Chapitre 11

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- Est-ce que ça va mieux ? » Questionna Raphaël alors que la jeune femme s'installait de nouveau dans son lit.
- Je crois oui ... » Murmura-t-elle sans oser le regarder dans les yeux.
Elle avait tellement honte de faire ces crises d'angoisse, et devant lui en plus !
- On a croisé ces hommes cet après-midi ..., commença le jeune homme, hésitant, et tu fais une crise d'angoisse maintenant alors que tu n'en avais pas fais depuis deux semaines.
- Je vais bien. » Le coupa Lisa en tentant de lui servir un pitoyable sourire.
- Parle-moi s'il te plaît, ça pourrait te faire du bien ... Et je sais que nous deux, ça n'a pas vraiment bien commencé mais maintenant ... Je t'apprécie vraiment Lisa ... J'ai été le pire des cons au début de notre rencontre et je m'en excuse ...
- Raphaël arrête ... J'ai été odieuse moi aussi de toute façon ... On n'a qu'à ... oublier tout ça, tu veux ? J'ai pas l'habitude qu'on s'occupe de moi ou même qu'on prenne cinq minutes pour m'écouter parler de moi. Je sais pas faire, excuse-moi.
- Tout comme tu ne savais ni lire ni écrire et regarde maintenant, tu t'en sors de mieux en mieux. Alors pourquoi ne pas commencer un nouvel apprentissage ?
- Tu ne me laisseras pas tranquille n'est-ce pas ? De toute façon je te vois mal m'apprendre ça, tu ne parles jamais de toi non plus, jamais de ta mère ... Tu m'as à peine parlé de Henri.
- Très bien, alors, si tu as toute la nuit, je commence ! J'avais une super relation avec mon père quand j'étais petit. C'était mon héro, mon modèle. Si je suis devenu médecin, c'est seulement parce que je voulais faire comme lui et parce que je voulais qu'il soit fier de moi. Ma mère elle, était géniale. Elle me soignait, me réconfortait, me lisait des histoires tous les soirs, m'apprenait à faire à manger, m'aidait à faire mes devoirs, me chantait des chansons. Elle avait une voix magnifique, elle aurait pu devenir chanteuse mais elle n'a jamais essayé. Elle me répétait qu'elle était comblée avec mon père et moi et que ça lui allait de nous avoir comme seul publique. Elle ne voulait chanter que pour nous. On vivait dans cette maison, on était une famille heureuse. Et puis, ma mère a eu cet accident de voiture ... Elle est morte sur le coup ... Je vois encore les pompiers ... Ils sont venus frapper à notre porte et c'est moi qui ai ouvert ... J'avais six ans mais je me souviens que j'ai tout de suite compris que quelque chose n'allait pas ... Ils m'ont regardé avec tellement de pitié dans les yeux ... Et puis mon père est arrivé et m'a demandé de monter dans ma chambre. Je ne l'ai pas fais, j'ai fais semblant et je suis resté dans le salon. Et j'ai entendu les pompiers dirent que ma mère était morte. Mon père s'est effondré. Il m'a trouvé dans la salon, il m'a dit qu'il était désolé et puis il m'a couché. Ensuite, on a plus joué ensemble, on ne se parlait même plus. Une semaine plus tard Laura est arrivée et je ne voyais presque plus mon père. Et ça a été comme ça ces vingts dernière années. Quand mon père est mort, je n'ai pas su être triste parce qu'en réalité, je l'avais perdu il y a vingt ans. Sa mort ne devait rien changer à ma vie. Et finalement, ça a tout changé, parce que tu as débarqué dans ma vie et je suis content que tu l'ai fais. Tu m'as remis les pieds sur terre et j'en avais besoin.
- Je suis désolée d'entendre tout ça ... » Intervint enfin Lisa d'une toute petite voix.
- Tu n'as pas à l'être, ça s'est passé comme ça et puis c'est tout. Maintenant, si tu as envie de me raconter quelque chose, je t'en prie. Si tu ne veux toujours pas tant pis, une autre fois peut-être. » Répliqua habillement Raphaël tout en lui lançant son plus beau sourire.
- D'accord ..., murmura la jeune femme tout en prenant une grande inspiration, je t'ai brièvement parlé de mes parents la dernière fois ... Voilà, en fait, je ne les ai pas vraiment connu ... Ils sont morts dans un crash d'avion quand j'avais six mois. J'ai été recueilli par ma grand-mère. Et elle a été géniale avec moi. Elle m'a offert des années merveilleuses. On avait pas un sous et on ne mangeait qu'une fois par jour. Je n'allais que très rarement à l'école parce qu'elle perdait un peu la tête. Mais elle m'aimait et je l'aimais moi aussi. Malheureusement, elle est morte à mes dix ans. Comme je n'existais pour personne, je suis restée deux semaines seule dans la maison de ma grand-mère sans que personne ne se soucie de moi. Et puis une jour, une voisine m'a vu et est venue me poser des questions. Ensuite elle a appelé la police et après quelques recherches, la police m'a déposé chez ma tante. Je ne la connaissais pas mais il paraît que c'était la sœur de mon père. Cette femme avait un mari et deux enfants, une bonne situation et aucune envie de s'occuper de moi alors qu'elle n'aimait déjà pas son frère. J'ai hérité du grenier et je ne mangeais pas beaucoup plus qu'avec ma grand-mère. J'allais à l'école mais j'étais complètement perdue parce que je ne savais ni lire ni écrire, je n'étais pas au niveau ... Finalement, en grandissant, j'ai finis par devenir une sorte de petite délinquante. J'ai fais tellement de conneries que j'ai donné une bonne excuse à ma tante pour me foutre dehors à quatorze ans. Depuis, je vis dans la rue ou plutôt je survis.
- Tu vivais ... Ces années n'ont pas dû être facile ... Se retrouver dans la rue à quatorze ans c'est ...
- Oui, on m'a beaucoup dépouillé parce que je ne savais pas me défendre. On m'a frappé et violé aussi, plus d'une fois ... Quand ton père m'a sauvé ... Je voulais tellement mourir pour oublier tout ça ... J'avais tout le temps faim, froid ... Je me sentais si seule ... Les gens me regardaient de travers ou alors ne me regardaient pas du tout ... J'avais l'impression de ne plus exister, d'être déjà morte ... Personne n'aurait vu la différence si .... Bref, Henri ma sauvé et il s'est occupé de moi à sa manière et comme il le pouvait aussi face à mon refus catégorique ... La vérité c'est que j'avais peur ... Peur qu'il soit malveillant lui aussi ... Qu'il me fasse du mal ... J'ai appris à me défendre au fil du temps et petit à petit, plus grand monde ne m'embêtait, je m'étais fait ma réputation, un peu comme en prison ... Mais je suis toujours restée méfiante ... Je l'ai été avec toi aussi ... Surtout que tu t'es comporté comme un gros con lors de notre rencontre. J'avais envie de t'arracher les yeux !
- Et bien, il faut que je te le dise, je tiens tout particulièrement à mes yeux ! » Lança Raphaël en riant.


Lisa éclata de rire, trop contente que le jeune homme ait réussit à changer de sujet avec humour après cette avalanche de mauvaises expériences. Ce dernier arrêta de rire pour la regarder avec admiration. La jeune femme avait conscience de ce regard, elle-même était persuadée d'avoir le même lorsqu'elle le regardait lui. Mais elle ne savait pas quoi faire de toutes ces nouvelles choses qu'elle ressentait. Alors elle attendait patiemment que lui fasse quelque chose, parce qu'il devait savoir ce qu'on était censé faire dans ce genre de situation. Pas elle. Et puis, est-ce qu'elle en était capable ? Après tout ce qu'elle avait vécu, pouvait-elle faire confiance de nouveau à quelqu'un sans avoir peur de l'abandon, sans avoir peur qu'il la blesse. On avait déjà abusé de son corps, on avait déjà blessé son cœur, mais ce cœur là, pas celui qui aime d'amour ... Elle avait survécu au pire pendant vingt ans, mais pourrait-elle survivre à une peine de cœur ? Elle n'en était pas certaine.

- En tout cas, merci de m'avoir confié tout ça. J'ai l'impression de mieux te connaître, de mieux te comprendre ... Et merci de m'avoir écouté parler de ma mère et de mon père alors que ce sont clairement des problèmes insignifiants ! » Reprit Raphaël après un instant de silence.
- Ce ne sont pas des problèmes insignifiants, aucun problème n'est insignifiant. Ça t'a fait beaucoup de mal à toi aussi. Merci d'avoir partagé ça avec moi, je sais bien que c'est pas dans tes habitudes et que c'est compliqué pour toi, monsieur viril !
- Je vois pas de quoi tu parles ! » Rétorqua-t-il en faisant la grimace.
- Oh si ! Tu vois très bien de quoi je parle ! » Le reprit Lisa en riant.
- Bien ! Je propose qu'on essaye de dormir un peu, en plus, ça me permet d'esquiver ton attaque mesquine !
- N'importe quoi ! Regarde-toi ! » Ria-t-elle de plus belle.
- J'adore t'entendre rire ... » Bafouilla Raphaël avec un sourire jusqu'aux oreilles.
- Ça me fait du bien. » Confirma Lisa avec gêne.
- C'est bien ... » Murmura le jeune homme alors qu'il ne parvenait plus à détacher ses yeux des lèvres de la jeune femme.
- Bonne nuit Raphaël ...
- Bonne nuit Lisa ... »

Raphaël se pencha vers la jeune femme et lui embrassa tendrement le front. Puis il la couvrit et quitta lentement la chambre.

Un nouveau Noël pour une nouvelle vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant