Je le fixai, plus qu'effrayée par ses paroles. Les magnifiques paillettes dorées qui habitaient ses yeux scintillèrent doucement tandis qu'il s'agenouillait devant moi. Ce geste me surprit car un Alpha ne s'abaissait quasiment jamais au niveau d'un autre loup. Je restai immobile, m'attendant à tout et n'importe quoi avec cet homme étrange. Il avança lentement l'une de ses mains vers mon cou, tout en plantant ses yeux qui avaient presque virés au doré dans les miens. Je sentis un grondement monter dans ma gorge. Il le perçut également, hésita quelques secondes, la respiration en suspend. Puis enfouit sa main dans la fourrure argentée de mon cou. Je fus si étonnée par son geste que je le laissai faire. Il me grattait exquisement bien et je lâchai malgré moi un grognement d'assentiment. Un sourire en coin, il continua à me papouiller, tout en m'observant attentivement. Je ne comprenais pas ses agissements. Pourquoi faisait-il cela après m'avoir attaqué ? Mais je ne parvenais pas à réfléchir correctement avec sa main dans ma fourrure. C'était comme si ses gratouilles me ramolissaient entièrement. La tête penchée sur le côté, je baissai toute ma garde. C'était si agréable.
L'homme brisa le silence de la pièce.- Tu aimes ça ma belle ? Me questionna-t-il.
Je fus encore une fois étonnée qu'il m'adresse la parole. Il avait comprit en un temps record que je n'étais pas une louve sauvage, mais une louve-garou. Comment faisait-il ? Je grognai cependant gentillement en signe d'acquiescement.
- Tu sais, je ne te veux pas de mal, continua-t-il d'une voix neutre. Mais j'ai besoin de ton aide.
Il me caressait maintenant derrière les oreilles et je gémis de plaisir tel un petit louveteau. Je n'avais qu'une envie, le laisser me gratouiller pendant des heures. Je n'avais jamais rien senti d'aussi agréable. Je planai littéralement sur un petit nuage. Je m'étais allongée d'une façon des plus naturelle tandis qu'il me papouillait. De l'aide ? Pourquoi ça ? Je ne connaissais rien ni personne.
Alors que l'homme allait continuer son explication, le bruit d'une porte que l'on balançait violemment contre un mur retenti. Je sursautai violemment et me relevai en un instant, la gueule grande ouverte sur mes crocs, la fourrure hérissée.
L'homme se leva vivement, lâcha quelques jurons et s'approcha de la deuxième porte de son bureau, que je n'avais pas remarqué jusqu'ici. Mais il n'eu pas le temps de l'ouvrir que celle si rebondit violemment contre le mur en bois. Un énergumène essoufflé apparut dans l'encadrement de la porte, munit d'une batte de base-ball.- C'est quoi ce délire André ? Qu'est ce que tu fiche ici, avec une batte de base-ball ?! S'énerva l'homme.
Une mine déconfite apparu sur le visage de l'intéressé. Cependant sa batte pendait lentement au bout de son bras et j'eus un mouvement instinctif de recul. De mauvais souvenirs défilaient à une vitesse folle dans mon esprit, mais pas encore assez rapidement pour que je ne les distingue pas. Je grognai hargneusement en secouant la tête pour tenter de les faire disparaître, mais ils refusaient de me laisser. J'entendis de nouveau le bruit des coups qui s'abattaient sans discontinuer sur l'autre corps. Un grondement m'échappa et je m'aperçus que les deux hommes me fixaient, tendus et immobiles.
- Ba... C'est à dire que... finit par bredouiller l'inconnu sans me quitter des yeux. Jay m'a appelé totalement paniqué en me disant que tu te faisais attaquer par un loup et...
- Et ta réaction, c'est de te ramener avec une batte de base-ball ? Tu te fous de moi j'espère ?
- Ba non pas vraiment figure toi...
L'inconnu semblait fondre de stresse comme neige au soleil. S'en était presque comique.
- Nous sommes des putains de loup-garou André, ce terme te dit-il quelque chose ? Demanda l'homme sarcastiquement. Il semblait à bout de nerf et ne faisait même plus attention à moi.
L'inconnu leva les bras en l'air en signe de résignation, mais la seule chose que je vis fut la batte. Je grognai violemment et sautai d'un bond sur l'homme. Celui-ci tomba en arrière, pris de cour, ses bras battant l'air inutilement. La batte frôla ma tête à plusieurs reprises, et je m'énervai de plus en plus, la colère enflant dans ma poitrine. Je n'avais plus aucune logique, je savais seulement que cet homme était mon ennemi, et que je devais détruire cette batte de base-ball. Je mordis le bras de l'inconnu sans aucun scrupule et tentai d'atteindre le morceau de bois au bout de celui-ci. L'homme cria de douleur lorsque mes crocs s'enfoncèrent dans sa peau. Mais il fallait que je la détruise, vite, avant de souffrir encore. Je ne voulais plus jamais ressentir cette douleur. Je grondai vivement lorsque la batte de l'énergumène s'abattit près de moi. L'inconnu tentait de se soustraire à ma prise mais je devais facilement faire le double de son poids humain. L'homme au yeux vert pailletés d'or resta quand à lui stoïque, fixant son acolyte se faire attaquer par un loup, sans bouger le moindre doigts.
- Qu'est ce que tu fous bordel ! Beugla l'énergumène, aide moi !
J'aperçus du coin de l'oeil le visage de l'Alpha se refermer et son regard devenir ombrageux. Les poings crispés, il observa l'inconnu.
- Pardon ? Je crois que j'ai mal entendu, répondit-il en riant faussement. Tu viens de me donner un ordre ou je rêve ? Le ton et l'aura menaçante de l'homme firent pâlir considérablement l'énergumène, dont le visage passa du jaune pisse au blanc cadavérique.
- N... Non... C'...
L'Alpha fit claquer sa langue dans son palais d'un air dédaigneux, interrompant les vaines explications de l'inconnu.
- Bien, commença-t-il dans le silence pesant qui venait tout juste de s'installer.
J'étais moi même incapable de faire un seul bruit, tandis que son magnétisme emplissait toute la pièce au point de m'oppresser.
- Si tu avais arrêté de crier comme une fillette et t'étais un minimum concentré, tu m'aurai entendu te dire de lâcher cette batte de base-ball.
L'inconnu fixa l'objet étonné, comme s'il n'avait pas un loup sur lui, les crocs plantés dans son bras.
- Pourquoi ? interrogea-t-il l'Alpha en relevant la batte.
Je lâchai un grondement féroce en la voyant en suspend au dessus de ma tête. La haine pure m'habitait et je balançai l'objet à l'aide de ma patte. Celui-ci percuta la baie vitrée qui se fissura.
- C'est plutôt claire comme réponse non ? répondit l'Alpha avec un rictus.
Je relachai le pauvre bras de l'inconnu et allai déchiqueter la batte de base-ball en grondant férocement. Plus jamais, plus jamais. La douleur et la haine traversaient mon corps sans discontinuer, les souvenirs devenaient des sensations, des bruits horribles de déchirement. Je sentai mes yeux s'humidifier. Pourtant les loups ne pleurent pas vraiment non ? Le coeur au bord des babines, je donnai un dernier coup de crocs dans le morceaux de bois.
Le silence qui s'ensuivit fut lourd et pesant. Le bureau semblait rapetisser tandis que la pression augmentait. Les deux hommes me fixaient, l'énergumène bouche-bée et l'Alpha avec une lueur sombre dans les yeux.
Mon regard glissa sur la baie vitrée fissurée. Au moment où je ramenai mon corps en arrière, la voix de l'Alpha résonna violemment:- Non ! Elle va sauter !
Mais c'était déjà trop tard.
Je passai au travers de la vitre déjà endommagée et m'enfuis tel un ouragan.
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Sylver
WerewolfSylver, une louve-garou unique abandonnée par ses parents a vécu un enfer beaucoup trop jeune. Mais elle s'est enfuie et a été recueilli par une louve, devenue sa mère. Malheureusement sa douce tranquillité n'aura pas duré longtemps, et ses vieux d...