Chapitre 1

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Ville d'Altara, milieu de la nuit.

Je reculais vivement contre le mur de cette ruelle sordide proche de la boite d'où je venais de sortir, et qui était également mon lieu de travail. Moi, Riku, jeune barman de 23 ans, repoussais vivement les mèches de cheveux bruns qui venaient se coller à mon front. Parce que je suais pas mal, et le problème dans l'histoire c'était que je ne savais pas si c'était de peur ou d'excitation. Il faut dire que le mec en face de moi y était pour beaucoup.

Tout mon être trembla une nouvelle fois tandis que l'homme qui m'avait abordé, et accessoirement plaqué contre la benne à ordure, me fixa plus intensément encore. Il était globalement...beau, ses longs cheveux de feu tressés en plusieurs endroits lui donnaient un charme exotique. Je sentais comme une odeur de cannelle à mesure que je continuais mon observation, il était grand, plus que moi, mais devait rester dans ma tranche d'âge, et je n'avais aucun mal à voir qu'il était du type sportif. Je sentis le besoin de respirer, ayant retenu ma respiration jusque-là, et inspirait l'air frais de la fin de soirée à grand renfort de cannelle épicée.

- Tu es un sacré enfoiré toi ! Me dit-il alors avec une colère évidente dans la voix.

- Hé ?

- Tu te chopes mes proies les unes après les autres et tu t'en tapes aucune ?!

Je ne voyais pas du tout où il voulait en venir, sans doute entendait-il des femmes par le terme « proies », mais je n'en avaispas dragué tant que ça, et avais surtout passé la soirée à refouler des gros lourds. C'était pareil à chaque fois que je sortais, mais j'avoue qu'après avoir fait plusieurs soirées de suite et un remplacement, j'avais eu envie de me vider la tête. Je me revoyais danser avec une femme puis une autre, ensuite un gars m'avait abordé, et il était pas mal donc j'avais suivi le mouvement. La musique était vraiment entêtante, et je percevais un soupçon de timidité, il n'avait pas l'habitude d'être en boite, ça se voyait. Je ne savais pas ce qu'il était venu y faire mais j'eus pitié de lui et continuai de me l'accaparer. Oh ! Ça me revenait, l'homme devant moi était là aussi ! Je l'avais remarqué vaguement parce qu'il semblait fixer mon partenaire de dance floor. Son regard était étrange et je m'étais surpris à vouloir « protéger» l'autre. Un réflexe étonnant pour moi qui n'avait pas la fibre «interactionnelle » très poussée.

POV Inconnu.

Il me jeta un regard froid avec l'expression féroce de celui qui défend sa proie. S'il croyait m'avoir à ce jeu là ! Personne ne surpassait un incube quand il était décidé sur son prochain repas. J'avais choisi cette boite pour sa fréquentation variée et sa cote qui était l'une des meilleures en ville. Rien qu'à l'entrée de l'établissement, j'avais repéré plusieurs proies potentielles, une blonde pulpeuse, une brune bien en chair...allons allons, quoi d'autre encore pouvais-je trouver ? Mes congénères m'avaient suffisamment fait remarquer que j'étais en manque flagrant d'énergie depuis quelques semaines. La chasse reprenait donc ce soir, plus intense que jamais, et mes yeux se fixèrent sur un petit puceau qui dansait aussi bien qu'il pouvait, collé à ce grand brun, pas moche non plus. Je n'y avait pas prêté attention sur le moment mais ce gars brun m'avait déjà détourné d'une ou deux proie au début dela soirée.

Mon instinct criait vengeance, « j'ai faim » aussi, et j'amorçais ma démarche féline, l'air se saturant de mes superbes phéromones depuis assez longtemps quand ma proie se jeta sur mon adversaire. Je me refusais à l'admettre mais j'étais resté bouche-bée une bonne minute. Mon petit puceau embrassait ce foutu brun à pleine bouche avec l'énergie vorace du désespoir.

Quelque chose ne collait pas, je vis le brun sourire fugacement avant de repousser gentiment le plus jeune. Il lui chuchota un truc à l'oreille, qui fit rougir légèrement l'autre, devais-je m'avouer vaincu ? Il était clair que l'un était sous le charme et... mais qu'est-ce que ?! Le brun retourna seul vers les vestiaires, sans un regard pour le pauvre bougre qui alla s'asseoir au bar, bouleversé. Cet homme n'était pas normal ! On ne chauffait pas un gars pour se casser ensuite sans demander son reste ! Quand bien même il n'était pas gay, il n'aurait pas fallu qu'il danse ainsi auprès de lui, étais-je donc tombé sur le sadique du coin ? Furieux et frustré, je décidais d'en faire mon prochain quatre heure ! Il allait voir comment se terminait une vraie soirée comme celle-ci, au lit et en sueur, il hurlerait pour que je le laisse venir ce petit bâtard !

Il me fût pas difficile de le pister, il n'avançait pas vite et son odeur était particulièrement alléchante. Oh oui, il ferait aussi bien l'affaire, de toute façon, ça n'était plus qu'une question de survie, mes goûts passeraient outre. Le vent dégagea sa nuque un instant et je me sentis plus prédateur que jamais. Je le poussais vivement dans une ruelle adjacente et libérais mon indicible aura d'incube, il serait mien, c'était certain, ses petits yeux bleus apeurés achevèrent de le confirmer. Sans dire un mot, je m'avançais vers lui en lui coupant toute retraite possible, la rue étant un cul de sac, il aurait tôt fait de se rendre compte de sa fin proche. Se plaquant contre le mur, il sembla réfléchir et se passa la main dans les cheveux. J'eus un sourire satisfait quand il me détailla lentement, avait-il réalisé qu'il se faisait agresser ou bien ? Alors je lui fis part de mon mécontentement suite à son comportement, et il ne comprit pas, évidemment. Il bredouilla des excuses avec un sourire contrit, lâchant vaguement que ce n'était pas son genre. Mes lèvres s'étirèrent lentement et il trembla une nouvelle fois, je lui faisais donc de l'effet, c'était bon à prendre.

- Ton adresse.

- M..mon.. ?

- Oui, je ne prends pas les gens dans la rue habituellement, enfin, ça c'est déjà produit mais ce n'est pas vraiment ma marque de fabrique.

- Prendre... Comment ça prendre ?

-Allons, tu ne pensais tout de même pas t'en sortir indemne si ?J'ai faim vois-tu...

- Vous êtes cannibale ?

- Et toi étrangement calme.

- Vous..vous allez vraiment me-

- Tu as trois secondes pour me conduire chez toi ou je te défonce contre cette benne à ordure.

Il inspira grandement dès qu'il se rendit compte qu'il avait encore cessé de respirer et me fit signe de le suivre. Je lui ôtai toute envie de me fausser compagnie à l'aide de menace et d'aura. Nous arrivâmes devant un immeuble relativement en bon état, non loin de la boite de nuit. Appartement au troisième étage, plutôt bien décoré vu le peu de meubles, célibataire endurci à première vue. Juste à première vue. Je me sentis plaqué contre le mur à peine après avoir franchi la porte, le brun se tenait à dix centimètres de mon visage, le sourire satisfait.

- On enlève les chaussures Monsieur le beau gosse, pas questionde passer le balai ! Vous voulez boire un truc ? J'ai vodka, gin, martini, jus de fruits haha non je rigole !

Voyant que je ne bougeais pas, il s'approcha de moi et se baissa lentement sans me quitter des yeux, ce qui eût pour effet de faire s'écarquiller les miens.

- Je vous mets dans l'ambiance si vous voulez...D'abord...on se penche vers les chaussures, commença-t-il d'une voix grave, mon regard descendit vers lui qui touchait sensuellement mon mollet. Le monde à l'envers ! Ce n'était pas l'effet que je produisais habituellement et ça me dérouta un peu. Mais je n'allais pas laisser ce gamin faire ce qu'il voulait, c'était lui la nourriture nom de !

- Ensuite...on dénoue les lacets, continuait-il avec un amusementnon feint. Je lui pris les mains et me déchaussais en deux secondes, le fixant avec une lueur joueuse.

- Je ne suis pas venu pour une leçon de courtoisie, fis-je en le dévorais intentionnellement des yeux, à en faire pâlir un moine. Je le vis soupirer de contentement avant de s'éloigner légèrement.

- Vous n'êtes pas si drôle en fait ! Mais bon, vous n'êtes pas trop mal...

Je me retins de m'offusquer, d'autant plus après avoir remarqué le sourire taquin qui orna ses lèvres.

Omnia Vincit Amor (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant