One shot

Vol pour le 7e ciel

Par Leilou

- Il est 4 heures, vous m'avez demandé à vous réveiller.

- Mmhh...

- On vous apporte le petit-déjeuner d'ici 15 minutes.

- Mmhh...

Sans réponse plus précise de la part de Sara, encore bien endormie, la responsable de l'accueil de l'hôtel raccrocha. Elle avait l'habitude de réveiller des hôtesses de l'air, venues passer quelques heures dans l'hôtel, récupérer et se laver, avant d'enquiller sur un autre moyen ou long courrier.

Ce matin-là, alors que le ciel déjà bleuté, enveloppait peu à peu la ville aux abords de l'aéroport, Sara n'était franchement pas d'humeur à entamer la journée par un Roissy – Moscou, mais elle avait échangé sa place avec Wendy, sa collègue et amie pour que cette dernière puisse retrouver son mari et ses enfants le temps du week-end.

Au lieu de se la couler douce chez elle, sur le hamac qu'elle avait fièrement installé dans son salon, à cajoler son gros matou, à dévorer des livres tout en buvant une bouteille de vin rouge, elle devait se dépêcher d'en finir avec son chignon, rentrer dans son costume de personnel navigant, sans un faux pli. La compagnie pour laquelle Sara travaillait sans relâche depuis plus de cinq ans était intransigeante avec l'apparence physique et l'image que véhiculait les hôtesses à bord des avions. C'était très important. C'est pourquoi, Sara s'évertuait à ne pas prendre un poil de graisse, à choisir avec goût ses tailleurs dans le catalogue mis à disposition par le patron, aller régulièrement chez le coiffeur entretenir sa longue chevelure d'un profond blond doré.

Le chignon relevé, retenu par des dizaines de pinces, le maquillage appliqué avec précision, elle pouvait enfin se jeter sur le grand café rallongé sur son plateau apporté par le room service. Elle n'avala que quelques miettes du croissant au beurre, encore tiède et pris avec elle la pomme rouge rubis qu'elle mis dans son sac à main.

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Après avoir traversé les dédales de l'aéroport encore éteint à cette heure-là, elle rejoignit son équipe prévue pour le vol AF457 Paris-Moscou, qui décollait à 8h56. Le gros zinc, un Boeing 767 de la compagnie était déjà sur le tarmac, et ça s'activait en soute, dans les cabines et le cockpit.

Elle ne remarqua pas de suite le nouveau steward qui faisait ce long courrier pour la première fois avec elle. Elle se souvint que ce n'était pas sa place habituelle, puisque c'était Wendy qui l'occupait. Une de leur discussion dans une chambre d'hôtel lui revint. Wendy lui parlait souvent d'un jeune steward, avec qui elle passait le temps pendant les longs vols, calmes et tranquilles.

Elle n'avait pas voulu la croire quand Wendy lui avait assuré qu'il était super mignon, bien qu'un peu jeune. Pour cause, sa meilleure amie avait un goût bizarre pour les hommes, aux antipodes de ceux que Sara avait pour la gente masculine. Wendy les aimait blonds, musclés et athlétiques. Sara les préférait bruns et sans artifices musculaires, des « hommes naturels » elle aimait à dire.

Benjamin, d'après son badge argenté accroché à son gilet noir, sur sa chemise défroissée à la perfection, était ce genre de mec qui passait son temps libre à la salle de sport, dans les boutiques et devant son miroir. Sara se mit à se rappeler sa dernière relation, avec Paul, un mec qui aimait rester tranquille à l'appartement, à boire des bières et à se regarder une fois par semaine dans le miroir.

Elle avait appris à se satisfaire de relations un peu plan-plan, avec des hommes plan-plan, finalement. Elle se promettait à chaque rupture de se trouver un homme « nouveau », mais à chaque fois, jetait son dévolu sur le parfait modèle du précédent. Pour cela, elle se maudissait. Mais se consolait en trouvant parfois sa vie professionnelle bien plus excitante que sa vie amoureuse.