4 : Poison.

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« Je suis immortel. Je ne peux pas mourir. Tu pourras tenter de me tuer encore et encore mais à chaque fois que tu penseras que c'est la fin, je renaîtrai de mes cendres. Jusqu'à la fin de ta vie tu devras me supporter, jusqu'à la fin de ta vie mes mensonges seront tes vérités. Jusqu'à la fin de ta vie, vérité tu ne connaîtras car tu seras mienne et que tu m'obéiras. » page 53

– « Et...est-ce que tu souffres en ce moment ? Je veux dire...est-ce que tu as l'impression d'avoir une sorte de point ou quelque chose dans le genre ? » me demande-t-il subitement, alors qu'il termine tout juste d'étaler la crème anti-douleur.

– « Là, maintenant ? Non, pourquoi ? La nourriture de Jinyoung n'était pas bonne ? » me retournais-je vers lui pour le questionner. Il y avait effectivement une certaine pression qui s'était fait ressentir tout à l'heure, mais ça a complètement disparu, comme si il n'y avait rien d'anormale à cela.

– « Non. Non, j'voulais juste m'en assurer. » rit-il en m'incitant à remettre mon t-shirt. « Tu sais pour le maître...tu n'as pas à t'inquiéter. C'est toujours un peu difficile après son infiltration. Généralement, cela dur trois jours avant qu'il ne s'y habitue. Le lendemain de l'injection, il est toujours froid et fatigué. Le deuxième jour, c'est l'inverse, il meurt de chaud et ne peut même pas dormir tellement il déborde d'énergie. Ça ira beaucoup mieux lundi, t'en fais pas... » me sourit-il gentillement. J'apprécie son geste. Je sais qu'il essaye de me rassurer, de ne pas me faire paniquer dès mon premier jour. Trois jour pour s'habituer à l'injection...c'est plutôt long. Surtout lorsqu'on sait qu'il doit le faire une fois toutes les deux semaines.

– « J'étais vraiment perdu tout à l'heure... Est-ce que je devrais présenter mes excuses au maître ? » pensais-je de vive voix tout en me rhabillant. Jaehwan se lève du matelas pour s'approcher de la sortie.

– « Non. Tu as vraiment bien réagis tout à l'heure. La première fois qu'il nous a fais une crise comme ça, j'étais incapable de bouger moi... » raconte-t-il les yeux rivés sur le sol. Ce doit être horrible de ne rien pouvoir faire lorsqu'on voit la personne à qui on tient beaucoup souffrir et se détériorer. Même si je pense que je finirai certainement par m'attacher au maître, je sais que j'aurai beaucoup de mal à accepter de voir quelqu'un que j'aime subir ce genre de chose. « Au fait, Sicheng...tu aimes les jeux de société ? Avec Jinyoung, on s'est dit que ce serait pas mal de manger des pizzas tout en jouant pour apprendre à se connaître. Le maître Min a dit vouloir rester dans sa chambre, on pourrait en profiter pour te dévergonder un peu ?! » propose-t-il diaboliquement comme s'il avait quelque chose en tête. J'hoche promptement la tête, heureux qu'ils désirent tout autant que moi en apprendre plus les uns sur les autres. « Bien, tu pourras descendre dans une quinzaine de minutes si tu veux. Jinyoung est en train de préparer les pizzas. »

– « D'accord, je vous rejoins alors. » lui répondis-je, presque impatient. Une fois de nouveau seul dans ma chambre, j'attrape mon téléphone portable à la recherche du numéro de Renjun, mon meilleur ami. J'ai rencontré Renjun lorsque j'avais sept ans. En grandissant, j'ai fini par m'habituer à sa présence et à son humeur atypique. Alors quand mes parents m'ont annoncé qu'ils allaient voyager un peu partout autour du globe, j'ai immédiatement forcé Renjun à partager un petit appartement avec moi. Il n'est pas très grand et pas très bien situé vu l'animation du quartier dans lequel nous sommes mais en gardant à l'esprit que c'est à Shanghai, je pense qu'on s'en est bien sorti. Il travaille en tant que barista dans un café plutôt réputé de la capitale, cependant, son salaire reste radicalement médiocre pour le talent qu'il possède. Renjun est quelqu'un de très changeant. Il est parfois tellement rayonnant, tellement joyeux puis dans les secondes qui suivent, il peut devenir exécrable voire même extrêmement détestable.

– « Espèce d'enfoiré ! T'étais pas censé m'appeler hier soir, hein ? C'est toi qui m'a dis que dès que tu serais arrivé, tu m'appellerai, espèce de con idiot ! » rage-t-il avant même que je n'ai le temps de dire quoique ce soit. Un large sourire s'étire sur mes lippes, heureux de pouvoir entendre sa voix. Si il y a bien une personne qui me connaît mieux que personne, c'est lui. Renjun, c'est un peu mon âme-sœur, ma moitié.

– « Je sais, j'suis désolé. Tout s'est fait très vite, j'ai pas eu l'temps de t'appeler... Mais t'aurai très bien pu l'faire, toi ! » rétorquais-je pour le taquiner. J'entends Renjun se moquer méchamment, comme si je l'avais insulté en faisant ce genre de supposition.

– « Dans tes rêves, gamin ! T'as déjà oublié que j'étais en colère contre toi ?! Espèce d'imbécile... » soupire-t-il, exaspéré par mon comportement. Il est tellement introverti que même si je décidais de ne plus l'appeler, Renjun ne le ferait pas à ma place. Ce serait signe qu'il tient plus à moi qu'il ne le souhaite réellement.

– « Rancunier, va... » pouffais-je de rire, d'un air attendrissant. Malgré son mauvais caractère, j'ai toujours eu beaucoup de respect pour lui.

– « Oui, j'suis rancunier, connard ! Mais c'est toujours mieux que d'être égoïste, nan ? » me lance-t-il sans gêne. Lorsque j'ai annoncé à Renjun que je ressentais le besoin d'aller trouver l'homme dont s'occupait mon grand-père, il a tiré la grimace. C'était inconcevable pour lui de nous infliger une telle séparation. J'ai grandi avec lui, alors il est évident que sa présence va énormément me manquer. Je vais avoir du mal à m'habituer à son absence et à l'écart qui nous sépare mais c'était comme vital pour moi. La curiosité m'a ardemment poussé à venir jusqu'ici. J'avais envie d'aller analyser la grandeur de mère-nature de mes propres yeux, je voulais découvrir cette tempête dont mon grand-père m'avait parlé dans sa lettre, comprendre de quoi il me parlait, ce qui se cachait ici. « Bon, vu que t'es toujours en vie, j'vois pas l'intérêt de prolonger cette conversation... » Quel enfoiré... Il va vraiment jouer au gamin encore longtemps ?!

– « Ren...t'as même pas envie de me questionner sur l'endroit où je suis ? Y'a pourtant beaucoup à dire, si tu savais... » tentais-je de le dissuader de raccrocher, d'un ton joueur. J'aimerai lui parler de ce qui s'est passé aujourd'hui, de l'état du maître Min, de Jaehwan et des autres, de tout ce que je ressens depuis que je suis arrivé ici hier. Pourtant, c'est comme si mon cœur me soufflait de ne pas le faire. Comme si j'avais la profonde envie de garder tout ça secret, rien que pour moi.

– « J'ai envie d'aller dormir, il est tard. » me ment-il froidement. Je sais que même si j'en plaisante, Renjun a mal pris mon départ. Je sais que cela va forcément impacter sur notre relation. Je ne sais pas combien de temps je compte rester ici, j'espère seulement que lorsque je rentrerai, Ren sera encore là pour moi.

– « Menteur, il n'y à qu'une heure de décalage entre ici et Shanghai. D'ailleurs, il n'est que dix-huit heure chez toi. Puis tu bosses à dix-neuf heure. » soufflais-je, exaspéré par son attitude.

– « J'essaie juste d'éviter d'te parler, tu pouvais pas l'comprendre tout seul ? » se plaint-il, ce qui me fait drôlement rire en réalité. Visiblement, il va lui falloir un peu de temps pour se faire à ma décision. Mais je sais que cela ne tardera pas. J'avais l'habitude de tout faire avec lui, alors il finira certainement par ressentir un manque et par m'appeler d'impatience. Du moins, je l'espère.

– « Je sais que j'te manque déjà. Toi aussi, tu m'manques, tu sais... C'est difficile de se réveiller et de remarquer que tu n'es pas là... » confiais-je sincèrement. Renjun occupait toutes mes pensées et toutes mes journées. Dès qu'il était absent, je ne pouvais m'empêcher de lui envoyer un message pour lui demander ce qu'il faisait, où il était, si sa journée de travail c'était bien passé. Je suis indéniablement attaché à lui. Chacune de mes humeurs se basaient impeccablement sur lui. S'il était en colère, je devenais compréhensif et plaisantin, s'il était d'humeur mélancolique, je lui ressassais nos souvenirs en boucle pour le faire sourire. J'essayais par tous les moyens de m'entendre avec lui parce que j'avais le sentiment de le lui devoir. Il avait toujours été là, et c'était ma façon à moi de le remercier de pouvoir me supporter.

– « T'essaie d'me faire pleurer ? Parce que c'est complètement raté. » ronchonne-t-il de son irrévocable air hautain. C'est une étrange relation qui nous unit. Les gens ne comprenaient pas toujours pourquoi je m'obstinais à vouloir être son ami, pourquoi est-ce que je me devais de supporter son humour noir et sa mauvaise humeur plus que massacrante. Mais en réalité, c'est parce que je le connais. Parce que je suis l'une des rares personnes en ce monde à avoir la chance de connaître le vrai Renjun, dans toute sa splendeur, ses qualités comme ses défauts.

– « Je t'emmerde, Ren. » ricanais-je légèrement. Ce qu'il peut être con, cet idiot...

– « Oui, c'est exactement le terme. Aller, raccroche espèce de mioche. » me lance-t-il promptement pour se débarrasser de moi.

– « On a le même âge, tu... » L'enfoiré. Il a raccroché avant même que je ne puisse terminer ma phrase. Satisfait, je me sens de nouveau de bonne humeur. Malgré la journée que j'ai dû vivre aujourd'hui, grâce à Ren, j'ai retrouvé l'espoir et l'envie folle de me consacrer à mon travail pour le maître. Je sais que je pourrai toujours compter sur Ren pour me remonter le moral par ses mauvais jeux de mot et son rire sarcastique. Personne n'a jamais pu détrôné la place qu'il détient dans mon cœur...c'est fusionnel entre nous.

– « T'es là ! Assieds-toi, les pizzas sont prêtes ! » s'exclame Jaehwan, tout excité à l'idée de faire une soirée jeu. J'ai enfilé un gilet puis rejoins les autres au rez-de-chaussée pour proposer mon aide, mais on dirait bien que Bonhwa avait déjà tout préparé lui-même. Ils ont allumé les deux énormes cheminées présentent dans la pièce, donnant à cette soirée une ambiance intime et chaleureuse. Bora est assise dignement, les cheveux détachés, le visage fermé. Elle ne semble pas réellement d'humeur, son aura fait presque contraste avec la mienne. Jaehwan et Jinyoung, eux, sont aux anges de pouvoir tous nous retrouver autour de cette table, hormis le maître bien sûr.

– « Il va bien ? » osais-je malgré tout demander à Bora, qui est visiblement concentrée sur son magazine. Elle soupire fortement, ne cachant pas du tout le fait que je sois en train de la déranger dans sa lecture, tandis que les trois autres s'activent à tout apporter sur la table à manger.

– « Pourquoi ne t'es-tu pas arrêté dans sa chambre pour le lui demander ? » me répond-elle sèchement. Je me sens soudainement coupable, comme si j'avais commis l'irréparable tout à l'heure. Je ne pensais pas que Bora m'en voudrait autant mais je suppose qu'elle choisi simplement de rejeter sa peur sur moi. La peur qu'elle a pu ressentir lorsqu'elle a reçu cet appel de Jinyoung... J'inspire profondément et m'installe studieusement sur ma chaise, sans pour autant montrer qu'elle a parfaitement réussi à me faire culpabiliser. Pour dire vrai, j'étais juste apeuré à l'idée qu'il ne me balance je ne sais quoi à la figure pour me faire regretter mon geste déplacé, si j'avais osé aller lui demander des nouvelles. Il est préférable pour moi d'attendre demain pour en discuter calmement avec lui.

– « Alors Sicheng, tu as dis que tu étais serveur dans un restaurant à Shanghai. Mais, qu'est-ce que tu prévois de faire de ta vie ? » m'adresse Jinyoung alors qu'il fait avancer son pion sur le plateau de jeu. C'est assez honteux de devoir répondre à ce genre de question. J'ai toujours été complexé par mes ambitions futures. Je ne sais pas quoi faire de ma vie, mais une chose est sûre, j'ai envie de faire de grande chose, d'inscrire mon nom dans l'histoire. Je veux que les gens se souviennent de moi.

– « J'sais pas trop... Mes parents voulaient que j'me lance dans la médecine comme mon grand-père et mon père mais c'était pas trop mon truc les études. » souriais-je, plutôt embarrassé. Le sourire adorable qu'arbore Jinyoung vient rapidement me détendre, signe qu'il ne cherchait sûrement pas à me juger en posant la question.

– « Il est médecin ton père ? » répète Jaehwan, visiblement partagé entre l'admiration et la surprise. C'est si difficile à croire ? J'imagine qu'il s'attendait à quelque chose de plus simple et de moins sérieux vu mon activité professionnelle passée.

– « Oui, il était chirurgien mais il a décidé de faire une pause pour l'instant. » racontais-je. Lorsque mon grand-père est décédé, mes parents ont touché une grosse somme d'argent. Mes grands-parents vivaient aisément autrefois, alors avant sa mort, mon grand-père a décidé de leur offrir un long voyage autour du monde. J'étais attristé de constater que je n'étais pas concerné par ce cadeau. Mais j'ai simplement supposé qu'il souhaitait qu'ils se retrouvent en intimité tous les deux, qu'ils profitent de ces moments pour rattraper le temps perdu au travail.

– « Ta grand-mère était scientifique, ton grand-père était médecin traditionnel et ton père, chirurgien... Ça en fait des gens intelligents dans ta famille. » remarque gentillement Jaehwan. C'est sûr que comparé à moi, ils avaient bien plus d'aspiration. J'ai grandi dans une famille où l'entraide, le partage avec l'autre, le respect de la vie, avaient une importance considérable. J'ai toujours qualifié ma famille de gens bien. Parce que je savais qu'ils œuvraient pour la découverte, la vie, l'amour. J'avais peur de les décevoir après avoir obtenu mon examen mais en réalité, je sais qu'ils comprenaient mes choix et qu'ils les acceptaient amplement.

– « Mon grand-père vous avait déjà parlé de ma grand-mère ? » leur demandais-je, surpris.

– « Oh, hum...à vrai dire, le maître connaissait ta grand-mère avant ton grand-père. » commence le blond, hésitant. Ma grand-mère avait déjà rencontré le maître ? Pourquoi ne m'en a-t-on jamais parlé ? C'est étrange que mon père n'est jamais cherché à me le faire savoir. « Hum...c'est les parents du maître qui avaient fait appel à elle pour leur demander de trouver un traitement pour sa maladie. » continue-t-il d'expliquer. Depuis combien d'année la maître est-il malade ? De part la conversation que j'ai échangé avec Jaehwan hier soir, j'avais pensé que Monsieur Min était tombé malade quand il avait entre dix et quinze ans mais...si mon grand-père l'a rencontré lorsqu'il avait six ans... D'après mes calculs, ma grand-mère l'aurait connu juste avant, voire même dès sa naissance...

– « C'est comme ça que ton grand-père a entendu parler de Yoongi. Et c'est d'ailleurs pour ça qu'il est venu jusqu'ici pour veiller sur lui. » ajoute Bora, participant enfin à la conversation alors qu'elle avait décidé de jouer les muettes depuis le début de la soirée.

– « Je vois... J'ignorais ça... Et donc...les parents du maître, où est-ce qu'ils... »

– « Ils sont décédés. Un peu avant que Dong Kuanti ne vienne vivre ici. » me répond tristement Bonhwa. Je m'en doutais fortement. Mon grand-père n'a jamais évoqué les parents du maître dans ses lettres alors je suppose qu'ils ont quitté ce monde depuis quelques années déjà. Je prends conscience que Min Yoongi a vraiment dû vivre de douloureux moment durant toute sa vie, et cela me chagrine d'autant plus lorsque je repense à son état de son santé.

– « Mais parlons de chose plus joyeuses ! Tu avais quelqu'un à Shanghai ? » s'intéresse Jaehwan, en me faisant signe de lancer le dès. Je ne suis pas surpris par sa question mais plutôt par la manière indélicate qu'il a de changer de conversation...

– « Oui... On a dû se séparer pour que je vienne ici. » marmonnais-je, assez gêné. Les autres écarquillent tous leurs yeux, étonné de penser que moi, j'avais réussi à me trouver quelqu'un. Pourquoi ça les surprend d'ailleurs ?

– « Elle était belle ? » sourit malicieusement le blond, d'un regard qui en dit long.

– « Jaehwan ! C'est irrespectueux ! » intervient monsieur Park, toujours aussi offusqué que Jaehwan me parle avec tant d'aisance. Moi, même si je suis généralement très pudique sur mes sentiments amoureux, je suis assez content de savoir qu'il ne me voit pas seulement comme le petit nouveau. Jaehwan essaie d'apprendre à me connaître et de m'intégrer à cette maison. Je lui en suis infiniment reconnaissant pour ça.

– « Quoi ? J'demande, c'est tout... » grogne-t-il avant de venir mordre dans une nouvelle part de pizza.

– « Et vous ? » osais-je tout de même demander. Les quatre autres me dévisagent, choqué de me voir aussi concerné par eux.

– « Ah, euh...ben nous, on a pas trop le temps pour ça. » ricane le brun, les joues rouges. Je suppose que si finalement... J'attendrai d'être un peu plus proche de lui pour le questionner là-dessus.

– « Je vois... Au fait, il y a quelque chose qui me préoccupe beaucoup depuis hier. Les fleurs qu'il y a juste dehors, comment se nomment-elles ? J'ai essayé de chercher quelque chose sur internet mais j'ai rien trouvé... » Étant particulièrement intéressé par les fleurs, et encore plus lorsqu'elles sont d'un vert aussi vif, j'ai tenté de m'informer sur leurs origines et conditions. Mais rien, pas moyen de trouver la moindre trace de cette espèce de fleur.

– « Ce sont des agust. Des agust D, pour être plus précis. Ce sont des fleurs génétiquement modifiées, elles ont un pouvoir apaisant. C'est votre grand-mère qui les a créée. » développe Bonhwa. Ma grand-mère ? Pourquoi irait-elle créer des fleurs ? Je me demande quel genre de relation mes grands-parents entretenaient avec la famille Min. J'ai l'impression qu'ils étaient très impliqués ici...

– « Et pourquoi 'agust D' ? » C'est un sentiment étrange qui m'habite en ce moment. Je ne suis pas du genre parano généralement mais la légère compression que je ressens au niveau de ma poitrine me donne une mauvaise impression. Comme s'ils essayaient de me cacher quelque chose, ou pire de me mentir sur les réelles intentions de mes grands-parents. Peut-être suis-je trop méfiant à leur égard ?

– « Le D, c'est pour signifier que c'est la quatrième génération. Les trois autres sont mortes depuis bien longtemps, il n'y a que celles-ci qui arrivent à survivre. » révèle-t-il. Quatre génération de fleur ? Donc cela signifie qu'il y a eu quatre essais ? Pourquoi engager ma grand-mère pour trouver un antidote à la maladie du maître et en profiter pour lui demander de créer des fleurs ?

– « C'est vrai que tu es passionné par les fleurs...ton grand-père nous l'avait dit. » marmonne Bora, toujours aussi peu motivée à passer la soirée avec nous.

– « Oui, à cause de ma mère. J'emmène partout avec moi ma Dahlia verte, j'y tiens beaucoup. C'est un peu idiot, mais elle me rappelle ma famille. » riais-je, nerveusement.

– « Ah oui, il me semble l'avoir déjà vu. » précise Jinyoung, d'un hochement de tête.

Nous avons continué à enchaîner les pizzas mais aussi les jeux de société et pour une fois, la chance était de mon côté. Je n'ai pas cessé d'enchaîner les victoires, à croire qu'ils s'amusaient à me laisser gagner tellement cela me paraissait dingue.

– « Du coup, puisque j'ai déjà demandé à Jaehwan, comment avez-vous rencontré le maître ? Et pourquoi avoir décidé de venir vivre ici ? » les questionnais-je alors que Jinyoung revient tout juste de la cuisine avec le dessert. Bora est littéralement en train de tirer la tête, certainement car elle est mauvaise joueuse, tandis que Bonhwa et Jaehwan eux, semblent sincèrement heureux de passer la soirée tous ensemble.

– « A la piscine. Il venait pour faire de l'exercice...et moi aussi. » sourit narquoisement Bora en attrapant une part de tarte. Est-ce qu'elle se fout de moi ?

– « Moi, c'était en sortant d'un restaurant où je travaillais. Il m'a complimenté sur ma cuisine. » ajoute rapidement le brun pour capter mon attention. Comment peut-on se lier d'amitié avec quelqu'un, venir travailler pour lui seulement parce qu'on a, par pur hasard, échanger une conversation avec lui ? Quoique je ne peux pas réellement dire quelque chose. Je suis bien devenu l'un de ses serviteurs seulement parce que mon grand-père m'invitait à le faire...

– « Et vous, Monsieur Park ? » insistais-je pour connaître la réponse de chacun. Eux, ils connaissent ma vie mieux que je ne connaîtrais jamais la leur si je ne commence pas à leur poser quelques questions. Après tout, ils avaient la chance de pouvoir côtoyer mon grand-père tous les jours, alors j'aimerai réellement me lier d'amitié avec eux. Notamment avec le maître, il semblait important aux yeux de mon grand-père.

– « J'ai eu un grave accident. Le maître était présent sur les lieux, il m'a sauvé la vie... » Bien évidement, son histoire me touche. Maître Min est tellement froid, tellement distant de ses sentiments et ressentis, que jamais je n'aurai pu penser qu'il ai un cœur chaleureux sous ce corps pâle.

– « Winwin, tu veux bien monter ça au maître ? Je pense qu'il devrait manger un peu. » me revient Jaehwan de la cuisine, une assiette en main. Winwin ? Je l'interroge d'un regard un peu perdu. Pourquoi m'appeler comme ça ? Puis, pourquoi je devrais être celui qui lui apporte sa nourriture ? Après ce qui s'est passé tout à l'heure, il serait plus judicieux d'envoyer Bora ou même Bonhwa... « J'aime bien ce surnom. Vu que tu n'as fais que gagner ce soir, j'pense que j'vais t'appeler comme ça. » se justifie-t-il. Jinyoung approuve totalement, certain que je porte ce surnom à merveille. Bien...peut-être qu'avec un peu de chance, le maître sera déjà endormi... J'attrape l'assiette de pizza que me tend Jaehwan et monte lentement les marches de l'escalier jusqu'à la chambre du maître.

– « Maître Min... » susurrais-je faiblement après avoir frappé contre sa porte. N'ayant pas entendu de réponse, j'ai simplement décidé d'entrer pour vérifier qu'il était bien en train de dormir. La chambre n'est illuminée que par l'écran de télévision, dont le niveau sonore est toujours baissé au maximum. Le maître est assit sur son lit, sous son épaisse couverture, le regard neutre. Parfois, j'ai l'impression que Yoongi ne vit plus, qu'il attend simplement que la mort ne vienne le voler à ce monde...

– « C'est toi qu'ils envoient... » dit-il d'un ton qui ne m'enchante pas grandement. Il n'a pas daigné poser les yeux sur moi, sûrement peu envieux de me voir après ce qui s'est passé tout à l'heure.

– « Je vous apporte de quoi manger. Elle est chaude, Jinyoung vient juste de la sortir du four... » avançais-je calmement. Je suis venu jusqu'à lui pour lui tendre l'assiette de pizzas mais même comme ça, ma présence n'a pas réussi à capter son attention. Il fixe incroyablement les images qui défilent dans l'écran, comme s'il laissait ces dernières absorber toute son énergie. J'ai envie de poser ma main sur son front, de vérifier sa température. J'ai tellement peur qu'il ne retombe dans mes bras. Si cela devait arriver, je ne saurai réellement que faire à part crier à l'aide.

– « Je n'ai pas faim. » assure-t-il insensiblement. Je reste le contempler quelques secondes, ébloui par le brillant de ses yeux, les quelques reflets bleus sur ses mèches de cheveux mais surtout par la prestance indéfinissable qu'il a à être aussi refermé et flegmatique à la fois.

– « Maître, si vous voulez aller mieux, il faut que vous... »

– « Win, je n'ai même pas la force de lever le bras. » me coupe-t-il glacialement. Son regard noir vient croiser le mien, le mien qui est toujours aussi captivé par la personne qu'il est. Nous restons nous fixer une nouvelle fois, exactement de la même manière qu'hier sauf que cette fois-ci, c'est moins agréable. Beaucoup moins agréable... Qu'est-il en train de se passer ? Je me sens tout à coup plus étrange, comme alourdi, mécontent ou déçu par quelque chose. Pourtant je n'arrive pas à savoir ce qui me préoccupe l'esprit, ce qui me rend dans cet état. Mon cœur me pèse...il me pèse indéniablement d'un je ne sais quoi... Puis...est-ce qu'il vient réellement de m'appeler Win ? Est-ce que...est-ce qu'il a entendu Jaehwan m'appeler ainsi ?

– « Moi, je peux le faire. » déclarais-je, avec confiance. J'avais peur de me perdre dans mes pensées, de passer pour un fou si je continuais de me questionner sur moi-même. Alors j'ai ignoré cette pression incompréhensible et ma bouche s'est ouverte par réflexe, mystérieusement.

– « Est-ce que tu te moques de moi ? » souffle-t-il, complètement blasé par mon insistance. « Pose ça-là et viens t'allonger. Je meurs de froid, j'ai besoin que quelqu'un réchauffe mon lit. » m'ordonne-t-il autoritairement. Pourquoi est-il devenu ainsi ? Pourquoi l'homme au grand cœur qui a sauvé la vie de monsieur Park autrefois, est-il devenu aussi impassible et sévère ? Comment peut-on s'attacher à quelqu'un comme Min Yoongi s'il ne cesse de parler froidement et avec méchanceté ? Le fait qu'il soit malade, mais surtout qu'il soit mon supérieur dans cette maison m'oblige à éteindre mes envies de rébellion. Pour la façon dont il me parle, j'attendrai d'avoir trouvé ma place pour lui en discuter. Pour l'instant, je n'ai qu'une seule mission à accomplir, le faire manger.

– « Et bien...si vous mangez, je le ferai. » le défiais-je nerveusement. Bon Dieu, qu'est-ce que je suis en train de faire ? Min Yoongi me fusille de son regard noir, faisant presque trembler mes jambes tellement j'ai peur de ce qu'il va se passer... « Si vous finissez, ne serait-ce qu'une part...je vous aiderai à vous réchauffer. » soulignais-je avant qu'il n'est le temps de répondre. Il expire lourdement, signe qu'il va certainement m'envoyer balader d'une minute à l'autre...

– « Es-tu en train de me faire chanter, Sicheng ? » pense-t-il à voix haute. Je me contente d'hocher la tête, tout simplement. Puisque de toute façon, il n'approuvera certainement jamais ma façon de faire, autant le faire comme je veux. « Sais-tu que si je l'veux, je pourrai d'un claquement de doigt, te foutre à la porte ? » me menace-t-il sérieusement. Je le sais. Mais qu'ai-je donc à perdre ? Je ne pourrai jamais rien comprendre aux énigmes que m'a transmis mon grand-père dans sa lettre si je ne prends pas la décision de m'investir concrètement dans mon travail.

– « J'en ai parfaitement conscience. Maintenant, mangez. » J'ai attrapé une part de pizza et est promptement mené celle-ci jusqu'à la bouche du maître. Sans réticence, il a entrouvert ses lèvres et mangé. Malgré la victoire que je venais de vivre, l'embarras que je ressentais lorsqu'il restait me dévisager scrupuleusement ne m'avait pas poussé à insister pour qu'il ne mange la deuxième part. Comme convenu, j'ai retiré mes chaussures puis fais le tour de son lit pour venir m'installer à ses côtés, à la place que j'occupais encore cet après-midi. Sans même oser le regarder, ni même dire quoique ce soit, j'ai attendu qu'il s'allonge de lui-même pour venir le serrer dans mes bras. Je ne comprenais pas ma façon d'agir, ni même ce qui était en train de me passer par la tête. C'était un peu comme si je ne pouvais plus penser par moi-même lorsque je me trouvais dans la même pièce que lui. Mais j'avais conscience d'une chose, il fallait que je me ressaisisse et que je trouve le moyen d'être plus professionnel envers lui. Et ce, dès demain.

Beside me |sugawinwin|Où les histoires vivent. Découvrez maintenant