1- His « thing »

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L'impuissance... Le plus dur sentiment qui ait jamais existé à travers l'humanité. Je me sentais vidée, incapable de me prendre en main. J'avais abandonné tout espoir de retrouver qui j'étais vraiment. Il y'avait tellement de rancœur dans mon cœur et je ne reconnaissais aucune partie de moi. Une marionnette, voilà à quoi mon être se résumait. J'étais ligotée par l'emprise que cet homme détenait sur moi et il n'y avait aucune échappatoire. S'enfuir ? Je n'avais nul part où demeurer et je ne survivrais pas de toute façon. Renoncer et m'offrir à lui ? Ce dégoût que j'agrémentais à mon égard me conduirait à ma perte. Les deux alternatives de ce dilemme cornélien que j'avais devant moi me bousculeraient vers ce profond gouffre, ce piège indénouable, cette atroce réalité qu'était la mort. Se suicider ? Je rêvais toujours du retour libérateur de Charlie et m'imaginer sans lui, même au sommeil éternel me paralysait. Quand je pensais à lui, j'arrivais à percevoir ce sourire éclatant qu'il n'adressait qu'à moi, son torse qui me servait de refuge et sa voix à la fois douce et roque qui me rappelait son amour, empêchant la solitude et la peur de s'emparer de moi. À chaque fois que l'un de nous deux faisait une crise d'angoisse, nous avions pris l'habitude de perpétuer un contact des yeux, nous prouvant mutuellement que nous étions bien, là, l'un pour l'autre. Ses mains me caressant le visage, son souffle contre le mien et surtout ses yeux d'un bleu azur envoûtant arrivaient à me donner une force surprenante, surréelle même.

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Perdue dans mes pensées, je sortis mon téléphone  de ma poche afin de consulter l'heure et faisait tomber mon médaillon. Je le ramassai à la hâte et l'écrasai avidement contre ma poitrine. C'était le seul objet qui ne lui appartenait pas. Je n'oublierais jamais le jour où Charlie, l'ayant trouvé abandonné sur le trottoir, me l'avait offert. Je n'avais que cinq ans quand il l'avait accroché à mon cou en me faisant promettre de ne jamais le perdre. Il m'avait murmuré à l'oreille que ni le temps ni l'espace arriveraient à nous séparer. Rien qu'au souvenir de cet instant, mon cœur explosa et je sentais comme une sorte de brulure transperçant mon âme. Je baissai la tête pour écraser ardemment mes lèvres contre le seul témoignage de notre passé évaporé au fin fond de l'oubli et me rendai compte que mes larmes avaient tâché mon unique trésor. J'essuyai les marques de ma faiblesse avec le rebord de mon pull, me levai du Park où j'avais l'habitude de ma réfugier chaque jour à cette heure-ci afin de l'éviter à tout prix. Il était 23h et je priai en y mettant toute ma volonté qu'il soit endormi, dans sa chambre, loin de moi. Je ne savais jamais quand je croiserais son passage. Étant le  propriétaire d'un hôtel de Las Vegas, à environ 60 minutes de ce trou pommé, il n'avait pas d'emploi du temps précis et glandait plusieurs jours à la maison, attendant tel un vautour mon retour. Malgré mes veines tentatives de charger mes journées avec des cours de natation, des séances de bibliothèque et des cours de soutien que je donnais aux plus jeunes, il arrivait à me capturer...

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Je marchai jusqu'au piège du loup sous forme de propriété luxueuse et, en ouvrant la porte, tombai nez à nez face à lui. Il me scruta de la tête aux pieds avec un regard qui en disait long. J'y décelais de l'envie, du désire, de l'espièglerie, des pensées malsaines. Sentir sa présence et deviner ses intentions me retournaient l'estomac. J'avançai en prenant la peine de m'écarter de lui mais il mit fin à mes efforts de le tenir le plus loin possible de moi en m'encerclant au biais de son bras sur mon épaule. Je baissai le regard, incapable de croiser ses yeux qui étaient dirigés vers mon décolleté. Il posa sa main sur ma cage thoracique et j'eus l'impression qu'un poignard creusait ma peau, qu'un incendie me dilapidait à petit feu.

W.R.O.N.GOù les histoires vivent. Découvrez maintenant