Chapitre 20 | Dernière soirée

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10 février 2016.

On y est, la dernière soirée avec mes potes. Dans cette même maison, avec ces mêmes personnes. Pour une dernière fois.

Mathieu avait organisé la soirée.

Thibault n'était pas venu. Il avait fini par se rapprocher d'un autre groupe de potes qui avaient plus d'atomes crochus avec lui que nous. On ne lui en voulait pas.

On avait tout ramené sur la table, la fameuse table en face du fauteuil sur lequel j'avais embrassé Math, les cadavres de bouteilles avaient été remplacées par de nouvelles bouteilles d'alcool pur, de packs de bières et de vin. Comme à la soirée précédente, j'ai indiqué que je voulais dormir toute seule. Qu'en plus je n'allais boire que quelques bières avant d'aller dormir, parce que je ne voulais pas risquer de réactions dangereuses avec mes anti-dépresseurs. Je finis par annoncer que c'est également notre dernière soirée, parce que j'allais me mettre en couple dans quatre jours. J'ai regardé Nathan quand j'ai prononcé ces mots. Il fuyait mon regard, un spasme traduisit son énervement. 

Je suis désolée. C'est trop tard.

Pour une raison que j'ignore, j'ai bu bien plus que je devais. Peut-être étais-je trop dans un esprit de célébration. J'ai commencé à me sentir vraiment mal, j'ai essayé de me lever, j'ai glissé, je me suis cognée. Je suis dans les bras de Math depuis un quart d'heure. Il me fait boire de l'eau à intervalle régulier. Quant à Nathan à Alex, ils carburaient désormais au vin, seul alcool qu'il restait. 

- Je vais aller dormir, les gars, dis-je. Je ne peux plus continuer, ça ne sert à rien, j'ai besoin de repos. 

Ils semblent s'en ficher. Math m'aide à me lever, puis demande à Alex de lui indiquer une chambre. Il s'exécute. Nous marchons tous les trois dans le couloir, puis Alex nous ouvre une porte au fond de tout. Le lit est situé sur une mezzanine, Math remercie Alex, qui retourne auprès de Nathan, et m'installe le plus confortablement possible. Il m'enroule dans des couvertures, pose mon téléphone près de l'escalier.

- Si ça ne va vraiment pas, n'hésite pas à m'appeler, m'envoyer un sms, ce qui va le plus vite.

Je souris.

- T'es un ange. Merci. Ça devrait aller.

Il me sourit en retour, et descend les escaliers. Je l'entends passer le pas de la porte quand il commence à parler à quelqu'un.

- Non, murmure-t-il, elle a besoin de sommeil.

- Allez, je veux juste lui dire bonne nuit.

- Ok, mais prends pas trop de temps. Elle doit se reposer.

La porte se ferme.

Des bruits de pas résonnent dans la chambre, puis l'escalier de la mezzanine grince. Je distingue les traits de Nathan dans la pénombre. Mon corps est tout engourdi, ma voix porte à peine, je veux tellement dormir. Je suis épuisée. Je n'ai pas le temps de parler, de toute façon tu sais déjà tout, tu sais que c'est trop tard, je ne veux plus te parler.

- Je suis fatiguée, dis-je tout bas. On parlera demain.

- Je ne viens pas pour parler.

Il sourit, et se laisse tomber sur moi. Ses mains tombent des deux côtés de ma tête. Je me sens mal à l'aise. J'ai besoin de respirer. Je me sens soudainement prise dans un piège. Ça me dérange.

Son souffle pèse sur mon visage. Du vin rouge. Je ne peux toujours pas oublier ce souffle. Et je hais les haleines de vin rouge.

Il m'embrasse.

Dans une mécanique assimilée au cours des mois, je lui réponds. Nathan, j'ai eu tant besoin que tu m'aimes, et ce depuis si longtemps.

Mais merde, c'est fini.

J'arrête de lui répondre, mais lui n'arrête pas de m'embrasser. 

Tout le poids de son corps repose désormais sur le mien, je suis comme paralysée, j'ai l'impression de manquer d'air, mais je ne peux pas bouger, je ne peux même pas parler. Et cette tête qui tourne tellement, mon dieu.

Nathan retire une main d'un côté de ma tête. Elle vient se poser sur mon sein. Je remue dans tous les sens. Nathan, non, bordel, non. C'est terminé tout ça.

Il se laisse encore plus peser sur moi, ses mains descendent. Mon ventre. Ma culotte. Je suis dans une panique sans nom. Ne me touche pas. Ne me touche plus.

Les effluves de vin rouge me donnent envie de vomir.

Il retire mes vêtements, libère ma bouche.

Les mots se bousculent dans ma bouche mais ne sortent pas. Ils sont comme bloqués. Tout comme l'air. Je respire très vite, et j'ai peur de faire un malaise. Je me sens si mal. L'anxiété me broie le cœur. Mes yeux s'emplissent de larmes.

- Non... Nathan... Non...

Son visage revient vers le mien, et il me sourit, je ne le vois pas, mais je le sens dans sa voix.

- Comment ça non? Tu aimes ça. Je sais que tu aimes ça.

Soudain, il m'enfonce ce que je pense un instant être ses doigts. 

Puis je réalise.

- Ça te plait, hein? Je sais que ça te plaît.

Les larmes coulent désormais. Je détourne ma tête sur l'oreiller. Je veux juste mourir. Je n'ai plus aucune force. Il broie mon corps, et je suis incapable de le repousser. Je suis incapable de crier. Je pleure et j'attends que ça se finisse, dans un silence assourdissant, où seuls ses soupirs percent, et j'aimerais qu'il crève. 

Je finis, en larmes, par le supplier d'arrêter. Je lui dis que je n'en peux plus, que je vais mourir, et on dirait que ça suffit pour mettre un terme à tout.

Combien de temps tout cela a-t-il duré? 

Je n'en ai aucune idée.

Trop de temps, beaucoup trop de temps.

Il se laisse tomber à mes côtés et s'endort. Mes forcent me quittent, et je sombre aussi.

J'ai espéré avoir rêvé le lendemain, me réveiller d'un cauchemar. Quand je me suis éveillée, avec lui à mes côtés je n'ai pas compris directement, c'était habituel, avant. Je n'ai pas réalisé. 

Alex a ouvert la porte, est venu nous éveiller. Nathan s'est directement levé, il s'était rhabillé entre-temps dirait-on, je sentis alors que j'étais nue, et je demandai à ce qu'ils m'attendent dehors. 

J'ai attrapé ma culotte, et je me suis demandé si tout cela était bien réel. J'ai ravalé mes larmes, ravalé ma honte. Mon corps était parsemé de légers bleus. Faites que tout cela parte vite. Je me suis levée, les ai rejoint. Ils étaient tous en train de comater sur un lit. Je les ai rejoint, ne sachant ni quoi faire, ni quoi dire. Nathan se tourna vers moi, me fit un câlin, puis fit glisser sa main sous mes vêtements. Je la retirai:

- Nathan, tu te souviens de hier?

- Hein?

- Putain, tu ne te souviens pas de hier?

- Il s'est passé quoi hier?

Tu m'a(b)imes.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant