W.R.O.N.G

8- Gilda for a night

La femme fatale... Redoutée par le sexe opposé, jalousée par ses congénères. La froide, la puissante, l'impitoyable. Celle qui suscite la chair de poule par le simple regard. Celle qui émoustille par le simple frôlement. Celle qui dérobe les cœurs subtilement sans même générer aucun effort. Celle qui marque son époque et éblouit par son histoire. Personne n'arrive à sa hauteur. Posséder tout l'argent et la beauté du monde ne permettrait pas d'acquérir une once de sa splendeur éternelle. Cléopâtre, Isabelle de Castille, Elizabeth la vierge, ont été des monarques à couper le souffle et ont porté sur leurs épaules de gigantesques empires. Olympe de Gouges, femme politique et mère du féminisme dont le combat pour l'égalité lui a coûté la vie. George Sand à la plume transcendante qui a brillé parmi les grands génies littéraires. Simone De Beauvoir, une libertine qui a si merveilleusement prôné l'égalité des sexes au biais de sa rhétorique palpable et ses romans à renommée mondiale.

La féminité... Considérée en tant que faiblesse chez les hommes.  Épiée à l'instar d'un handicap que le sexe considéré comme  « faible » de nature emploie pour arriver à ses fins.  La société impose l'image du corps de l'homme regorgeant « de  muscles et de force » et l'associe ainsi avec insistance à la virilité. Elle condamne aussi la femme à cette réputation de douceur, d'adresse et de maternité et la positionne au rang d'esclave de la patriarchie. Pour s'en sortir, elle use de ce qu'on lui reproche telle une arme pour s'émanciper. Elle dissimule la plus dévorante des tentations, la manipulation la plus atroce. C'est la meilleure expression de la nature humaine, une abstraction infinie et sans limites. Elle ne conduit guère vers la légèreté mais plutôt vers la liberté. Elle ne se résume pas seulement à la séduction. La féminité est l'art d'inventer de toute pièce un personnage éloquent, sensuel et inapprochable. Le don d'incarner une version irréprochable de sois même qui toucherait le fantasme de chaque individu qui a le malheur de porter les yeux sur la bête que tu engendres. Le talent de mener en bateau qui que ce soit à travers la corrélation du langage corporel significatif et de l'espièglerie. Finalement, c'est surtout pousser à sous-estimer afin de bondir sur sa proie.

*****

Je sentais que la vie avait enfin laissé un peu de clarté de ce monde pour moi. Je remarquai pour la première fois qu'il faisait beau, que le soleil surplombait le bleu azur du toit de cette terre jusqu'à réchauffer mon cœur trop refroidi par la tournure que ma vie prenait ces derniers temps. Je repris le bus vers l'auberge, une excitation hors pair débordant de mon esprit. Une fois là-bas, je pris le numéro de la rouquine d'hier soir et lui téléphonai sans aucune hésitation. Dommage, je tombai sur son répondeur :
« Hi ! C'est Ciara, la belle et l'unique ! Je suis au boulot en train de trimbaler mon gros postérieur pour gagner de la tune. Comment j'ai eu à votre avis mes deux ballons ? Je rigole, papa. Je n'ai pas fait d'injection mammaire. Du moins, pas encore ! Ciao ! »

Je me dirigeai cette fois vers Barnes and Nobles Booksellers qui me tentait depuis un moment. Dès que mes yeux se posèrent sur le bâtiment orangé à l'architecture époustouflante, je demeurai bouche-bée avant de me décider enfin d'y entrer. Le haul était gigantesque avec une atmosphère très calme et une quiétude relaxante malgré les regards ébahis de quelques touristes. Je me faufilai au comble de la culture, sentis cette enivrante odeur de papier et frôlai divers couvertures qui défilaient autour du moi telles une spirale délicieusement infernale. J'étais dans mon élément. Durant mon inspection des infinités d'ouvrages qui s'y trouvaient, je fus interrompue par l'appel de Ciara :

- J'ai reçu un appel de votre part, qui êtes-vous ? (lança-t-elle froidement, l'air contrariée)

- Je suis le barman d'hier soir, j'avais pris votre proposition au mot, je m'étais dit pourquoi ne pas vous appeler. Désolé de vous... (Débutai-je)