Aime perpétuellement, déteste assidûment.

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Je fixai le garçon encapuchonné. Si c'était bien un garçon. Je ne voyais pas son visage et avant même que je n'ai pu ouvrir la bouche, il m'entraînait fermement derrière lui, sans me laisser le moindre choix. C'était bien un garçon. Sa poigne était ferme, ses doigts plus longs et massifs que les miens. Et plus encore, il n'avait aucun mal à me forcer à le suivre. Son dos était large et il me dépassait de quelques centimètres. Je me débattis vivement, cherchant à échapper à son emprise mais il refusait de lâcher prise.

- Ne me touches pas ! Grondai-je en me campant sur mes jambes et parvenant enfin à le faire se stopper un instant.

- Joues.

Et me laissant interdite, il me poussa vers le petit espace qui servait de scène. Le groupe en train de jouer s'arrêta quand je percutais, violemment, une de leur enceinte, faisant résonner un bruit strident. Mais, bien vite, il fut remplacer par un profond silence qui envahit le bar. Je devins livide alors que tous les yeux se posaient sur moi. Mon cœur ne battait plus dans ma poitrine, mon souffle avait totalement cessé d'envahir mes poumons, mes doigts tremblaient fébrilement et mon esprit semblait entièrement vide. J'étais juste capable de rester plantée face à tous ces visages agacés.

- Dég...

- Elle est avec moi.

Le gars à la capuche s'était avancé, venant serrer la main du garçon qui semblait sur le point de me faire décamper de sa scène, manu-militari. Indécis, celui-ci me lança un regard noir alors que, soudainement, son visage me semblait familier. Où avais-je déjà vu ce visage dont les yeux bruns qui me fusillaient actuellement ? Néanmoins, les conversations avaient repris depuis l'intervention du gars encapuchonné et le reste du groupe venait le saluer chaleureusement. Je jetais un coup d'œil en arrière. Mes jambes tremblaient encore, mais je pouvais m'empresser de dégager.

Mais, encore une fois, ma fuite fut interrompue. La main de ce type revint saisir mon poignet alors que je m'apprêtais à faire demi-tour et à prendre mes jambes à mon coup. Ce type était visiblement un taré et j'avais tout intérêt à me carapater le plus vite possible. Je n'avais pas besoin d'attendre le croassement d'un corbeau pour savoir que je me fourrais dans une situation lugubre. Il me tira en avant, me plaçant à côté de lui face au quatre garçon constituant le groupe qui jouait depuis mon arrivé dans le bar.

- Elle va jouer avec nous, annonça-t-il alors que sa voix me faisait froncer les sourcils.

- Je ne veu...

- Tu préfères aller pleurer dans ton coin ? Arrête de t'enfuir. Si tu n'arrives pas à hurler, joues.

Face à moi, ses iris sombres se plantèrent dans les miens. Je me mordis la lèvre. Comment pouvait-il comprendre à ce point les sentiments qui me chamboulaient ? Sans répondre à ma question muette, il se détourna, s'avançant vers la guitare que lui tendit l'un des autres membres de ce qui semblait être son groupe. Il ne me désigna même pas le petit piano droit, tapis dans un recoin et que personnes n'avaient utilisés depuis un long moment au vue de la poussière le recouvrant. Je le fixai longuement.

Je n'avais pas joué devant une foule aussi importante depuis des années et si l'idée ne m'effrayait pas en théorie, je constatai que la pratique était beaucoup plus complexe. Je n'étais plus aussi à l'aise que je l'étais lorsque je n'étais qu'une enfant. Et puis, jouer avec un groupe dont je ne connais qu'un seul membre ? Et encore, dire que je le connaissais était mensonger. Je n'allais pas le faire. Je n'avais aucune raison de le faire. Je me détournai, bien décidée à faire ce que je désirai. Car il ne savait rien de ce que j'éprouvai, jouer n'allait pas me libérer. Mais il m'arrêta. Encore. Néanmoins, cette fois-ci, il ne le fit pas physiquement.

Neither good nor badOù les histoires vivent. Découvrez maintenant