Chapitre premier - Tenfer

155 11 64
                                    

Chapitre premier

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.

Chapitre premier

Automne, 18e jour de Tharès, 19 ans avant l'Achèvement

Tenfer

Un temps des plus exécrables pour une balade au clair de lunes, si tant est que parler de clair de lunes eut été approprié. Entièrement occultées par d'épais nuages, les lunes sœurs du Contrebas se faisaient désirer. En conséquence, la nuit avait atteint des sommets de noirceur et tous les voyageurs, aussi pressés fussent-ils, s'étaient résignés à poser leurs bagages dans une auberge des environs. Davantage que la promesse d'un bon feu de cheminée et d'un repas chaud, c'était le confort d'avoir un toit au-dessus de leur tête par cette soirée infernale qui les séduisait. Car au dehors la bruine avait rapidement tourné à la pluie torrentielle, et s'engager sur les routes par ce temps aurait été pure folie. La terre battue des sentiers avait tôt fait de se changer en boue glissante sous l'effet de l'averse et rendait à présent impraticable la majorité des pistes, même pour les pieds les plus sûrs. Ainsi, tous les voyageurs, des commerçants aux mercenaires et en passant par les bandits, avaient eu la sagesse de lever le pied. Tous, sauf un.

Emmitouflé tant bien que mal dans son épais manteau de voyage, Tenfer jura pour la douzième fois depuis le coucher des soleils jumeaux. Une douchée pareille ne vous épargnait pas, quels que fussent les vêtements que vous portiez. Franchissant sans la moindre difficulté les multiples couches censées le protéger, il aurait juré que l'eau s'était infiltrée jusque dans ses chairs. Geste dérisoire, il resserra un peu plus les pans de sa cape trempée autour de lui.

- Par les Astres, quelle idée d'habiter un coin aussi perdu ! grommela l'homme dans sa barbe.

Sur les routes depuis bientôt dix jours et autant de nuits, ce voyageur d'une quarantaine d'années n'avait plus qu'une seule hâte : arriver à destination. Le volume du sac pesant sur ses épaules s'était considérablement réduit depuis qu'il avait quitté le Séminaire. Des provisions qu'il avait emportées, il ne restait plus qu'une demie miche de pain sèche – l'était-elle seulement toujours ? – , deux tranches de venaison fumée et une pomme fripée. En somme, bien peu de victuailles et certainement pas assez pour tenir plus de deux jours. Fort heureusement, son voyage touchait à sa fin.

Sa carte de toile cirée dans une main et sa boussole dans l'autre, Tenfer s'assura qu'il suivait bien la bonne direction, puis, de nouveau serein, glissa le tout dans la poche droite de son manteau. Par un temps pareil, la moindre erreur d'orientation lui coûterait cher. Quelle inspiration il avait eue d'emporter sa boussole avec lui ! Car bien que confiant en sa capacité de se diriger à l'aide des étoiles, il savait le temps de Contrebas changeant, surtout en plein automne, et les nuages qui voilaient l'éclat de Volgane et Ethène, les lunes jumelles, lui donnaient amplement raison.

D'après ses estimations, encore quatre à cinq heures d'effort et il atteindrait Ferrière, le village niché au cœur de la vallée surmontée des trois collines Heda, Sidine et Rolane.

Les Astres de ContrebasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant