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Voulant me rassurer, j'attrapai mon ordinateur qui se trouvait juste à côté, allai sur Internet, et tapai "Ruben Scott" dans la barre de recherche. Regardons les images.
C'est bien ce que je craignais. Ils ne me proposent que le Ruben que je connais, celui au regard ténébreux, et au teint bronzé.
Sans réfléchir, j'ai saisi mon portable et je l'ai appelé directement.

/Appel Ruben/

Ruben: Oui, mademoiselle Brooks?

Moi: Je veux des explications, je t'attends chez moi.

Ruben: Oh April, je voulais vous-

/Fin de l'appel/

Faut pas traîner, j'ai pas son temps.
5 minutes plus tard, la sonnette de l'appartement retentit.

Moi: Entre!

Il ouvrit doucement la porte, et s'avança vers moi.

Ruben: Vous m'avez raccroché au nez tout à l'heure, je voulais vous dire que j'avais à vous parler.

Moi: Je sais tout, ne tourne pas autour du pot s'il te plaît.

Ruben: Je sais bien que vous savez tout. Et maintenant que vous avez ouvert le livre...

Il marqua un temps d'arrêt.

Ruben: Cela peut paraître grotesque, mais croyez-moi, je vais vous dire absolument toute la vérité. Comme écrit sur le livre, je suis bien né en 1918, et je suis mort en 1940. Oui, c'était pendant l'occupation allemande. Je suis, enfin j'étais, je ne sais plus tellement, un gitan, et on m'a déporté dans les camps lors d'un séjour à Paris. Je n'y ai pas survécu, je n'avais que 22ans...et là, je ne saurai comment l'expliquer, mais le jour où je suis tombé à terre, j'ai vu un tunnel, je me sentais agréablement bien, mais une voix intérieure me disait de me battre pour la vie. Malheureusement j'ai succombé à mes blessures. Mais je ne l'ai pas compris tout de suite. J'ai ouvert les yeux. J'étais dans les camps, et autour de moi, pleins d'hommes. Je me sentais léger, et je ne sentais plus aucune douleur. J'ai crié le nom de mon ami, Samuel, un petit français. On avait beau ne pas parler la même langue, on se comprenait et on se soutenait mutuellement. Je me rappelle d'un jour où, me voyant affamé, il a partagé son pain avec moi.

Il s'arrêta pour se remettre les idées en place, il avait un air boulversé.

Ruben: Je l'ai appelé, il est venu vers moi. Il criait mon nom, et j'ai pu voir des larmes couler le long de ses joues. Sans comprendre, les hommes qui étaient jusqu'à ce moment-là autour de moi, ont pris un corps, presque squelettique, et l'ont emmené loin, dans les charniers je crois. J'ai sauté dans les bras de Samuel, mais lui s'est écroulé à terre et à pleurer toutes les larmes de son corps. J'ai entendu deux dirigeants parler. L'un d'eux ordonnait à l'autre de barrer le numéro 16743. J'avais déjà entendu ça, quand des braves hommes rendaient l'âme. Mais, c'était mon numéro.
Les pauvres hommes continuaient de se tuer à la tâche, mais ils ne me voyaient pas. J'ai compris que c'en était fini pour moi. Alors je me suis dirigé vers une clôture, et c'est avec quelques craintes -qui ont vites disparues- que je l'ai franchie. J'étais libre.

Un léger sourire se dessina sur son visage. J'avais les larmes aux yeux...

Ruben: Le temps passait, et je vivais en secret, sans que personne ne me voit et ne me remarque. Mais un jour, je suis allé m'assoir dans un salon de coiffure, et j'ai croisé le regard d'une magnifique jeune femme. Elle ne regardait pas dans le vide, elle me regardait. J'étais boulversé. Je lui ai adressé la parole, et à ma grande surprise, elle m'a répondu. Un sentiment étrange naissait au fond de moi. Je n'avais pas ressenti ça depuis des années. À la minute où elle m'a répondu, j'ai su que c'était elle, la personne qui m'aiderait à trouver la paix.

Moi-feignant un sourire-: Ahah c'est moi c'est ça?

Ruben: Je vous ai attendue tellement longtemps. En l'ayant ouvert, vous m'avez sauvé. Jusqu'à maintenant, mon nom était écrit en noir. Dans quelques minutes, il sera écrit en doré, et j'aurai quitté la Terre.
Mais par pitié, Finn ne devra jamais savoir.

Moi -ne retenant plus mes larmes-: Oui je vais faire un sorte qu'il ne le sache pas...

Ruben: J'ai aimé vous connaître Brooks. Nous nous reverrons.

Sur ces mots, une forte lumière éblouissante entra dans la pièce qui était jusqu'à maintenant sombre.
En rouvrant les yeux, j'étais seule. Seule avec mon ordinateur et le livre. Je me penchai vers celui-ci et constatai que tous les noms de la page 1589 étaient dorés.
Je me levai, complètement abasourdie par les révélations que venaient de me faire Ruben. Ruben. Ruben. Ruben. Ruben. Son prénom passe en boucle dans ma tête.

Moi-criant-: Ruben non!

Le dernier son s'étouffa dans mes sanglots. Je m'étais attachée à lui...

**

L'après midi fut très longue, j'ai passé mon temps à pleurer dans mon lit.
Quand mes pleurs ont cessé, je suis sortie de la couette pour aller me faire une tisane. Oui en pleine période estivale.
Je me suis lancée un film, histoire de penser à autre chose.

**

Je me réveillai en sursaut. Je viens d'entendre la sonnette de l'appartement. Mon regard se posa sur la télé, ça doit faire facile 2h que je dors.
J'essayai de reprendre mes esprits -non sans difficulté-.

Moi: C'était un cauchemar. Juste un cauchemar.

Mais ma raison me ramena vite à la réalité quand je vis le livre, qui n'avait pas bougé de la table depuis 3h.

La sonnette retentit une seconde fois.

Moi: Oui oui j'arrive!

J'ouvris la porte, et je tombai nez à nez avec la dernière personne que j'avais envie de voir pour le moment.

The keyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant