Neither good nor bad

Premiers accords. Quelle sera la mélodie ?

Je fixai Derek et Nathanaël qui venaient de rentrer dans les coulisses. Le second marchant bien avant le premier, me cherchant déjà du regard. Il se rua dans ma direction dès qu'il m'eut repéré, visiblement très empressé à l'idée de m'épargner une situation dès plus désagréable. Mais c'était trop tard. Je jetai un œil derrière lui alors qu'il se plaçait, déjà, bien face à moi pour obstruer mon champ de vision :

- Tu n'as pas à t'occuper de lui.

- Qu'est-ce qui s'est passé, bon sang ? Questionnai-je aussitôt, les poings serrés.

- J'ai dû lui remettre les idées en place, assura-t-il d'un haussement d'épaule.

- Nathanaël !

- C'est lui qui m'a demandé ! Se justifia-t-il devant mon énervement.

- Hein ?

Nathanaël se contenta de hausser les épaules, désinvolte. Comme si cette information était totalement logique et pleinement acceptable. Mais elle ne l'était pas. Je voulu l'écarter, prête à m'avancer vers Derek dont la lèvre ouverte saignait abondamment, couvrant d'un rouge vif le mouchoir qu'il appuyait tout contre sa blessure. Cependant, Nathanaël se déportait pour me barrer la route, ses yeux se posant sur moi, implacable.

- Tu sais aussi bien que moi qu'il le méritait, m'affirma-t-il en venant saisir mon poignet pour empêcher toute tentative de fuite. Et ce n'est rien de grave, il va s'en remettre.

- Tu n'aurais pas dû le frapper, désapprouvai-je, sans chercher à me dégager. Je t'avais demandé de ne pas le faire.

- Et j'aurais obéis s'il ne m'avait pas demandé, lui-même, de le faire, rétorqua-t-il, calmement. Mais je reconnais que j'ai réagis impulsivement, sinon j'aurai réalisé qu'il ne devait agir ainsi qu'en sachant que tu allais enfin t'occuper de lui.

D'un bref coup d'œil en arrière, Nathanaël grimaça de dégoût. Je lui balançai un coup de poing dans l'épaule, sans ménagement et il se contenta d'émettre un mince grognement, à peine audible. Qu'il ne cherche pas plus les ennuies. Je profitai de son léger mouvement pour fixer Derek alors que quelqu'un d'autre était venu lui porter secours. Samira s'agitait autour de lui, se tenant à la place que j'aurai dû occuper. Je serrai les poings, rongée par un sentiment que je ne connaissais que trop bien. La jalousie. Combien de fois me ferais-je voler ma place ? Combien de fois devrais-je le regarder me remplacer ? Combien de fois me tiendrai-je à cette place ? Mais pouvais-je réellement me plaindre ? N'étais-je pas celle qui avait, délibérément, décidée d'abandonner la place que j'avais su conserver jusqu'alors ?

Comme s'il percevait mon regard, rivé sur lui, Derek se déporta de quelques centimètres. Ses yeux venant rencontrer les miens. Presque trop bien pour que je ne réalise pas qu'ils devaient me chercher. Je ne me détournai pas, le dévisageant tout autant qu'il se permettait de le faire. Il me manquait. Il me manquait réellement. Et pourtant, je fus incapable de m'avancer. J'avais l'occasion de lui pardonner, de revenir en arrière et de récupérer cette place qui me manquait tant. Mais je ne parvins pas à le faire.

- Ne t'en préoccupe pas, reprit Nathanaël en venant se placer devant moi, coupant le contact visuel. Concentre-toi sur ce soir.

- Tu aurais dû y songer avant de le frapper, soupirai-je.

- J'en ai conscience, soupira-t-il à son tour. Et je suis désolé, Heden. Sincèrement. Je sais que tu n'avais aucune envie qu'il soit blessé à cause de cette histoire et j'ai agis... comme un gamin. Mais, s'il te plaît, ne me fais pas, en plus, me sentir d'autant plus coupable en te gâchant la soirée.