La lettre.

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Maura courait toujours à en perdre haleine. Elle était sortie de la cité, et zigzaguait entre les arbres. Elle ne regardait pas où elle allait, ni ce qu'elle faisait. Ses pensées étaient bien trop accaparées. Entre rage et chagrin, elle était perdue. Les animaux se retournaient à son passage et la suivaient des yeux. Les habitants des bois n'avaient jamais vu la jeune elfe dans un tel état. Si bien que les animaux étaient eux-même préoccupés pour elle. Sur son passage, elle remuait non seulement les feuilles, mais aussi une rancœur qui lui nouait le ventre. Le réel problème était qu'elle se sentait impuissante. Elle n'en voulait pas à ses parents adoptifs pour lui avoir menti toutes ses années. Elle leur en voulait de lui dire enfin la vérité, alors qu'elle ne pouvait rien faire. C'est bien, désormais, elle connaissait le nom et la race de sa vraie mère. Seulement, Noora était morte. Qu'est-ce qu'elle pouvait y changer ? Comment devait-elle le prendre ? Peut-être aurait-il était mieux qu'elle ne sache rien, qu'elle continue de vivre dans le mensonge. Au moins, elle ne ressentirait pas cette douleur. Oui, c'était égoïste, mais elle pouvait l'être dans sa situation. 

Actuellement, elle devait pleurer une personne qu'elle n'avait jamais connu, mais qui pourtant, aurait du être très importante pour elle. Maura était tourmentée par un deuil qu'elle n'aurait jamais du avoir à faire. Maintenant, elle allait dire adieu à sa mère, alors qu'elle n'avait pas pu lui dire bonjour. C'était injuste, cruel. Elle haïssait ses maudites étoiles pour le destin qu'ils lui faisaient. 

Comme si ces dieux avaient entendu sa colère et voulaient montrer leur désaccord, la jeune elfe, dans sa course folle, s'emmêla les pieds dans sa traîne, et elle trébucha pour tomber au sol. Elle se ramassa de toute sa longueur. Maura ignorant totalement la douleur du choc, se retourna promptement pour se mettre sur le dos, face au ciel, et essoufflée à bout de nerfs, elle hurla, se déchaîna contre sa vie, le tournant qu'elle prenait, et surtout, elle exprimait sa haine pour les dieux qui semblaient l'abandonner à son triste sort. 

Elle se releva, mais eut rapidement un haut le cœur, la tête lui tourna, et elle ne put tenir plus longtemps sur ses jambes. Elle s'écroula à nouveau, jurant mentalement, tout en essayant de reprendre un souffle correct. Jamais elle ne pensait en arriver là. Elle était nostalgique des jours heureux qu'elle avait passé jusqu'à maintenant. Elle se détestait également pour les envies qu'elle pouvait avoir. La brune savait qu'elle ne devrait pas désirer tout oublier des dernières 24 heures. Mais, dans le fond, c'était le cas. Certes, elle aurait vécu dans le dénie, mais elle n'aurait pas eu à souffrir. 

Vidée d'énergie, elle rampa à quatre pattes pour rejoindre un arbre et s'y appuya. Elle sortit la lettre d'une poche de sa robe et la regarda quelques secondes. D'un côté, elle voulait l'ouvrir, elle se devait de savoir ce qu'il s'était passé il y a quinze ans, mais elle craignait d'avoir encore plus mal. Et si elle était déçue en la lisant. Si elle trouvait les raisons de Noora pas assez justifiées et qu'elle se mettait à haïr une défunte. Elle était face à un dilemme. Cependant, Maura se dit que sa mère méritait au moins qu'elle la lise. Apparemment, elle l'avait quittée pour la protéger, Noora avait fait ce sacrifice pour elle. La jeune fille était dans l'obligation d'ouvrir cette lettre. C'est donc ce qu'elle fit. Elle décacheta le sceau en cire rouge, et déplia le papier ambré. En voyant les mots se former, elle remarqua qu'elles avaient la même écriture fine. Étrangement, ce détail la toucha bien plus qu'elle ne l'aurait pensée. 

"- Ma très chère Maura,

Si tu lis ces mots, c'est qu'il m'est arrivée malheur. Je ne sais quel âge tu as, mais je me doute que tu dois être perdue, peut-être en colère. Quand j'ai eu l'idée de te laisser auprès de Blaise et Jasmine, j'étais résolue à ce que tu n'apprennes jamais mon existence. Je savais que ça n'entraînerais que de mauvaises choses. Seulement, je n'ai pu me résoudre à couper tous liens avec toi. C'est pourquoi j'écris cette lettre, que je remettrais à tes nouveaux parents. J'espère et je suis convaincue qu'ils sont bons avec toi. 

D'abord, je voulais sincèrement m'excuser d'avoir fait ce choix qui m'a brisée le cœur. Cependant, je n'en avais pas d'autres. Toute cette histoire a commencé lorsque je suis tombée amoureuse de la mauvaise personne. Ton père était un prince Enchanteur, et moi une simple dresseuse de dragon. Nous nous étions rencontrés à une réunion entre nos deux peuples. Il avait été gentil avec moi dès le début, il a su me charmer, et en même temps qu'il me faisait tourner lors d'une danse, il me faisait tourner la tête, chavirer mon cœur, et tomber dans ses bras. Quelques temps après une nuit d'amour, j'ai appris ta venue. J'étais ravie, je désirais depuis un moment un enfant. Ta naissance était pour moi un cadeau des étoiles. Ton père n'a pas été de cet avis. Il est devenu froid et distant avec moi quand je le lui annonçais qu'il allait être père. J'ai passé neufs mois seule et délaissé. Mes parents m'avaient reniée car j'étais enceinte avant d'être mariée. J'avais trouvé refuge chez une amie. Puis quand je t'ai vue pour la première fois, mon regret s'en alla et je ne pus que t'aimer.

Je n'avais pas revu ton père durant un an après ta naissance. Un soir, il a débarqué chez mon amie, il était en rage et te voulait morte. Il disait que tu n'aurais jamais du naître, qu'il aurait du empêcher cela bien avant. Ce soir-là, mon amie avait tenté de le retenir, tandis que je fuyais avec toi, mais il l'a tuée. Il m'a traquée tout une semaine, il fallait absolument t'éloigner de lui. Là, j'ai comme projet d'aller implorer Blaise et Jasmine Gayle pour qu'ils te prennent sous leurs ailes. Si tu lis cette lettre, c'est qu'ils ont donc accepté de t'adopter. Après ça, je fuirais le plus loin possible, je l'emmènerais sur de fausses pistes. Enfin, je ferais tout pour qu'il ne t'atteigne jamais. 

Je suppose qu'en cet instant où tu lis ces mots, je ne suis plus de ce monde. Je ne sais si c'est lui qui arrivera à me tuer ou non, mais je promets que jamais il ne t'aura à cause de moi. Je prierais les étoiles aussi longtemps que je le peux pour que tu vives une belle et magnifique vie. Saches que je t'aimes énormément et que ce sera le cas jusqu'à ma mort et même après. 

J'aurais tellement voulu être avec toi,

Noora, ta maman qui ne cessera jamais de penser à toi. "

L'envoyée des Elfes - Tome 1- Tarisar [Edité]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant