Un monde s'effondre.

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Personne n'avait bougé ou dit le moindre mot depuis la déclaration de Blaise. "Pas ses parents". Maura ne comprenait pas ce qu'il avait voulu dire. Il sentit l'incompréhension de la jeune elfe, alors il décida qu'il était temps de tout lui expliquer, qu'elle sache la vérité, elle le méritait. Il se racla la gorge comme pour se donner contenance et courage, puis osa regarder la brune dans les yeux. 

"- U-Une femme est venue à notre porte, il y a quinze ans. Elle était complètement paniquée, on aurait dit qu'un démon était à ses trousses. Tu n'étais encore qu'un bébé, sagement couchée dans un berceau, ne te doutant pas le moins du monde de ce qu'il se passait autour de toi. Cette femme nous a suppliés de t'adopter, elle nous a dit qu'elle était dans l'obligation de te quitter, qu'elle ne pouvait faire autrement. Elle t'aimait beaucoup, cela se voyait. Elle ne supportait pas le fait de te laisser. Bien sur, nous n'avons pas pu refuser. Elle était désespérée, si nous ne t'avions pas recueilli, seules les étoiles savent ce qu'il serait advenu de toi. Elle t'a remise à nous, en nous donnant deux lettres. Une qui nous était destinée, et qui nous expliquerait pourquoi elle avait du fuir. Et l'autre était pour toi. Nous devions te la remettre, si jamais les choses tournaient mal. "

Durant son discours, Maura s'abandonna à la peine, ne retenant plus ces larmes. Une souffrance nommée le chagrin la saisit de plein fouet  et elle n'eut qu'une envie : hurler. C'était donc vrai, ils n'étaient pas ses parents. Elle ne sut même pas comment réagir. Devait-elle lâcher prise et crier ? Peut-être serait-ce un bon moyen pour évacuer l'amertume. Devait-elle leur répondre ? Et puis, que répondre à cela ? Serait-il mal d'être en colère contre eux ? Ils ne lui ont rien dit. Ils lui avaient laissée croire à un passé qui n'était pas le sien. Au contraire, peut-être devrait-elle les remercier de l'avoir recueillie et non abandonnée. Soudainement, elle prit conscience que sa réaction vis-à-vis de ses parents adoptifs importait peu, comparée aux questions qu'elle se posait toujours.

"- Qui, qui était-elle ? Que disait la lettre ? arriva t-elle à bégayer entre ses pleurs et reniflements.

- Eh bien, dans la lettre qui nous était adressée, elle nous expliquait qu'elle était poursuivie par un grand mal, et qu'elle se devait de t'en éloigner avant qu'il ne t'atteigne. Elle nous assurait que ce qu'elle avait fait était uniquement pour toi, pour te protéger... Cependant, elle ne nous a pas plus détaillés la situation. Ce que nous savons d'elle, c'est qu'elle se nommait Noora et qu'elle était une dresseuse de dragon. 

-... 

- Je sais que c'est dure à accepter, mais..., commença t-il avant d'être coupée par Maura.

- Pourquoi "nommait" et "était" ? Pourquoi parles-tu d'elle au passé ?"

La jeune elfe parlait d'une voix brusque, et elle voulait son ton impassible, mais l'accablement se faisait sentir. Intérieurement, elle priait pour que sa mère soit toujours en vie. Elle devait la retrouver, la rencontrer. Malgré ses prières et l'espoir qu'elle essayait de garder en elle, la brune se doutait bien que cette Noora n'était plus de ce monde. Rien que d'y penser, une rage terrible naquit en elle. Maura ne pouvait concevoir d'apprendre l'existence de cette femme, mais d'être condamner à ne jamais la voir. 

"- Les Enchanteurs, des sorciers du Nord, ont une nouvelle reine. Celle-ci leur a retournés le cerveau, elle les a convaincus qu'ils avaient besoin de plus de pouvoirs. Alors, récemment, ils ont kidnappé plusieurs elfes pour pratiquer des rituels et extraire leur pouvoirs de leur corps. D'après certains espions, une fois qu'ils ont fini leurs rituels, ils tuent les victimes.

- Pourquoi me dis-tu cela ? Sa voix se fit petite, elle souffla pratiquement sa question.

-... Parce que... Ta mère fait partie de ces victimes... Les Amazones l'ont vue se faire emporter dans la forteresse du Nord. Hier soir, ils sont venus nous l'annoncer, ainsi que nous prévenir qu'ils allaient tenter un assaut contre les Enchanteurs. Ils vont tenter de ramener le plus de personnes possibles en vie. Mais il n'y a pas d'illusions à se faire... Noora doit être déjà morte à l'heure actuelle... Je suis désolé. "

Blaise vint s'accroupir devant elle, prit son menton entre ses mains, afin de pouvoir croiser son regard. Seulement, Maura se dégagea brusquement de cette étreinte et se releva pour s'éloigner un peu. Son cœur se serra, et elle peina à respirer. Bientôt, elle ne vit plus rien, des larmes coulaient à flot sur son doux visage et le ravagea. Elle ne savait même plus pourquoi elle pleurait. Elle était en colère, abattue, mais surtout, elle ne comprenait plus rien au monde qui l'entourait. Apprendre dans le même temps, qu'elle était adoptée, et que sa vraie mère était décédée. C'était beaucoup trop lourd à tenir. En quelques minutes, on avait mis ses nerfs à bien rude épreuve. Un monde entier venait de s'effondrer. 

Elle perçut qu'on lui prenait la main pour y déposer quelque chose. Elle dut faire preuve d'un effort surhumain pour se calmer, elle sécha ses larmes pour y voir plus claire, et distingua une lettre dans sa main. 

"- Comme je te l'ai dis, reprit Blaise, elle voulait qu'on te la donne s'il lui arrivait malheur. Prend le temps de la lire... Je ne sais pas exactement quels sentiments t'assaillent en ce moment, mais je pense m'en douter. N'oublies jamais que nous t'avons toujours aimée, et que ça ne changera pas. Pour nous, tu es et restera notre petite fille adorée, notre petite elfe, il ricana maussadement. Aussi, n'en veux pas à ta mère... Certainement que dans ta lettre, elle t'expliquera mieux ses raisons, mais je suis sûr qu'elle aurait préféré n'importe quelles autres vies, tant qu'elle aurait pu les passer avec toi... J'espère que... Que tu nous pardonneras un jour..."

Maura sentit qu'elle ne tiendrait plus et qu'elle retomberait en larmes, alors sans plus attendre, elle sortit en courant, déboulant dans les couloirs. Elle courut plus vite que jamais, sans s'arrêter, sans prendre en compte les regards perturbés des gens qui ne saisissaient pas son comportement. Elle faisait surement peur à voir, ne s'étant pas changer depuis la veille, poussiéreuse de par sa nuit à l'extérieur, les yeux et le visage rougis. Pourtant, elle s'en fichait pas mal à cet instant. 

L'envoyée des Elfes - Tome 1- Tarisar [Edité]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant