Le cri retentit dans le grenier comme le souffle froid d'une mort proche. Il fut rapidement suivi de la voix de Tara me criant un "mademoiselle" pourtant le cri n'était pas d'elle puisque le sien sonna après. Paul et moi nous regardâmes. Il n'était pas en état de se battre. Alors je corus reprendre mon tison, puis me placer devant lui, brandissant l'objet de mes deux mains, le tenant bien face à moi.
Je sus que les cris de Tara n'étaient pas à tort puisque Jean , dans son justaucorps rouge et tenant une épée à la main, se montra en haut de l'escalier. Il souriait, l'un de ces sourires niais qu'il savait si bien faire mais était tout de même menaçant, très menaçant. Il me faisait peur, pas de la frayeur, de la vraie peur. Une peur profonde . Il se mit à applaudir, accompagné d'un rire ironique, forcé.
-Que c'est émouvant.. Les amants maudits. Je ne pensais pas que tu arriverais a le retrouver, sotte que tu étais ... Mais je t'aimais bien, c'est dommage... maintenant je vais etre obligé de vous tuer tous les deux. Oh... mais c'est que tu as peur pour lui... ne t'inquiètes pas, si tu le souhaite, je te tuerais avant. En plus ça lui fera du mal à lui.
-Lâche.
-Qu'as-tu dit petite idiote? Je crains de ne pas avoir bien entendu.
-j'ai dit: Lâche. Vous osez tuer une femme que vous avez désiré, sans vous battre. Vous avez enlevé votre propre jumeau pour m'avoir, vous m'avez contrainte à me marier avec vous sous la menace de tuer l'homme que j'aime , vous avez menti, frappé, et vous n'éprouvez aucun remords, aucune honte. Alors n'osez pas dire que vous m'aimiez bien, vous m'aimiez d'un amour incontestable, vous étiez habité par la jalousie... Vous, vous me degoûtez, comment avez-vous pu croire un seul instant que c'est ainsi que vous me séduiriez? En séquestrant l'homme que j'aime, en le maltraitant? Alors oui, c'est ce que vous êtes, un lâche. Battez-vous! Ne le soyez pas plus encore que celui que vous êtes maintenant, osez au moins vous battre, prouver le peu , s' il en existe , d'humanité que vous avez en vous. Soyez un homme.
-espèce de garce.Il s' avanca. Il se mit en garde. Je tremblais. Mon tison ne faisait pas le poid face à sa lame affutée, et, avec sa noble éducation, il devait croiser le fer à merveille. À présent c'était sûr, nous allions mourir, l'un après l'autre. Mais au fond, n'était-ce pas mieux? Au moins nous serions ensemble. C'était tout ce qui comptait. Je bataillais, jusqu'au bout. L'étroit corset et le panier de ma jupe me gênaient. Je reculais à chaque pique de mon adversaire. Il me toucha à l'estomac, mais ne fit que déchirer ma robe, mettant à nu mon corset qui me protégea comme une armure. Il attaquait, je feintais. Je ne vivais pas, je survivais. Je n'avais plus la force de survivre. J'avais les pieds douloureux, les jambes engourdies, les bras courbaturés. Voici de longues minutes que je bataillais face à Jean. Je n'avais plus le courage de me battre. Je n'étais plus fatiguée mais epuisée. Je sentais le lourd regard que Paul portait sur moi. Ce regard qui se voulait bienveillant mais qui, en réalité, n'était qu'une envie de venir m'aider. Au moment où je sentais que j'allais lâcher, je tournais la tête vers Paul pour lui signifier mon amour dans ce geste d'abandon désespéré. Je me laissais déstabiliser. Mon tison valsa. Je tombais lourdement au sol. La fin était proche.
Du sang.
Un cri.
Deux cris.
Le mien? Je ne sais pas. Tout ce que je sais c'est que je fermais les yeux pour laisser la mort venir à moi.
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Les Fiancés Du Temps T1
Ficção HistóricaCopyright°* Eléonore de Flavigny, 15 ans, part en pension près de Versailles. Au terminus du bus , elle rencontre une fille de son âge, Hortense de Fablimes, aristocrate vouvoyant tout le monde et ayant pour père un chercheur scientifique travailla...