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Voilà maintenant deux jours que j'avais fait ma sortie nocturne. Je m'étais décidée à rester discrètes le temps de trouver une solution. Mes journées se déroulaient toujours de la même manière pour ne pas éveiller les soupçons. Des excursions hors de ma chambre seulement pour déjeuner et aller récupérer mon somnifère auprès du médecin. Malgré ma réserve et mon calme, Jacob continuait à me surveiller comme mon ombre.

À chaque attroupement de garde, je m'affolais intérieurement de peur qu'ils ne m'emmènent. Rien ne m'assurait que Jacob n'avait pas craché le morceau. Je restais vigilante, il était loin d'être un homme de confiance. En tout cas il restait neutre pour l'instant, me saluant poliment le matin, et m'ordonnant de ne pas faire de bavure le soir. Peur être avait-il peur lui aussi ? Enfin nous ne connaissions que notre sort, mais celui des hommes dehors étaient peut-être pires. À ce moment précis, j'imaginais le monde extérieur et je me disais que si réellement Jacob souffrait, il aurait réagi bien plutôt et n'afficherait pas cet air froid.

Pourtant, un après-midi, j'avais osé la question.

« Comment c'est dehors ? »

Il n'avait alors pas répondu tout de suite. Son air glacial avait laissé place à un petit pincement de lèvres. Il ne devait pas entendre souvent la question, ou alors peut-être justement trop souvent. Ses yeux avaient alors fixé le vide un instant, comme si lui-même il cherchait dans ses souvenirs la réponse.

« De l'air frais, sinon rien d'autre qui ne devrait vous intéresser Génitrice.

- De l'air, j'en rêve toutes les nuits. »

Puis il m'avait accompagné en silence jusqu'au réfectoire et notre conversation s'en était finis là.

Ce matin, je m'étais senti légèrement différente. Ma douceur et nonchalance actuelle commençaient à me transformer comme ces filles dehors. Mais en me regardant quelques secondes dans le miroir, je me retrouvais. Je me répétais qui j'étais et ce que je voulais dans ma tête. J'enfilais ensuite mes vêtements et sortais de ma chambre. Cette fois –ci, Anaïs et Juliette m'attendaient.

« Hey Danae, on t'attendait pour aller manger ! S'exclama Anaïs.

- Oui, on voulait surtout te voir, on s'inquiète pour toi. Tu n'es pas vraiment présente en ce moment.

- C'est vrai que je me sens fatiguée... Puis... »

Je jetais un œil à Jacob qui se trouvait à quelque mètre de nous. Il ne bougeait pas, mais je savais qu'il nous écoutait.

« Je m'inquiète pour mon amie que j'ai perdue pendant le test GeX, ajoutais-je.

- Je pense qu'il n'y a pas de raison. Elle est sûrement dans un autre centre pour être appelée comme Génitrice. Me rassura plein d'espoir Juliette.

- Oui tu as raison. »

Anaïs ne répliqua rien. Peut-être qu'elle aussi avait ce type d'horrible pensée à l'encontre de sa sœur. J'espérais au fond de mon cœur que Juliette disait vrai, même si je savais que les vraies réponses seraient beaucoup plus sombres.

On partait ensuite en direction du réfectoire. J'écoutais les conseils beautés de mes deux amies avaient pu découvrir au carrefour de la pile de magazines qui se trouvait dans chaque pièce de l'institut. Apparemment, les Géniteurs aiment les femmes fines et souples qui aimaient prendre soin de leurs peaux. Me voilà avec des informations qui me faisaient une belle jambe dit donc. Habituellement j'aurais rétorqué un je m'en contre fiche, ou à quoi bon, mais en la présence de Jacob, je souriais et acquiesçais bêtement.

En rentrant dans la pièce remplie de monde, je remarquais depuis ces deux jours des regards et des chuchotements à mon encontre. Quelque chose avait changé. Elles avaient peur de moi, ou alors cela se savait. Je faisais mine de rien et allais chercher mon plateau. La contenance était toujours équilibrée sans matière grasse, ni sucre superficiel. Fade, voilà le seul goût qui me restait en bouche.

GenitriXOù les histoires vivent. Découvrez maintenant