Chapitre 3 : Le loup de ma fenêtre

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La nuit était tombée sur la petite bourgade de Karantez. Quand soudainement, j'ai entendu d'étrange bruit provenant de dehors qui m'ont réveillé en sursaut. Tout était noir et glacial. Je vis aussitôt, après quelques secondes - afin que mes yeux s'adaptèrent à l'obscurité - que la fenêtre était encore ouverte, pourtant il me semblait l'avoir fermé tantôt dans la journée. Les mystérieux bruits ne cessaient en aucun cas et devenaient de plus en plus sonores. Je me suis dirigée à pas prudents vers la fenêtre. J'ai regardé à droite, à gauche, j'ai scruté la lande qui s'étalait normalement à perte de vue, mais tout était englouti dans la noirceur de la nuit. Les chouettes, les hiboux, les cigales fredonnaient leur éternelle mélodie. Les lucioles scintillaient comme des petites étoiles sur la terre ferme. Puis, mon regard s'est arrêté sur un loup brun au milieu du jardin. Un essaim de petite luciole dansait autour de lui comme des petites étoiles autour du centre d'une galaxie. J'attendis quelques instants pour voir s'il partait, mais il ne bougea pas. Ce loup m'intriguait, alors j'ai décidé de sortir sur la pointe des pieds de ma chambre, de descendre les escaliers et de franchir la porte qui ouvrait sur le jardin pour aller rejoindre l'animal. L'herbe froide et humide chatouillait mes pieds nus à chacun de mes pas. Le loup était toujours là et me regardait avec curiosité. Lentement, je marchais vers lui, mais il n'esquissa aucun mouvement de recule. Le loup ne montrait aucune peur ou crainte vis-à-vis de ma présence. Lorsque je fus arrivée à un peu moins d'un mètre de lui, j'ai arrêté d'avancer et me suis assise sur le sol. Quelques instants, je l'ai​ regardé, puis il s'est trémoussé dans l'herbe humide, se mettant ensuite sur le dos et remuait les pattes vers le ciel, puis il s'est rallongé normalement. Son quart d'heure de folie était donc terminé. Je me suis levée et fis quelques pas supplémentaires vers lui. Il ne bougea toujours pas. La distance qui nous séparait l'un de l'autre se réduisait petit à petit au fur et à mesure de mes tentatives d'approches. Je tendis ma main vers l'animal qui me laissa caresser sa petite tête délicatement. Je craignais de le faire fuir et en même temps j'étais surprise et contente de vivre ce moment unique. Seulement et soudainement, sans que j'en comprenne la cause, il a hurlé à plein poumon. Sa voix retentissait dans toute la lande. Doucement, je recommençais à lui faire d'autres gratouilles sur la tête et il s'y abandonna pendant une agréable petite minute. Quelques petits gloussements de joie et nerveux sortirent de ma gorge. J'étais terrorisée parce que mes parents pouvaient me surprendre ici, mais heureuse d'être en compagnie d'un loup. Cependant, sans aucune raison, il survint des cris en provenance de la maison de mes parents, des cris qui brisèrent aussitôt ce moment de pur bonheur pour me mettre dans un état émotionnel de stress et de panique.

_ Christophe, toi et Gaston vous avez l'imagination fertile, hurla ma mère. Arrêtez de m'importuner avec vos histoires à dormir debout.

_ Mais Pénélope...

_ Je te rappelle que j'ai pris le soin de l'ensorceler moi-même pour qu'elle ne tombe jamais amoureuse...

_ Peut-être, mais ce genre de magie ne fonctionnera plus si elle trouve son âme-sœur. Par ailleurs, je crains que ce Nicolas le soit.

_ Les âmes-sœurs n'ont jamais existé et n'existerontjamais. Gwenn n'est donc pas en danger ici. Nous ne repartirons pas à Paris. Jevais voir si elle est toujours dans sa chambre.

Sur le moment, je n'avais rien compris à ce charabia. Mon regard est revenu de la maison vers le loup. La tristesse et l'incompréhension se lissaient sur les traits de son minois.

_ Reviens quand tu veux le loup, chuchotais-je à son intention. Tu seras toujours le bienvenu.

J'avais l'étrange impression que l'animal comprenait ce que je lui disais, car ses yeux s'étaient soudainement mis à pétiller. Je l'ai embrassé sur le haut du crâne en signe d'au revoir et me suis aussitôt mise à courir vers la maison. L'adrénaline remontait dans mes veines, parcourait mes muscles les uns après les autres et permit à mes mouvements la souplesse et la puissance nécessaire pour courir plus vite avec aisance et escalader la gouttière sans le moindre petit pépin afin de monter sur le toit. Les tuiles d'ardoise étaient mes prises, comme sur un mur d'escalade, pour avancer sur ce toit pentu. J'allais jusqu'au niveau de ma fenêtre et descendis vers l'étage inférieur. L'encadrement de ma fenêtre facilitait la recherche de prises pour poser mes pieds où m'y accrocher à pleines poignets. Une fois que j'ai traversé l'encadrement, j'ai aussitôt fermé la fenêtre ainsi que les rideaux, dans le but de cacher le loup à mes parents, si ces derniers venaient dans ma chambre et auraient eu l'idée d'y observer la lande. J'aurais préféré rester auprès de l'animal que devoir revenir in-extrémiste dans cette maison pour que mes parents n'apprennent pas je défiais leur autorité secrètement. Je me suis dépêchée de revenir dans mon lit et de fermer les yeux pour faire semblant de dormir. Je concentrais mon attention sur les sons environnant. J'entendais la poigné de la porte tourner sur elle-même, ainsi que les pas léger de ma mère sur le sol qui se rapprochaient dangereusement de moi. Puis, elle est revenue sur ses pas comme si de rien était. J'en avais donc conclu qu'elle avait été berné par mon jeu d'actrice. Je suis restée allonger, les yeux fermés, jusqu'à ce que je m'endorme vraiment.

Gwenn et Nico : Les élus, Livre 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant