ℝⅇ¢ųⅇɪℓ ɗ'ʘ$ {ℍⱥɪҡẙʉʉ}

KuroKen: Coquille vide

Kenma

Il se sentait mal, tout son être lui criait d'arrêter, mais impossible, c'était comme si une force invisible le poussait à faire ces choses. Il en était ainsi. Depuis quelques temps il était différent, lui le savait, mais les autres non, il avait l'impression d'être un fantôme, l'ombre de lui-même. Une sorte d'hologramme qui le remplaçait au quotidien.

Il n'avait pas toujours été comme ça, certes, il était un grand timide, mais on l'avait toujours remarqué au bout d'un moment. Il avait toujours eu ce manque de présence en dehors du terrain, mais une personne l'avait toujours remarqué, Kuroo, leur capitaine. Seulement, il ne voulait pas juste être remarqué, il voulait plus, toujours plus, l'avoir pour lui, rien que pour lui, être égoïste pour une fois.

Il l'avait toujours fait, ces choses, ces choses impensables pour toute personne normale. Seulement, il n'était pas normal, alors, pour combler sa tristesse, il se noyait dans les abysses de la mutilation. Personne n'était au courant et personne ne devait l'être. Il lui arrivait de faire ces traces sur ses bras plusieurs fois dans la semaine, pas que cela ne lui fasse plaisir, mais c'était devenu comme une drogue, voir désormais pire, une habitude, et ô combien il était dur de perdre ses habitudes.

Les marques, elles étaient visibles et parsemaient sa peau pâle et immaculée, enfin, avant toutes ces traces. Il y en avait sur les deux avant-bras, mais il n'avait jamais été au-delà, et n'avait jamais voulu le faire, il lui restait un espoir, et cet espoir de s'en sortir se réduirait à néant lorsqu'il commencerait à aller plus loin.

Et c'est donc, souvent, qu'il allait en cours, les bras bandés, cachés derrière un t-shirt à manches longues. Même en été, sous une chaleur étouffante, il ne le retirait jamais, et on lui avait souvent posé des questions auxquelles il avait répondu par un "je suis allergique, c'est pour limiter les risques", et, que ce soit pour son bonheur ou son malheur, personne n'allait plus loin dans ses investigations, croyant et gobant le mensonge.

De plus, il ne mangeait que très peu, et encore une fois, personne ne le remarquait, la faute due au fait qu'il portait tout le temps des vêtements larges qui camouflaient sa maigreur. Son teint, bien que très pâle par le manque de nourriture, avait toujours été de cette teinte, et cela ne choquait presque pas. Les seules choses remarquées étaient en réalité ses cernes qui se trouvaient sous ses yeux aux prunelles de chat. Là dessus, on l'avait très souvent interrogé, et il avait encore esquivé, prétextant un manque de sommeil par les révisions. Gros mensonge, certes, il révisait, voulant réussir, mais il n'était jamais allé au-delà de 22h pour les cours. Il avait juste des conséquences de son début d'anorexie ajoutée à son automutilation.

Kenma en avait marre, marre de voir son corps se transformer petit à petit en cimetière. C'était trop dur, mentalement il était au bord du gouffre. Il avait toujours pensé que ce qu'il se faisait désormais depuis des années était bien pour lui, que ça l'aiderait à oublier. Oublier cette douleur présente chaque jour. Mais ce n'était qu'une chimère, une illusion bien trop grande pour être invisible. Il ne pouvait pas sortir de cet engrenage, il était trop faible, comme emprisonné dans une toile d'araignée. Il était collé, impossible de s'en aller, en tout cas pas sans aide.

Mais Kenma n'avait pas d'aide, il était seul, ceux qui se disaient amis avec lui ne l'étaient que de 8h à 17h. Le seul qui le comprenait réellement était justement celui qui lui faisait sans le savoir, du mal. Il le blessait, le torturait chaque jour sans le voir, comme un aveugle sur qui on braquerait une lumière, il ne voyait rien. Alors le jeune homme aux yeux de chat souffrait, seul, inutile, il souffrait sans que personne ne le remarque.

C'était une véritable torture. Parfois même, dans ses moments de dépression il se demandait qui viendrait à son enterrement si jamais il mourrait. En y pensant des larmes silencieuses coulaient sur ses joues désormais maigres par la faim.