, yeux bruns, forte carrure (sûrement un rugby man). Apparemment, c'est le seul assez courageux pour venir me sortir de ma torpeur, assez courageux pour approcher une fille au regard vide.

"- ça va mademoiselle ?
*Ouiiiiiiii ! Aurais-je voulu crier*
-... (À la place, j'émis un grognement étrange. Presque menaçant)
- je vais appeler quelqu'un...
- NOOOOOOOOOOON !!!!!" Hurlèrent toutes les créatures de mon corps.
*Un son atroce* me dis-je.
L'homme pris peur et recula. Il sortit son téléphone et appela quelqu'un. Sûrement les urgences psychiatriques.
Mon corps fut pris de spasmes malsains. Je me tordais en arrière, mes bras on pris des angles improbables et je vis les gens reculer. Le rugby man rangea son téléphone et fonça vers moi. De mon point de vue, j'eu presque peur de le voir arriver sur moi... Peur pour lui... Ces choses peuvent faire ce qu'elles veulent de mon corps.
Au moment où il m'attrapait pour me plaque au sol et remettre mes articulations dans le bon sens, je me retournai vers lui avec une rapidité folle. Je fléchis les genous, la jambe arrière tendue et je résistai au choc. Il essaya de me ceinturer pour me tenir immobile, mais je le griffai au visage et le rouai de coups de genou et de pied.

*au fond de ma tête, là où je suis enfermée, je sanglotais. Je hurlais de désespoire*

Finallement, un autre homme s'est avancé pour l'aider. Grand, cheveux noirs assez longs, ils tombaient un peu devant ses yeux gris, la vingtaine, plus fin que l'autre... Le pauvre...
Il fonça dans mon dos pour me maintenir les bras. En attendant, je me débarrassai de l'autre en l'envoyant valser à trois mètres de moi. je me retournai et essayai de le mordre. Il m'attrappa au cou et me plaqua contre le mur du château. Je lacérais son bras avec mes ongles déjà cassés. Ile me regardais sans flancher et me donna des coups de poing dans le ventre. Je poussai des hurlements bestiaux totalement hideux. Il me laissa tomber à terre. Je me remis debout sans attendre et lui fonçai dessus pour le plaquer au sol et pouvoir atteindre son visage.

*je m'étais recroquevillée dans ma prison, forcée à regarder le spectacle*

L'homme réagis au dernier moment et m'attrapa dans ses bras pour me contrôler avant l'arrivée de la police et des urgences. Ainsi immobilisée, les monstres en moi, se mirent en rage...

*oh mon dieu ! Quel insuportable supplice que de me faire voir ça!*

Mes yeux devinrent entièrement blancs. Je le sais... je me raidi et essayai par tous les moyens de sortir de cette étreinte fatale. J'entendi soudain les sirènes s'approcher. Je redoublai d'efforts. Je griffais, mordais, donnais des coups de pieds et surtout je hurlais d'une voix atrocement démoniaque. Le premier gars rappliqua pour aider l'autre à me maintenir. J'étais alors enfermée, prisonnière, enchaînée.

*je ne sais toujour pas comment le gars noireau à réussi à résister aussi longtemps... *

Ce dernier me chuchotta quelques mots incompréhensibles à l'oreille qui me firent perdre la tête. Mes démons hurlèrent encore plus fort qu'avant, mais cette fois c'est un hurlement de peur plus que de rage. Ma prison mentale vola en éclat et je tombai dans un trou noir, froid, sans fond... Mon corps vide lâcha prise...
Le dernier son que j'entendis fut les sirènes et les voix des gens et des policiers. La dernière chose que je sentis fut une odeur de sang, pas le mien. La dernière chose que je goûtai fut mon sang qui coulait dans ma gorge. La dernière chose que je touchai était une veste grise, tachée de sang.

D'un extrême à l'autreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant