Chapitre 2: Se battre pour soi-même.

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Maintenant !

Alors que mes mains étaient de plus en plus moites et ma bouche de plus en plus sèche, je regardais cette femme qui m’avait élevée, qui m’avait tout donnée pour me permettre de devenir l’homme que je suis aujourd’hui. « Ai-je le droit de lui faire ça ? », me demandais-je sans cesse. Et alors que je débattais intérieurement, ma mère commençait à se décomposer : je la faisais attendre, et elle l’interprétait comme une mauvaise nouvelle… elle n’avait peut-être pas tout à fait tort. Décidant que je n’avais plus le choix désormais, j’ouvris la bouche pour tout lui avouer :

-Maman… Ce que je vais te dire est vraiment important pour moi. Parce que c’est ma nature, c’est ce que je suis et que rien ni personne ne pourra me changer, alors c’est pour ça que j’ai besoin que tu comprennes et que tu m’acceptes. Disais-je d’une voix enrouée.

Malgré son air perdu et son visage incompréhensif, elle me prit les mains malgré leur moiteur qu’elle ne remarqua pas, puis elle me dit :

-Oui bien sûr, ce que tu voudras mon chéri.

J’inspirai, expirai, afin de calmer mon cœur qui battait la chamade :

-Maman, je suis homosexuel. Léo c’est… Léo est mon copain.

Elle me lâcha les mains, l’air encore plus perdu qu’avant. Si le stress d’avoir à lui dire était partit, l’angoisse de sa réaction était plus forte que jamais.

Alors qu’elle reculait vers la table, le regard vide, refusant de me toucher, je restais là, tel un objet attendant qu’on l’utilise. Puis d’une voix silencieuse, à peine audible, elle dit :

-Sortez de ma maison.
-Maman ?...

A l’écoute de ses mots ma gorge s’était serrée et mes yeux s’étaient remplis de larmes. Le « Maman » que j’avais prononcée n’avait été qu’un chuchotement, comme une plainte, et à ce moment-là je n’étais pas sûr de pouvoir reparler un jour.

-Sortez de ma maison, disait-elle sans même me regarder.
-Maman… je t’en prie… Regardes-moi. Je suis ton fils. Disais-je avant d’éclater en sanglots.
-Non. Vous êtes une ordure. Vous n’êtes pas mon fils. SORTEZ DE MA MAISON ! criait-elle.

Dégoûté par cette femme qui fût autrefois ma mère, je partis chercher Léo resté dans le salon : je voulais à tout prix quitter cette maison de malheur qui m’était maintenant étrangère.

Et on est partit de cet endroit.

Ce sentiment d’abandon. C’était comme un trou dans mon cœur. Cette famille qui m’a donnée la vie. Qui m’a fait vivre. Qui m’a vu grandir. Qui m’a fait devenir l’homme que je suis aujourd’hui. Elle me renie. Je suis seul. Seul et abandonné. Une pauvre merde. Un « monstre ». A leurs yeux je n’existe plus. Pourquoi ?

Je n’arrivais pas à pleurer. Quelque chose m’empêchait. Le dégout pour moi-même. J’étais dégouté de qui j’étais. Je ne voulais plus être une pédale. Je voulais plus être moi-même. Je voulais plus être en vie. J’ai commencé à trembler de peur. Léo a prit mes mains, m’a murmuré que tout irait bien. Qu’il était là, que mes parents n’étaient que des connards. Je voulais le croire, j’ai essayé tant bien que mal. Mais au fond de moi, je savais que c’était faux. On était horrible. Personne ne nous accepte et ne nous acceptera jamais. On est des déchets aux yeux de la société.

Rentré à l’appart’, je suis allé m’allonger dans mon lit. Je ne voulais pas pleurer. Je ne voulais pas parler. Je voulais juste attendre la mort. J’en revenais pas qu’ils aient pu m’abandonner comme ça.

Léo s’est allongé près de moi et a commencé à me serrer fort. Me murmurant qu’il m’aimait. Cool. Mais c’était pas de son amour dont j’avais besoin à ce moment là. J’avais besoin de ma mère. De mon père. J’avais besoin d’eux pour me rassurer. Pour me dire qu’il m’aimait. Pour me dire que tout allait bien se passer. Qu’ils allaient se charger de tout, comme ils le faisaient tout le temps. J’avais besoin de ma famille.

-Tu sais ton père a encore rien dit, peut-être qu’il va t’accepter…
-Ouais…

C’est possible. Mon père après tout, n’a encore rien dit. Mais il ne m’a pas appelé non plus. Lui non plus ne veut pas me parler. Il veut pas me voir. Il devrait déjà être rentré du travail, ma mère a déjà du tout lui raconter. S’il avait voulut me dire qu’il s’en foutait, il m’aurait appelé.

-T’inquiètes pas, je suis là. Toi et moi on est une famille. Il m’a serré encore plus fort.

Ca m’a frappé. Une famille. J’en ai plus. Je suis seul. J’ai plus que Léo, j’ai plus que lui. On est seul. C’est lui, moi et le monde. Nous deux seulement. Je ne les reverrai plus jamais. C’est finit. Ce ne sont plus mes parents, je ne suis plus leur fils. Mon nom ne signifie plus rien.

C’est en prenant conscience que je n’avais plus que Léo, que c’était finit, que je n’avais plus de famille, que j’ai commencé à pleurer, vraiment.

-Je t’aime.

Je me suis retourné pour le prendre dans mes bras, j’avais ni la force ni le courage pour lui répondre, mais je voulais lui montrer que j’étais encore là. Il a assuré sa prise sur moi. Et on s’est endormit.



Pendant deux jours je n’ai pas réussit à bouger de la chambre. J’ai loupé des cours, Léo me les ramenait à la maison. C’est un ange. Qu’est ce que j’ai fait pour le mériter. C’est le meilleur. Je l’aime tellement. Il est tout ce qu’il me reste. C’est lui.

Le deuxième jour, j’ai du retourner en cours pour ne pas qu’on m’enlève la bourse pour séchage. J’ai fait un maximum pour me concentrer, mais c’était dur. Je suis resté avec Léo toute la journée. J’avais pas la force d’etre laissé seul, pas encore.

A 17h, j’ai du aller au travail. C’est mon job d’étudiant pour m’aider à financer mon appart’. Je suis serveur dans un resto’ dans le 4e. C’est de la merde. Les gens sont des connards. Mais c’est tout ce que j’ai trouvé. En plus, c’est à coté de la fac.

J’avais pas envie de bosser. Mais il le fallait. Avant d’aller au boulot, j’avais consulté mes comptes à la banque. Mes parents m’ont coupés les vivres. Putain. Ca m’a mit le moral au plus bas. Ce sont vraiment des connards. Je les hais autant qu’ils me haïssent. Pourtant, j’ai toujours cette envie en moi qu’ils m’appellent pour s’excuser, pour me dire qu’ils m’aiment. L’espoir fait vivre après tout.



Je suis sortit du boulot à 3h, j’étais épuisé. Je m’étais fait 20€ de pourboire. Génial. Arrivé à l’appart’, Léo était déjà endormit. Je me suis déshabillé, j’ai prit ma douche et je me suis écroulé dans le lit. Avant que je m’endorme j’ai entendu :

-Comment ça c’est passé ?
-Comme d’habitude. De la merde.
-Hm…
-Au fait, mes parents ont coupés les vivres.
-Je suis désolé Marc…
-T’inquiètes.
-Je t’aime.
-Moi aussi, à demain.

Je me suis endormit.



Quelques jours ont passés depuis que mes parents m’ont renié. Ca fait toujours mal, mais Léo m’a convaincu que malgré tout c’était mes parents et qu’ils avaient pas le droit de me traiter comme ça. Que c’était pas ma faute, que je devais me battre pour qui j’étais. Que je devais pas me laisser abattre. Alors je l’ai écouté. Parce que je l’aime. Parce que je lui fais confiance et que je sais qu’il a raison.

Cet après-midi là une de mes amis, Clèm’, est venue pour me dire qu'y avait une super fête ce soir chez elle. Elle est connue pour ses fêtes du genre drogues, alcool, … Mais j’avais besoin de changer d’air. J’en pouvais plus de faire appart’-boulot-cours, en plus je sentais que Léo aussi voulait s’amuser un peu. A 20 ans être enfermé comme on le faisait quand tout nos potes s’amusent, c’est vraiment invivable.

En rentrant j’ai soumit l’idée à Léo, un peu sceptique au début, parce qu’on savait tout les deux le genre de personnes qu’il y aurait là-bas. Mais en insistant bien sur le fait que j’en avais besoin et en lui répétant plusieurs fois que j’avais besoin qu’il me soutienne, il a finalement accepté.

Alors, on est allé à cette soirée, finalement.

Arrivé dans le couloir de l’appart’, on entendait déjà les basses de la musique à travers les murs. Léo m’a regardé un grand sourire sur les lèvres :

-Apparemment elle n’a pas de voisins !

J’ai lâché un petit rire. On à toqué. Clèm’ est venue nous ouvrir, ce qui m’a un peu surprit d’ailleurs étant donné la puissance de la musique. On est rentré, on a déposé dans la cuisine les bières qu’on avait spécialement acheté.

-VENEZ MES PEDALES ! Nous cria Clèm du salon transformé en « piste de danse ».

J’ai regardé Léo avec un grand sourire.

-On y va ?
-Ai-je vraiment le choix ?

Il a rit. J’avais pas besoin de plus. J’ai prit sa main et je l’ai tiré sur la piste de danse improvisée. On a commencé à se bouger sur de la techno. Le genre de musique qui met votre corps en transe. Ce genre de musique qui, quand on l’écoute, vous n’êtes plus de ce monde. La musique a infiltrée chaque parcelle de mon corps, je dansais peut-être mal, mais j’en avais rien à foutre. J’étais ailleurs, j’avais les yeux fermés, seul la musique importait. J’étais plus de ce monde. Je dansais au rythme de la musique. 

J’oubliais tout. Ce sentiment d’abandon, ce trou dans mon cœur avait disparu. Je ne voulais pas que ça s’arrête. Je voulais encore plus. Alors j’ai enchainé les verres. Et j’ai dansé. Danser à ne plus m’arrêter, danser à en avoir mal au pied. Danser à en transpirer. J’aimais ça, je m’éclatais. Léo aussi, je crois. J’ai pas trop fait attention, mais je sais qu’il veillait sur moi, comme toujours quand je me lâche comme ça.

A un moment j’ai eu besoin de me passer de l’eau sur le visage. Je suis allé dans la cuisine, j’y ai vu Clem’ avec de la coke. Je me suis approché d’elle. Elle m’a regardée, m’a sourit et m’a dit :

-T’en veux ?

Je sais pas si c’est la musique, ma transe, l’alcool, les problèmes ou bien tout ça rassemblé en même temps, mais en tout cas la dernière chose dont je me souviens c’est avoir répondu :

-Oui.

Ce que tu es.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant