Chapitre 9

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2ème Nuit

POINT DE VUE DE RAPHAËL !

- Les Loups-Garous se réveillent.

Pour la troisième fois depuis le début du jeu, je me réveillai au milieu de la nuit. Et pour la seconde fois, j'allai me transformer en Loup. À l'appel du meneur, j'étais complètement réveillé. Je passai une main dans mes cheveux pour les remettre en ordre.

- Les Loups-Garous sortent de leur maison.

Je ne voulait pas sortir. Je savais que lorsque je me retrouverai dehors,  mes coéquipiers et moi devrions choisir une victime. Lorsque nous l'aurions choisie, notre instinct, autant que notre corps, deviendrait celui d'un loup. Ma soif de sang serait plus forte que la raison. Malgré moi, j'enfilai mes baskets que j'avais abandonnées au pied du lit la veille et sorti de la maison. Il faisait nuit noire dehors, mais je pus apercevoir des silhouettes debout dans la cours. Les autres Loups-Garous m'attendaient. Mais il n'y avait pas de trace de l'homme à capuche qui nous avait aidé la nuit dernière.

- Le meneur n'est pas là aujourd'hui ? leur demandai-je.

Le terme cette nuit aurait peut-être été plus approprié.

- Apparement pas, répondit Emma, l'une des Louves de la meute. Je crois qu'on va devoir se débrouiller seuls cette nuit.

De l'appréhension se lisait dans ses yeux. Personne ici ne voulait tuer. Mais personne non plus ne voulait se faire tuer. Quel était le dicton déjà ? "Manger ou se faire manger" ? Est ce que "tuer ou se faire tuer" existait aussi ? En tout cas, il résumait parfaitement le contexte actuel.
Matthis, le Loup-Garou qui s'était immédiatement imposé comme l'alpha, le chef de notre meute, pris la parole, d'un ton rieur.

- Alors, qui voulez-vous boulotter ce soir ?

Matthis était le seul d'entre nous à prendre ce qui se passait comme un jeu. Bon, OK, on était dans un jeu. Mais doit-on appeler "Jeu" une situation où ceux qui se font éliminer doivent mourir ? Disons plutôt qu'il était le seul à prendre ça sur le ton de la rigolade. Comment quelqu'un pouvait-il prendre du plaisir à tuer ? Je ne le comprendrais jamais. Comme personne ne répondait à sa question, l'alpha reprit la parole.

- Que diriez vous d'Aude ? Elle est un Villageois avec la médaille du capitaine. Il faut la tuer pour tenter d'hériter de son poste. Nous DEVONS gagner.

Je me demandais ce qui avait bien pu pousser ce gars à répondre à l'affiche qui nous avait tous attiré ici.

- Je prend ça pour un oui.

Personne n'avait répondu à la proposition de l'alpha. De toutes façon,  le contredire aurait été une épreuve. Ici, il décidait de tout. Aude allait être la pauvre victime des Loups-Garous cette nuit. Je savais que ma transformation était imminente. Je jettai un regard à la maison de Hélène, la jeune fille que Cupidon avait désignée comme étant mon "amoureuse". Peut-être que si nous sortions tout les deux vivants de cet enfer, nous pourrions devenir amis.
Ou peut-être plus. Fit une mauvaise voix dans ma tête.

Mais déjà, ma transformation en Loup commençait.

Je rejettai ma tête vers la lune qui brillait au-dessus de nous au moment où mon corps commençait à se tordre sous l'effet de la transformation. 
Je sentis une douleur comparable à celle d'une crampe se répendre dans tous mes muscles. Je grimaçai. Je n'avait jamais aimé les crampes.
Petit à petit, je sentais mes vêtements devenir le plus en plus petits, mon corps se couvrir de poils et changer de forme : mes jambes et mes bras devinrent des pattes, une queue poussa, mon torse changea de forme. Ma figure changea, elle aussi : mon nez s'allongea, mes oreilles se positionnèrent sur le haut de mon crâne qui, lui, s'était énormément alongé.
En quelques secondes, j'étais devenu un Loup.

Je jettai un bref regard aux lambeaux de vêtements qui se trouvaient tout autour de moi. Ce bazar n'était pas intéressant. Ce qui l'était plus, en revanche, c'était la proie que nous avait désignée l'Alpha. Du sang chaud coulait dans ses veines. Et je rêvais de pouvoir y planter mes cros. La lune brillait au-dessus de moi. Elle semblait m'autoriser à tuer. Mais avant, il me fallait tput de même l'approbation de notre Alpha. Nous étions en tout six Loups. Nous ne pouvions pas nous jeter sur la proie comme des sauvages. Je grognai d'envie. Quand enfin, il nous donna le signal, je réduis la distance que me séparait de la porte en une seconde. Je sentis le vent sur ma fourrure brune, me donnant des frissons d'excitation. La porte de la maison était entrouverte, comme la nuit dernière. L'homme avait dù l'ouvrir. C'était à l'Alpha que revenait l'honneur d'entrer en premier. Je le suivis donc. L'intérieur sentait fort l'odeur de la jeune fille, mais c'était dans la pièce au fond à droite qu'elle était la plus forte. La proie se trouvait là. Lorsque je la vis, mon instinct me dit de lui sauter dessus pour la dévorer en entière. Mais l'homme avait été clair. Pas plus d'une morsure. Et nous avions bien compris la leçon. Notre Alpha avait tenté plus, mais l'homme l'avait puni avec un bâton noir qui faisait du bruit, puis de la fumée, et le Loup avait été blessé.

Quand fut venu mon tour, je plantai mes cros dans la chair fraîche de la cuisse. La fille était déjà morte, tuée par la morsure de notre Alpha au niveau de la nuque, mais le sang y était toujours chaud. Je voulai plus. J'allai enfoncer mes cros plus profond, quand le souvenir de l'homme et du bâton m'arrêta.
Juste une mosure.
Je retirai mes cros à contre-coeur.
Après que tout le monde ait mordue dans la chair fraîche, notre Alpha nous mena vers la sortie. Je jettai un dernier regard de regret à la proie encore chaude que je quittais. Mais quand l'Alpha décidait, il était hors de question de désobéir.

Dehors, la lune était toujours là. Elle brillait comme pour me réconforter de ne pas avoir pu mieux goûter le sang chaud. Maintenant, je savais ce qu'il fallait que je fasse. Je ne dépendais plus de l'Alpha. Je fis un grognement d'au-revoir à ma meute et me dirigeait vers ma maison. Une fois dans le salon, mon corps se retransforma.

Je pleurais. On disait que les hommes ne pleuraient jamais. Mais je m'accordai une exception pour cette fois-ci. Je venais de me retransformer en humain. Tout ce que je venais dans faire sous ma forme de Loup était gravé à jamais au fer rouge dans ma mémoire.

J'avais tué une fille.

Ayant éclaté mes vêtements dans la cour en me transformant en Loup, j'étais désormais un humain tout nu. Et j'avais froid. La nuit dernière,  j'avais découvert des habits dans l'armoire de ma chambre. Ils étaient un peu grand pour moi, mais il était hors de questions que je reste nu. J'enfilai donc un t-shirt blanc et un jean un peu large. Je remarquai qu'il y avait aussi les même baskets que les miennes. Je les sortis en prévision pour le lendemain.

- Les Loups-Garous se rendorment, ordonna la voix du meneur.

La fatigue que je ressentais à chaque fois après une phrase de ce genre m'envahie. Je me couchai donc dans mes couvertures, en pleurant pour l'âme innocente que je venais de briser.

Venez Jouer Au Loup-Garou Grandeur NatureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant