Combien pèse l'amour ?

Partie 3 - Luna

Samedi & Ice Tea

« Ma petite sœur s'est trouvée un mec ! Oh j'y crois pas ! Elle a un mec ! Enfin !
- Mais arrête ça bon sang ! J'te dis que c'est pas mon mec !
- Pourquoi tu mens à ta grande sœur comme ça ? T'as pas honte ?! »

Penchée sur mon bureau à scruter ma feuille de mathématiques incompréhensible à la lumière de ma lampe de chevet, j'avais lâché un soupir si long et si fort qu'on pouvait l'entendre jusqu'à l'autre bout du couloir de l'appartement, où se trouvait la salle de bain dont mon aînée avait laissé la porte ouverte ; une sale habitude que l'on finissait par prendre lorsque l'on vivait exclusivement entre soeurs.

« Je t'ai dit que c'est juste un mec de l'université qui a proposé de m'aider avec quelques documents administratifs parce qu'il se sentait redevable, arrête d'en faire tout un plat. En plus Inaya sera avec nous. Je savais que j'aurais pas dû te le dire... »

A peine cette phrase était-elle sortie de ma bouche, que je vis une chose difforme se pointer à l'entrebaillement de la porte de ma chambre. Maria sortant à peine de sa douche et ayant mit sa serviette de travers sous le coup de la précipitation, sa chevelure brune et ondulée partait dans toutes les directions.

Une partie de ses cheveux humides tombant sur son épaule étaient même en train de mouiller le parquet refait à neuf.

« Mariaaaaaa le parquet !
- Il est beau ? Hein ? demanda-t-elle en m'ignorant complètement. Et puis pourquoi il vient aussi tard à la maison ? Il est vingt heures passées je suis pas d'accord moi ! »

En poussant un énième soupir, je m'étais levée de mon bureau en sautillant sur ma jambe valide afin de m'occuper des cheveux en bataille de mon aînée de vingt-cinq ans de sorte qu'ils arrêtent de ruisseler sur le sol. Cela n'empêcha cependant pas cette dernière de continuer à me poser mille et une questions sur ce Vito que j'avais rencontré vingt-quatre heures plus tôt. 

Heureusement que je ne lui avais pas raconté la pseudo déclaration de ce mec que Jepherson m'avait envoyée, elle en serait devenue hystérique, même si finalement cela s'était soldé par un très affligeant « je plaisante ! tu étais tellement dans la lune que j'ai voulu te ramener sur terre... vu ta tête, ça a fonctionné ! ». Sans mentir, il ne m'avait même pas surprise, juste irritée. Je savais que sa demande subite puait l'arnaque, c'était toujours comme ça avec moi. Avec son physique, il n'allait certainement pas flasher sur la fille rondouillette présidente du bureau des élèves, on était pas dans un manga ou dans un drama coréen. Comme pour Mike...

Je ne l'avais d'ailleurs pas raconté à Inaya non plus de peur qu'elle y attache trop d'importance, et moi aussi par la même occasion. Quoiqu'il en soit, ne pensons plus à cet idiot dont je ne connaissais même pas le prénom ; il me ramenait à penser inutilement à quelqu'un que j'aurais voulu enterrer dans le cimetière des noms oubliés.

D'ailleurs, en parlant de changer de sujet, je me demandais pourquoi Inaya n'était pas encore arrivée...

« Assis-toi, ta cheville n'est pas guérie, m'avait  soudainement ordonnée ma sœur sur son ton autoritaire d'aînée en me voyant lutter à garder mon équilibre. Bon, il est beau ?
- Ooooh... »

Mais quelle curieuse !

« Oui, ça va.
- Si tu dis ça, il est canon. Et pourquoi il vient aussi tard ?
- Parce qu'il travaille à mi-temps...
- Un mec sérieux, j'aime ça pour ma sœur. Il a intérêt à te payer votre premier resto !
- Mais... »

J'abandonnais !

J'avais si peu eu de présence masculine autre que celle de Phaël, notre unique frère aîné aujourd'hui marié et père d'une petite fille, que lorsque j'évoquais un garçon ça finissait toujours comme ça. D'un côté elle refusait que je fréquente des garçons parce qu'elle avait peur pour sa sœur cadette adorée, et de l'autre, elle voulait me voir expérimenter une relation pour pouvoir s'attendrir dessus et me conseiller. Je crois que si je me mettais en couple un jour, ma sœur en serait plus excitée que moi.