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Clarke

Assise sur le sol froid du carrelage, je fixe les tâches rouges colorant mon champ de vision brouillé par les larmes que je retiens de s'échapper. Mon bras sanglant est immobile tandis que le sol prend une teinte rouge sans que je ne bouge pour l'en empêcher. Seul le bruit de la porte d'entrée qui se claque me fait réagir et me lever d'un bond et me fait lâcher la lame que j'avais en main en un tintement aigu. Je verrouille la porte de la salle de bain passe mon bras sous le jet d'eau froide attendant que les saignements cessent et prends une éponge pour nettoyer le sol. Je sursaute violemment lorsque l'on frappe frénétiquement à la porte.

Clarke: Oui?
Octavia: C'est moi. Ça va?
Clarke: Oui ça va j'arrive dans une seconde.
Octavia: Ok, j'ai apporté chinois on t'attend en bas avec Bellamy.

Mon corps tout entier se raidit à l'entente de ce prénom. Je ne pensais pas qu'il viendrait chez moi alors qu'il me hait tant. Je prends mon courage à deux mains et j'enfile un pull à manches longues avant de prendre une grande inspiration et de descendre rejoindre ma meilleure amie et son frère. J'essaie de ne pas montrer ma gêne sur mon visage tandis que je serre Octavia dans mes bras et que Bellamy me fixe d'un regard pesant. Je m'avance pour lui dire bonjour mais il s'en va installer le repas. Je ne réagis pas à cette ignorance et fait comme si rien ne s'était passé et heureusement Octavia n'a rien vu.
Octavia et moi sommes amies depuis la maternelle et depuis nous ne passons pas une journée sans se voir ou au moins s'appeler. On se voit peut être un peu moins qu'avant car nous sommes entrées à la fac et nous somme dans deux établissements différents. Je suis entrée dans une fac d'arts tandis qu'Octavia elle est entrée dans une fac de droits. Son frère, plus âgé, n'a jamais voulu faire d'études supérieures et se contente d'un travail en tant que coach sportif pour faire vivre sa sœur et lui car ils habitent ensemble et leur parents ne sont plus la pour les aider. Quelque chose à changé en Bellamy lorsque sa mère est morte. Octavia était effondrée mais elle a réussi à faire le deuil et à rester qui elle était au fond d'elle même mais Bellamy lui est devenu un tout autre personnage. Il s'est renfermé et n'est plus le même garçon au sourire si ravageur et hypnotisant, il est devenu froid, distant et rabaisse tout le monde hormis sa sœur qu'il protège comme un diamant. Autrefois on pouvait rire avec lui, avoir une discussion intéressante mais aujourd'hui il ne parle que pour humilier les autres. C'est sûrement sa manière à lui de combattre la douleur que la perte de sa mère a causé. Dans tous les cas c'est une façon particulièrement éprouvante pour les personnes qui l'entourent car il ne montre pas une once d'émotions sur son visage hormis le dégoût et la colère. Et ces émotions je les connais bien car je les ressens à chaque fois qu'il pose le regard sur moi. Mais malheureusement ça aurait pu s'arrêter la si je n'étais pas tombée amoureuse de lui comme une idiote. Je n'arrive pas à faire taire mes sentiments enfouis au plus profond de moi lorsque je le vois ou que j'entends le son rauque de sa voix. Je n'ai pas choisi de l'aimer, c'est arrivé et je n'arrive pas à m'en détacher. Les insultes qui fusent de sa bouche ou des autres me détruisent encore un peu plus chaque jour. Je persiste à penser que personne ne veut de moi et que j'inspire la pitié dès autre. Même si j'arrive à continuer comme si de rien était et ça en partie grace à Octavia, je ne suis qu'en réalité une corps dont l'âme a été corrompue il y a longtemps. Je ne ressens presque plus la douleur lorsque je m'enfonce cette lame dans mon avant bras couvert de cicatrices. Je ne mets que des hauts à manches longues même quand il fait une chaleur insupportable afin que personne ne voit à quel point je suis irrécupérable.

Perdue dans mes pensées, j'ai un léger frisson lorsque Bellamy frôle mon épaule avant de déposer les plats chauds devant nous. Je le remercie d'un signe de tête et lui ne décoche même pas un mouvement ou une respiration. Je souffle intérieurement et je commence à jouer avec les légumes présents dans mon assiette. Je n'ai pas trouvé l'appétit depuis une semaine et le manque d'énergie commence à se faire sentir intensément . Le repas de déroule dans une discussion que je n'écoute même pas et je divague dans des pensées plus que noires. J'entends quelques fois le rire d'Octavia éclater et lorsque j'entends celui de Bellamy je ne peux m'empêcher de ressentir une vague de chaleur s'emparer de moi. Ce rire je le reconnaîtrais entre milles. Je peux l'entendre que lorsqu'il parle avec Octavia et c'est un des rares moments où je peux ressentir un peu de joie. Lorsque je remarque les assiettes de tout le monde vide je me lève et les ramasse. Je sens une prise sur mon poignet encore douloureux et je grimace légèrement. Octavia me regarde inquiète avant de me proposer son aide. J'allais refuser avant que Bellamy ne prenne la parole.

Bellamy: On est des invités O'. Elle s'en chargera elle en est parfaitement capable.
Clarke: Oui c'est bon je m'en occupe...
Je réponds avec un pincement au cœur.

Octavia se réinstalle dans sa chaise mal à l'aise et reprend le cours de sa discussion avec son frère. J'entreprends de faire la vaisselle en pleurant le plus silencieusement que mon corps me le permet et je frotte sans conviction les aliments collés aux assiettes. J'essuie mes larmes et me passe de l'eau sur le visage. Je me regarde dans le miroir et comme je l'espérais mes yeux ne sont pas bouffis et rouges. Je retourne au salon où je vois Octavia dormant sur le canapé reposant sa tête sur l'épaule de Bellamy. Lui regarde dans le vide perdu dans ses pensées.Je pars chercher une couverture et la dépose sur la table basse en prenant soin de ne pas rencontrer les yeux chocolats du garçon que je convoite secrètement. Lui me fixe comme à son habitude sans prononcer un mot et avant que je ne puisse réagir il attrape mon bras et remonte la manche de mon pull dévoilant les blessures que je me suis infligée il y a peu. Je le regarde terrorisée et lui ne fait que me regarder avec dégoût l'air de dire que je ne suis qu'une moins que rien et que je mérite ce que je m'inflige. Je me dégage de son emprise d'un coup sec et je pars m'enfermer dans ma chambre tentant de retenir les larmes le plus longtemps possible. Mais cette fois elles ne coulent pas. Je résiste jusqu'à les ravaler et je m'allonge sur mon lit fixant le plafond. Je n'aurais pas pu espérer pire et je ne pleure pas tandis que d'habitude je pleure pour un rien. Peut être qu'il est temps pour moi de ne plus être la petite fille fragile que tu peux casser en la frôlant mais celle dont tu n'as pas envie de t'approcher et celle qui ne laisse paraître aucune émotion comme il le fait si bien. À vrai dire je ne sais que faire. J'en ai marre de réfléchir autant que je m'endors tout de suite sans avoir pris la peine de me changer. Je m'endors la tête pleine d'idées sombres et je ne pense qu'à son visage où je peux encore lire le dégoût dessus.

Ellipse de la nuit

Je me réveille après de nombreuses insomnies cette nuit et je pars enfin me changer dans la salle de bain. Je ne me reconnais presque pas dans le miroir tellement ma mine est affreuse. Des cernes se dessinent sur le haut de mes pommettes de tel que l'on ne voit que ça et mes yeux sont si gonflés que ça en perturbe ma vue. Je tente de faire de mon mieux pour cacher ces horreurs et le résultat n'est pas si mal, mais ce n'est pas aussi étonnant après des heures de pratique. J'ai eu le temps de pratiquer lorsque je devais sortir à l'extérieur et que j'avais le courage de vouloir cacher les cicatrices marquant mon bras. J'enfile un jean noir troué et une blouse bleue claire à manches longues évidemment. Je jette un dernier coup d'œil à mon reflet si pathétique et je descends les escaliers avec en vue de boire une bonne tasse de thé. Je découvre avec surprise que les invités de la veille ne sont toujours pas partis. Octavia dort toujours sur le canapé alors que Bellamy est en train de siroter une tasse de café en lisant le journal. Je m'avance dans la cuisine pour me préparer une tasse de thé sans un regard pour mon invité. Je hausse les sourcils lorsqu'il s'adresse à moi.

Bellamy: Bonjour quand même.
Clarke: B..Bonjour.

C'est la première fois depuis des lustres qu'il ne paraît pas si dur avec moi. Je me retourne déstabilisée et je verse l'eau brûlante dans ma tasse en prenant soin qu'elle coule en premier sur la peau fine de mes doigts. Je cache bien évidemment la tasse pour que personne ne voit la scène et je retiens en un étouffement la douleur que me procure cette habitude quotidienne. Je précipite la zone fraîchement brûlée sous l'eau froide et laisse le soulagement s'emparer de moi. Ce n'est que lorsque je me retourne pour attraper le torchon sur le plan de travail que je remarque Bellamy adossé contre celui l'air interrogateur à me fixer comme si il attendait des explications. Je ne me suis jamais sentie aussi mal qu'à ce moment. Il a déjà vu mes coupures et maintenant les brûlures. Je ne peux le regarder dans les yeux et je fixe le sol priant pour qu'il parte. Mais il reste planté la attendant que je lui donne des explications, je sens que je vais passer une journée désastreuse...

GoodbyeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant