W.R.O.N.G

6- Lost in Las Vegas

L'anxiété... Tel était mon ressenti envers mon départ vers Las Vegas. On dit que c'est dans la peur de l'inconnu que résident les limites de l'évolution. J'étais à la fois réticente et motivée de retrouver Charlie. Je m'aventurais dans un terrain étranger et seul mon désir ardent de réaliser mon but ultime m'emportait telle une brise douce et légère mais sûre. Durant le court trajet, j'avais élaboré un plan précis que je comptais bien concrétiser afin d'arriver à mes fins. Ma première initiative était d'aller à la Nellis Air force. Je n'avais aucune idée de comment j'allais y accéder, cependant j'allais trouver un moyen d'ici là, j'en étais convaincue.

Une fois le bus arrivé à la station, je sentis qu'un poids lourd et pesant s'était dissipé de mon esprit. Las Vegas était une gigantesque ville, les chances que je le croise étaient très faibles et je comptais m'éloigner des endroits où il mettait les pieds. Je ne connaissais évidemment pas cette métropole sur le bout des doigts, toutefois je m'y étais déjà baladé étant plus jeune avec Charlie et j'avais pris l'habitude d'assister à des événements en tout genre pour éviter de subir son harcèlement le plus possible.

Il était à peu près quatre heures trente et les rues étaient dénuées de toute activité, désertées par les milliers d'habitants qui l'empruntaient au cours de la journée. Je déambulai avec la valise transportée par ma main, reconnaissante du tournant qu'avait pris mon sort. Qui aurait cru que j'allais rencontrer une aussi inspirante personne ? Qui aurait cru que les gens bons de nature existaient toujours sur cette terre ?

Je me rendis au Cultural Corridor où Carrie m'avait indiqué l'auberge après environ deux heures de marche. Durant mon trajet, je repérai les paradoxes et les contradictions que regorgeait cette ville du péché, ce siège du diable et cette capitale de la débauche. Au bout des légendaires casinos rebaptisés centres de l'arnaque et de tous les scandales, des palaces proclamés ambassades de l'extravagance, des banques surnommées refuges des sommes vertigineuses et des butins du marché noir, des jets privés qui se posent et se reposent sur le tramac de l'aéroport, existaient bel et bien des bidonvilles, des guettos et des banlieues à la structure aussi fragile que les ailes d'un papillon. Il y'avait peut-être là l'avion de Britney et de Céline Dion et ceux des autres grand winners de la contrée du roi dollar, mais il y'avait surtout une nuée d'égouts et de souterrains bordant une légion de sans-abris s'abritant tels des malfrats aux profondeurs de la précarité et du désespoir insistant ainsi sur leur poids volatile au niveau de la classe sociale.

Un fois arrivée à l'auberge « Sainte Marie », une demeure inclinée légèrement ressemblant ainsi à une maison ivre, je pénétrai dans le minuscule haul dont le sol était recouvert d'étoffes ressemblant plus à des sortes de nappes à carreaux verts plutôt qu'à des tapis. Les seuls sièges existants étaient sous forme de sofas en cuir rongés à l'allure poussiéreuse. Des tableaux bordant les murs de l'entrée représentaient des montages horribles et aberrants de Marilyn Monroe entièrement dénudées et quelques posters de divers groupes et chanteurs que j'ignorais à part ceux de Marilyn Monson que j'avais aperçu dans un magasin décrivant son style comme étant gore. Au bout du couloir se trouvait une sculpture d'un petit Jésus placée près des escaliers qui semblaient regrouper toute la crasse du monde. Je marchai d'un pas ferme vers le bureau de réception derrière lequel se trouvait une dame de couleur d'environ la soixantaine vêtue d'un accoutrement coloré conforme aux années disco.

- Excusez-moi... Ici c'est bien chez madame Renée ? (demandai-je en lui adressant mon plus beau sourire)

- George Renée. Oui, c'est bien moi. Tu m'veux, quoi ?!! (rétorqua-t-elle durement et froidement)

Mon courage se dégonfla et je lui adressai avec hésitation :

- J'ai été envoyée par Carrie. Elle m'a dit que...