Raphaël se réveilla en sursaut. Ce soir, après le dîner, il était retourné travailler dans l'ancien bureau de son père. Il avait une importante opération à préparer pour dans deux jours. Mais la fatigue avait pris le dessus et il s'était endormi sur le bureau. Un cri strident venait de le réveiller mais maintenant qu'il avait les yeux bien ouverts, il n'entendait plus rien. Il jeta rapidement un œil sur la pendule, accroché au dessus de la porte. Il était trois heures du matin. C'était l'heure pour lui de regagner son lit et de se reposer quelques heures avant de retourner à l'hôpital. Il rangea ses affaires et quitta le bureau. Il était presque arrivé à sa chambre lorsqu'il entendit de nouveau crier. Cette fois-ci, il en était sûr, il n'avait pas rêver ! Et le cri venait de la chambre de Lisa.
Rapidement, il abandonna ses dossiers sur son lit et se précipita jusqu'à la chambre de la jeune femme. Lorsqu'il arriva, il se rendit compte que Laura l'avait devancé. La porte de la chambre était ouverte et la gouvernante était debout, au milieu de la chambre. Raphaël ne voyait Lisa nulle part. Elle n'était pas dans son lit. Alors, doucement, il pénétra dans la chambre et s'arrêta aux côtés de Laura. Lisa était là, assise par terre, sous la fenêtre, les jambes repliées contre le torse. Sa respiration était haletante, des larmes coulaient le long de ses joues et elle se balançait doucement, le regard dans le vide.
- La pauvre petite ... » Murmura Laura sans oser faire un pas vers la jeune femme.
- Elle fait une crise de panique. » Se contenta de répondre Raphaël avant d'avancer.
Il s'accroupit devant la jeune fille et posa une main sur son genoux. Immédiatement, Lisa lui attrapa la main, se redressa et le mit à terre en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Elle passa au dessus de lui et leva son poing en l'air. Mais heureusement pour Raphaël, elle arrêta immédiatement son geste lorsqu'elle se rendit compte qu'il ne s'agissait que du fils de Henri. Elle ne vivait plus dans la rue et personne était en train de l'agresser.
- Je ... je suis .... pardon ... désolée ... » Bégaya Lisa sans pour autant bouger.
- Ce n'est rien ... » Murmura Raphaël, encore un peu surpris.
Ce n'est qu'à ce moment là que la jeune femme se rendit compte qu'elle était à califourchon au dessus de lui. Elle se releva vivement, honteuse.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? » Questionna Laura en s'approchant enfin d'elle pour la prendre dans ses bras.
- C'est rien ... Je suis désolée ... Je ne voulais pas vous réveiller ... » Se contenta de répondre Lisa, encore tremblante.
- Vous faites souvent des crises d'angoisse comme ça ? » Lui demanda tout de même Raphaël de sa voix de médecin.
- Vous n'êtes pas mon médecin ! » Répliqua la jeune femme, sur la défensive.
- Très bien, la prochaine fois, je vous laisserai toute seule avec votre crise ! J'ai autre chose à faire ! Bonne nuit Laura ! » Rétorqua le jeune homme avant de tourner les talons.
- Lisa .... » Commença à la réprimander Laura.
Mais la jeune fille la coupa immédiatement.
- Désolée de vous avoir réveiller. Vous pouvez aller vous recoucher. Bonne nuit. »
Laura n'insista pas et quitta la chambre de Lisa pour rejoindre celle de Raphaël. Le jeune homme était torse nu et visiblement sur le point d'aller se coucher. Mais la gouvernante se permit tout de même d'entrée et de s'asseoir sur le lit du jeune homme.
- Je n'ose même pas imaginer ce que cette petite a pu vivre dans le passé ... » Commença Laura avec tristesse.
- Ça ne nous regarde pas. » Se contenta de répondre Raphaël d'une voix neutre.
- Tu ne pourrais pas être un peu plus aimable ! » S'énerva la gouvernante malgré elle.
- Non ! Désolé ! Cette fille n'a rien à faire ici ! Peu importe ce qu'elle a pu vivre dans le passé, ce n'est pas notre problème ! Mon père pouvait bien faire ce qu'il voulait de son vivant, mais il n'avait pas le droit de nous l'imposer comme ça ! Ni de lui donner tout ça ! » S'emporta à son tour le jeune homme, les poings serrés.
- Tu dis seulement ça parce qu'elle te tient tête et qu'elle se permet de t'envoyer promener ! Tu es vexé de te faire remettre en place par une jeune fille qui ....
- C'est une SDF ! » La coupa Raphaël d'une voix mauvaise.
Laura se leva d'un bond, furieuse.
- C'était oui, et alors ?! Elle te plaît cette SDF comme tu dis !
- Qu'est-ce que tu racontes ! » S'offusqua le jeune homme en la toisant de toute sa hauteur.
Mais la gouvernante n'avait pas peur de lui comme les autres, elle ne se laissait pas impressionner par cet enfant qu'elle avait élevé.
- J'ai bien vu ta façon de la regarder tout à l'heure, dans la cuisine, quand tu l'as découverte dans ses nouveaux vêtements. Je ne te blâme pas, c'est vrai que c'est une très jolie femme.
- Tu dis n'importe quoi ! Et maintenant, excuse-moi, mais j'aimerai dormir un peu avant de reprendre le travail ! » Termina-t-il tout en la raccompagnant jusqu'à la porte.
- Je t'ai élevé Raphaël, je te connais par cœur ! » Ajouta seulement Laura avant de tourner les talons.
Lisa fit rapidement demi-tour pour regagner sa chambre. Elle avait décidé de suivre Laura, au dernier moment, pour s'excuser. Mais au lieu de cela, elle avait surpris la conversation entre la gouvernante et Raphaël. Ce type était odieux, elle le détestait ! Elle espérait vraiment qu'il quitterait la maison un jour pour retourner vivre dans son appartement du centre de Londres. Ce n'était qu'un enfant de riche, pourri gâté, qui n'avait jamais appris à respecter les autres ! Il n'était rien de plus qu'un fils à papa ! Peut-être que Raphaël détestait les sans abri mais elle, elle détestait les fils à papa ! Au moins, ils étaient quittent !
* * * * *
Le lendemain matin, Lisa se réveilla de meilleure humeur. Elle traîna quelques minutes de plus sous la douche, s'habilla avec ses nouveaux habits et descendit rapidement jusqu'à la cuisine. Il était très tôt et elle était la première debout. Elle entreprit alors de fouiller dans les placards afin de préparer un petit déjeuner pour Laura et ainsi se faire pardonner de son comportement de la veille. Elle mit un certain temps à tout préparer mais au final, elle était plutôt fière du résultat. Elle déposa le plateau bien garnit sur un petit meuble, juste à côté de la porte de chambre de Laura. Elle aurait aimé lui écrire un petit mot pour s'excuser mais bien sûr, elle n'en était pas capable. Elle lui dirait de vive voix.
En attendant que tout le monde se lève, elle décida d'aller promener Hector. Le jour de son arrivé, Raphaël avait décrété que maintenant, le labrador serait sa responsabilité. Mais c'était surtout parce que ce pauvre chien lui faisait de la peine qu'elle avait pris la décision de s'en occuper. Laura lui donnait à manger, bien sûr, mais personne ne jouait avec lui, ne le caressait, ne le promenait. Encore une fois, Lisa mit un moment à trouver la laisse du chien. Ce dernier était couché près du feu et la regardait faire les allées retours dans toute la maison. Mais même s'il semblait bien installé au chaud, il se leva d'un bond pour lui sauter dessus dès qu'elle revint vers lui avec la laisse en main.
- On va aller faire un petit tour Hector ! Ça te dit ? Oui, bon chien ! » S'exclama Lisa avec une voix trop enjouée.
- J'ai l'impression que ça lui dit bien. » Intervint soudain une voix dans son dos.
La jeune femme se retourna et découvrit Raphaël. Il semblait à peine réveillé avec ses petits yeux et ses cheveux en bataille. Il ne souriait pas mais son ton était plus aimable que d'habitude.
- Si Laura demande où je suis, vous serez gentil de lui dire. » Se contenta de répondre Lisa tout en enfilant son manteau et son bonnet.
- Je le ferais. » Soupira le jeune homme avant de se diriger vers la cuisine.
- J'ai préparer le petit-déjeuner, servez-vous. » Termina Lisa avant de claquer la porte derrière elle, le chien à ses trousses, sautillant de joie.
