Prologue

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Max s'observe dans le miroir face à lui. Il ne s'est jamais trouvé particulièrement beau. Le reflet face à lui ne lui plait pas. Ses cheveux bruns un peu trop long lui frôlent les tempes, ondulant par endroit, leur seul point positif étant qu'ils sont soyeux. Ses yeux verts émeraudes s'attardent sur son nez, sa bouche formant un arc de cupidon dont les lèvres pleines cachaient des dents trop blanches, trop parfaites. Tout son corps est ainsi : parfait, sans défaut si ce n'est ces cheveux trop longs et ce grain de beauté juste sous son oeil droit. Le sport qu'il pratique depuis des années pour refouler sa haine, sa rancoeur, sa peine lui permettait d'avoir de beaux abdos sous une peau lisse et bronzée, des bras musclés prêt à sauver une jeune fille en détresse.

Par ailleurs, la gent féminine n'était pas insensible à son charme, n'y voyant qu'un bel apollon aux traits délicats et soignés, faisant abstraction du désordre de ses boucles brunes. Max aurait pu se trouver beau, très élégant même, mais quand il contemplait son reflet, lui, n'y voyait qu'un pauvre gars paumé, sans amour, sans attache, les yeux trop brillants, scintillants de mélancolie, la peau trop terne malgré son bronzage, le manque étant ancré sur son épiderme.

Alors, Max, évitait de croiser son regard dans une vitre, préférant camoufler son beau visage derrière un écran d'ordinateur à aligner des mots que jamais personne ne prendrait la peine de lire. Il préférait se plonger dans un monde où tout allait bien, un monde qu'il pouvait façonner à sa façon : le rendant triste par moment, joyeux un autre, pouvant même faire revenir certains personnages. Dans ce monde là, il n'y avait ni manque, ni peine, ni douleur, ni meurtre. Le pauvre gosse sans père n'était nul part. Le pauvre orphelin en détresse n'existait pas.

Pourtant, Max était furieux ce jour là, furieux contre lui-même. Furieux d'avoir trop bu un beau soir de juillet, furieux de s'être laissé toucher par les paroles blessantes de son meilleur ami, furieux d'avoir voulu montrer qu'il n'était pas aussi idiot que les autres le croyait.

« Tu écris pour toi parce que la vérité c'est que tu as peur Max, tu as peur de ce que les gens pourraient penser de toi, tu as peur de voir la réalité en face, tu as peur qu'ils disent que cet auteur de talent n'est que le fils d'un psychopathe mort et enterré qui refuse de voir qui était vraiment son père. Tu n'es qu'un lâche Max. Bordel, secoue toi un peu et envoie ce foutu manuscrit ! »

C'était ce que Jack lui avait dit après quelques bières bues dans un bar aux allures douteuses. Max s'était violemment disputé avec son ami. Comment pouvait-il lui parler ainsi ? Evoquer la mémoire de ce défunt si cher à son coeur et dont la mémoire avait été salie ? Comment pouvait- il le traiter de lâche lui, qui savait mieux que quiconque ce que Max avait vécu toutes ces années sans la présence de ses parents ? Comment avait-il pu ? Mais, au fond de lui, Max savait que Jack avait raison. Il avait peur. Terriblement. Alors, il avait pris son ordinateur et envoyé ce fichier à cette maison d'édition. Le lendemain, il avait regretté son geste, puis avait pensé qu'il n'aurait jamais de réponses. Les mois avaient passé et Max avait oublié toute cette histoire.

Mais il y a une semaine, il avait reçu cette réponse tant redoutée. Son manuscrit avait plu. Beaucoup. Enormément. Et cette jeune femme, Alexia, souhaitait le voir, le rencontrer, afin de lui proposer un contrat. Elle lui disait qu'elle pouvait largement en faire le prochain best-seller, que lui, Max Schneider, avait du talent.

 Du talent ? Ce n'est qu'une pauvre conne qui ignore ce dont elle parle, une hypocrite. 

Max abattit son poing contre le miroir qui se brisa, ensanglantant sa main par la même occasion, mais il ne ressentit pas la douleur. Cela faisait bien longtemps qu'il ne ressentait plus rien, qu'il était une coquille vide de toute émotion. Un profond soupir s'échappa de sa gorge alors qu'au même moment on toqua à sa porte d'appartement.

Les Sentiments De Max Où les histoires vivent. Découvrez maintenant